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Pourquoi la reine Elizabeth II ne s’est-elle jamais rendue en Israël ?

La défunte monarque, qui a visité plus de 120 pays au cours de ses sept décennies de règne, aurait pratiqué selon certains un boycott officieux d’Israël
Des promeneurs s’arrêtent avec leur chien sur la place Rabin de Tel-Aviv, face à la mairie illuminée aux couleurs du drapeau britannique en hommage à la reine Elizabeth II (Reuters)
Des promeneurs s’arrêtent avec leur chien sur la place Rabin de Tel Aviv, face à la mairie illuminée aux couleurs du drapeau britannique en hommage à la reine Elizabeth II (Reuters)
Par MEE

Bien qu’elle ait visité plus de 120 pays et parcouru près d’un million de kilomètres au cours de ses 70 ans sur le trône, il n’a pas échappé aux observateurs que la reine Elizabeth II, qui s’est éteinte jeudi, ne s’est jamais rendue en Israël.

En effet, aucun membre de la famille royale britannique n’avait posé le pied à titre officiel sur le sol avant 2018, lorsque le prince William, petit-fils de la reine, s’est rendu sur place à l’occasion du 70anniversaire de la création d’Israël, mettant fin à ce que beaucoup percevaient comme un boycott officieux.

Les raisons invoquées pour justifier ce refus présumé allaient de la crainte de contrarier les riches pays arabes du Golfe et de perdre les accords commerciaux qui en découlaient, à la résistance violente d’Israël au mandat britannique lors de sa quête d’indépendance.

En 1984, au cours d’une visite en Jordanie, l’un de ses nombreux voyages au Moyen-Orient, la reine aurait déclaré « comme c’est effrayant ! » alors que des avions de chasse israéliens passaient dans le ciel et que la Cisjordanie apparaissait au loin.

La reine Noor, épouse du roi Hussein de Jordanie, lui aurait répondu : « C’est terrible. »

Plus tard, après avoir observé une carte montrant l’emplacement des colonies illégales en Cisjordanie occupée, la reine Elizabeth II aurait lancé : « Cette carte est déprimante. »

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La reine Elizabeth II reçoit Shimon Peres, alors président d’Israël, au palais de Buckingham à Londres, le 20 novembre 2008, avant de lui remettre un titre de chevalier honoraire (AFP)

Deux ans plus tard, son fils aîné Charles écrivait dans une lettre que « l’afflux de juifs étrangers et européens » en Israël était à l’origine de la persistance du conflit entre Israël et le monde arabe, tout en exprimant sa frustration face au manque de volonté des présidents américains de s’attaquer au « lobby juif » aux États-Unis.

« J’imagine qu’un président américain aura certainement le courage de se lever et de s’attaquer au lobby juif aux États-Unis », a-t-il écrit dans cette lettre rédigée après une visite effectuée dans le Golfe en compagnie de la princesse Diana. « Je dois être naïf, je suppose. »

Nul ne sait si le prince Charles a partagé un jour ses opinions avec sa mère.

Une « machination malveillante et mesquine »

Écrivant en 2012 au sujet de la reine et de l’absence de visite en Israël, l’ancien rédacteur en chef de Haaretz, David Landau, s’exprimait en ces termes : « Cette merveilleuse souveraine de 86 ans, dévouée, n’est la marionnette de personne. 

« Si elle voulait visiter l’État juif ou y envoyer un membre de sa famille proche, elle pourrait insister et obtenir ce qu’elle veut. 

EN IMAGES : La reine Elizabeth II et le Moyen-Orient
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« La triste mais inéluctable conclusion est donc qu’elle participe elle-même à cette machination britannique malveillante et mesquine, visant à priver Israël de ce vestige de légitimité qu’il est en leur pouvoir d’accorder ou de refuser, mais qui leur resterait en travers de la gorge : une visite royale. 

« Elle peut et doit se débarrasser de ces inhibitions nauséabondes et mettre un terme à ce boycott. »

Ceux qui défendent la reine contre les accusations de partialité à l’égard d’Israël soulignent que durant son règne, la monarque a reçu plusieurs présidents israéliens en visite au Royaume-Uni, dont Ephraïm Katzir, Chaim Herzog et Ezer Weizman, décorant même d’un titre de chevalier honoraire l’ancien président israélien Shimon Peres.

Lors d’un petit-déjeuner communautaire organisé à Londres en novembre 2021, le président israélien Isaac Herzog a déclaré sur le ton de la plaisanterie que lorsque son père (Chaim Herzog) a rencontré la reine, les deux chefs d’État ont évoqué le fait qu’ils étaient des descendants directs du roi David. 

La reine était également connue pour sa relation étroite avec la communauté juive de Grande-Bretagne : elle a notamment élevé au rang de pairs le grand rabbin Immanuel Jakobovits ainsi que son successeur Jonathan Sacks et conféré des titres de chevalier à de nombreux autres juifs britanniques.

Bien que la reine ne se soit jamais rendue en Israël, son défunt mari, le duc d’Édimbourg, son plus jeune fils, le prince Edward, ainsi que son fils aîné Charles ont visité le pays à titre officieux.

Avec l’accession de Charles au trône, de nombreux Israéliens se demandent désormais s’il deviendra le premier souverain britannique à visiter le pays. 

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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