Les piliers de Rome : pourquoi l’Italie possède plus d’obélisques que l’Égypte
Alors que Rome est généralement associée au Colisée et à la fontaine de Trevi, la ville abrite également plus d’obélisques égyptiens que l’Égypte elle-même.
Au total, la capitale italienne compte une trentaine d’obélisques – piliers en pierre sculptés dotés d’une pointe pyramidale et, souvent, de hiéroglyphes gravés.
Rome compte aujourd’hui pas moins de treize de ces structures originaires de l’Égypte antique, alors qu’il n’en reste que six dans leur pays d’origine.
Ces obélisques furent commandés par les pharaons pour commémorer les rois passés et célébrer la gloire du royaume d’Égypte antique, ainsi qu’en signe de révérence envers les divinités du panthéon égyptien.
Traditionnellement, les obélisques étaient érigés par paires et placés à l’entrée des temples. Ils étaient souvent édifiés en l’honneur de Ra, le dieu égyptien du Soleil.
Les hiéroglyphes gravés sur les quatre côtés de la structure commémoraient généralement Ra ainsi que différents dirigeants et pharaons.
Lorsque l’empereur Octave (également connu sous le nom d’Auguste) incorpora l’Égypte à l’Empire romain, les nouveaux dirigeants du pays furent enchantés par ses merveilles architecturales et cherchèrent à en transférer les trésors dans leur ville natale.
Certains obélisques furent acheminés depuis l’Égypte, tandis que d’autres furent commandés par les dirigeants romains dans le style égyptien.
Les obélisques n’étaient qu’un aspect de l’intérêt des Romains pour l’Égypte ancienne : Rome adopta également des idées religieuses, l’astrologie et des techniques agricoles.
1. Obélisque du Latran
L’un des obélisques les plus grands et les plus hauts de Rome est l’obélisque du Latran, commandé à l’origine à Karnak, en Égypte, vers 1400 avant notre ère sous le règne du pharaon Thoutmosis III et achevé par son petit-fils Thoutmosis IV.
Thoutmosis III demanda deux obélisques, un en son honneur et un en l’honneur de son père Thoutmosis II.
Lorsque l’obélisque fut achevé sous Thoutmosis IV, il fut placé à l’est du grand temple d’Amon.
Au début du IVe siècle, l’obélisque fut transporté via le Nile dans la ville d’Alexandrie, où il demeura pendant plusieurs décennies. L’empereur Constance II ordonna que la structure fût envoyée à Rome.
Pesant à l’origine 413 tonnes, l’obélisque s’effondra partiellement au fil du temps et, aujourd’hui, à la suite de différents efforts de restauration, son poids est de 300 tonnes.
Après sa reconstruction à la fin des années 1580, une croix en métal fut ajoutée au sommet de l’obélisque, qui fut érigé à son emplacement actuel sur la place San Giovanni.
2. Obélisque de la place Saint-Pierre
En plein cœur de la Cité du Vatican, se dresse un monument importé d’Égypte en 37 de notre ère mais qui aurait été commandé par un pharaon inconnu environ 2 000 ans auparavant, ce qui le rend nettement plus ancien que la ville de Rome elle-même.
Parfois appelé obélisque du Vatican, obélisque de Caligula ou « aiguille de Rome », il est unique du fait de l’absence de hiéroglyphes sur ses flancs, contrairement à la plupart des obélisques.
Cette caractéristique complique la tâche des historiens qui cherchent à en savoir davantage sur ses origines. On sait surtout qu’il a été construit en l’honneur du Soleil.
L’obélisque fut transféré à Rome depuis l’Égypte sur ordre de Caligula, l’empereur tristement célèbre pour ses pathologies psychiatriques et son règne tyrannique.
Un navire fut construit spécifiquement pour transporter l’obélisque jusqu’à la Cité du Vatican, ce qui ne fut pas une mince affaire, dans la mesure où la structure pèse environ 326 tonnes et mesure une quarantaine de mètres de haut.
L’obélisque fut érigé à Rome pour commémorer les prédécesseurs de Caligula, Auguste et Tibère. Des gravures qui leur sont dédiées sont encore visibles sur ses flancs.
En 1817, un cadran solaire fut construit sur la place Saint-Pierre et positionné de manière à ce que l’ombre de l’obélisque marque midi.
Selon des légendes du Moyen-Âge, la sphère de cuivre qui se trouvait originellement au sommet de l’obélisque contenait les cendres de Jules César.
3. Obélisque Macuteo
Autrefois érigé dans l’enceinte du temple de Ra à Héliopolis, l’obélisque Macuteo se dresse désormais devant le Panthéon de Rome.
Des hiéroglyphes détaillant la relation entre le pharaon et le dieu du Soleil (Ra) sont inscrits sur ses quatre faces.
La structure en forme d’aiguille fut créée sous le règne de Ramsès II, qui régna de 1279 à 1213 avant notre ère, et faisait partie d’une paire.
L’obélisque est fait de granit rouge et fut transféré d’Égypte pour décorer le temple d’Isis et de Sérapis dans la Rome antique. Ces divinités égyptiennes étaient vénérées par certains Romains plusieurs siècles avant que l’empire ne conquière l’Égypte.
Une croix chrétienne fut ajoutée à l’obélisque en 1711 par le sculpteur italien Filippo Barigioni.
Peu de détails sont connus sur la façon dont la structure fut acheminée à Rome.
4. Obélisque Flaminio
Au centre de la piazza del Popolo se trouve l’un des premiers obélisques à avoir été transférés de l’Égypte antique à la capitale romaine, connu sous le nom d’obélisque Flaminio.
D’une hauteur d’environ 36 mètres, il fut construit vers 1300 avant notre ère et initialement placé dans le temple de Ra, à Héliopolis.
L’obélisque y demeura pendant plus de mille ans, jusqu’à ce qu’Auguste prenne le contrôle de l’Égypte et décide de déplacer le monument à Rome.
À l’instar de nombreux autres obélisques érigés à peu près à la même époque, l’obélisque Flaminio est fait de granit rouge et comporte des hiéroglyphes gravés sur ses côtés.
Au fil des ans, la structure fut démontée et remontée à plusieurs reprises pour assurer son entretien.
Le pape Sixte V ordonna que l’obélisque fût réparé et placé sur la piazza del Popolo en 1589. Plus tard, en 1823, l’architecte italien Guiseppe Valadier ajouta des sculptures de lion à sa base.
5. Obélisque du palais Montecitorio
Un autre obélisque apporté à Rome par Auguste après sa conquête de l’Égypte est celui du palais Montecitorio.
La structure est constituée de granit rouge et mesure une vingtaine de mètres de haut. Elle date du règne de Psammétique II, entre 595 et 589 avant notre ère.
À sa base se trouve une inscription gravée en l’honneur d’Auguste – un ajout à la structure d’origine.
Comme de nombreux autres obélisques romains, celui du palais Montecitorio subit les ravages du temps – il fut notamment endommagé par des tremblements de terre, des incendies et un assaut normand en 1084.
En 1748, un architecte du nom d’Antonio Zabaglia fut chargé de réparer l’obélisque, tombé en ruine après des siècles de négligence. La restauration fut achevée en 1792
L’obélisque servait initialement de cadran solaire et de calendrier : il était positionné de manière à projeter son ombre sur l’Ara Pacis, l’autel de la paix d’Auguste (commandé par le sénat romain en l’honneur de l’empereur), le 23 septembre, jour de son anniversaire.
Traduit de l’anglais (original).
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