Palestine : les colons israéliens se déchaînent après les attaques à Jérusalem
Peu après 21 h 30 samedi, bien longtemps après la tombée de la nuit dans le village palestinien de Jalud, Mohammad Abad se préparait pour la nuit avec sa famille lorsqu’il a entendu du vacarme à l’extérieur.
Sous le couvert de la nuit, des colons israéliens s’étaient faufilés entre les maisons de Jalud et avaient commencé à s’en prendre aux maisons et aux biens des Palestiniens. Les habitants rapportent que les colons ont utilisé du spray au poivre lors de l’attaque, incendié des véhicules, jeté des pierres, tandis qu’un autre a tiré en l’air.
Mohammad Abad (40 ans), ouvrier du bâtiment, raconte que la plupart des habitants du village étaient chez eux lorsque les attaques ont commencé. Quand les habitants ont compris ce qui se passait, des jeunes palestiniens ont affronté les colons à l’aide de pierres.
« La seule chose qu’on peut faire pour se défendre, c’est de riposter en leur jetant des pierres. Pendant des années, on a réclamé de la sécurité et un moyen de se protéger », indique Abad.
Il relate à Middle East Eye que les soldats israéliens sont arrivés environ une heure plus tard et ont commencé à tirer des grenades de gaz lacrymogène contre les habitants pendant plus d’une demi-heure.
« Même lorsque les soldats sont arrivés, les colons ont continué à nous agresser. Les soldats ont tiré tellement de grenades lacrymogènes contre nous que le gaz emplissait les maisons, les enfants à l’intérieur avaient du mal à respirer. »
Abad ajoute qu’un habitant a dû être hospitalisé et subir une opération, il a eu la jambe cassée pendant les attaques. Il précise que ce villageois a eu de la chance de pouvoir accéder à l’hôpital : des colons s’en sont pris à une ambulance dans le village voisin de Qaryut, au sud-est de Naplouse.
« À chaque heure, chaque minute, partout »
La ville de Jalud subit perpétuellement des attaques de colons, et ce depuis des années. Les colons et l’armée ont pris six des sept collines entourant le village. S’emparer de la dernière colline leur donnerait le contrôle total de la région.
« Les attaques des colons contre Jalud ont lieu jour et nuit. La violence des colons a commencé en 1997 lorsqu’ils ont commencé à voler notre terre et la terre des villages alentour pour bâtir des colonies », indique Raed Hajj Mohammed, chef du conseil de village de Jalud.
« Les soldats ont tiré tellement de grenades lacrymogènes contre nous que le gaz emplissait les maisons, les enfants à l’intérieur avaient du mal à respirer »
- Mohammad Abad, habitant de Jalud
Peu après le début de l’attaque de samedi contre Jalud, une autre attaque de colons a eu lieu à Huwara, une ville palestinienne au sud de Naplouse. Les colons s’en sont pris à des Palestiniens sur la route principale de la ville, utilisée à la fois par les Palestiniens et les colons.
Le maire de Huwara, Moeen Dmeidi, indique à MEE que les Palestiniens dans la région sont exposés aux agressions quasi quotidiennes des colons protégés par l’armée israélienne sur cette route.
Vers 22 heures cette nuit-là, les forces israéliennes ont empêché toutes les voitures palestiniennes de passer via la route centrale de Huwara, raconte à MEE Mahdi Ibrahim (33 ans), propriétaire d’un commerce local.
Une vingtaine de colons sont sortis de leurs voitures et « ont commencé à vandaliser nos magasins avec des pierres, des battes et des tuyaux en métal. Ils auraient pu nous tuer », décrit-il.
« Ils s’en sont pris à mon magasin avec des pierres ; cela va me coûter environ 2 000 shekels [530 euros] pour tout réparer », poursuit-il, au milieu du chaos laissé par les colons derrière eux.
La plupart des colons qui ont attaqué Huwara et les villes voisines viennent de la colonie de Yitzhar, à 10 minutes en voiture du village.
Les habitants signalent que les ambulances ont été empêchées de passer par la route reliant le nord et le sud de la Cisjordanie.
« Ces deux derniers jours, on a subi des attaques de plus de 70 colons – à chaque heure, chaque minute, partout. Lorsque les colons viennent nous agresser, on essaie de se défendre avec tout ce qu’on peut trouver, même si ce sont des pierres ou des bâtons », confie Mahdi Ibrahim à MEE.
Faisant référence au tireur palestinien qui a tué sept Israéliens à Jérusalem-Est occupée la semaine dernière, le maire déclare : « S’il y a de quelconques “risques sécuritaires” pour l’État israélien, les habitants de Huwara sont sur le front des attaques de colons. »
Cette attaque à Jérusalem est survenue le lendemain d’un raid des forces israéliennes dans le camp de réfugiés de Jénine qui a tué neuf Palestiniens.
« Système d’apartheid »
Le week-end suivant la fusillade à Jérusalem-Est, les Palestiniens en Cisjordanie ont connu une flambée des attaques de colons. Dimanche, des colons israéliens ont mené 144 attaques contre des Palestiniens et leurs biens rien qu’à Naplouse.
D’autres ont également eu lieu dans la vallée du Jourdain, à Turmus Ayya au nord de Ramallah et dans le village de Masafer Yatta.
À Masafer Yatta, sur la ligne verte, plusieurs collectivités palestiniennes constatent une augmentation de la violence des colons.
Sami Hureini, habitant et activiste du village de Tuwani, confie à MEE que bien que les attaques de colons se soient multipliéesces derniers mois, la violence de ces derniers jours a été « dure ».
« [Dimanche], mon cousin et moi avons trouvé un groupe de colons en train de détruire un mur de pierre que nous construisons. Lorsqu’ils nous ont vus, ils se sont mis à courir vers nous, et on a dû battre en retraite. Sinon, ils nous auraient tués », assure-t-il.
« Depuis le début du mois de janvier, une centaine d’arbres ont été endommagés et des centaines d’attaques ont eu lieu. Ce système d’apartheid est un gros problème. Il nous affecte quotidiennement. »
Sami indique que la police israélienne ne donne jamais suite aux signalements des Palestiniens après les attaques de colons.
« Les colons ne sont jamais tenus responsables parce qu’ils travaillent main dans la main avec l’armée pour nous chasser de notre terre. »
Bien que les habitants du coin pensent que le pic de violence des colons est lié à l’attaque palestinienne à Jérusalem-Est, ils précisent que la violence des colons a toujours fait partie de leur vie.
« La violence des colons n’est pas uniquement liée aux incidents de ce type. Leurs attaques sont constantes. Ce sont des terroristes et des criminels. Non seulement le gouvernement les protège, mais le nouveau gouvernement les encourage », ajoute Hajj Mohammed, maire de Jalud.
Alors que le gouvernement d’extrême droite israélien se prépare à « renforcer » les colonies en Cisjordanie et à faciliter les démarches pour rendre les armes plus accessibles à ses citoyens, les Palestiniens s’attendent à ce que la situation empire.
Pour Hajj Mohammed, Itamar Ben-Gvir, ministre israélien de la Sécurité nationale, est un criminel.
« Il soutient les crimes de [la milice sioniste] Haganah commis lors de la Nakba et veut que ces mêmes crimes se perpétuent. Il entend continuer à mettre en œuvre des politiques visant à chasser les Palestiniens de leurs terres pour que [les Israéliens] puissent en avoir le contrôle plein et entier. »
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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