Qui est Ons Jabeur, la pionnière du tennis tunisien qui a fait sensation à Wimbledon ?
Hier, malgré sa défaite sur le court central de Wimbledon, la star tunisienne du tennis Ons Jabeur est devenue à l’âge de 26 ans la première femme arabe à participer à un quart de finale du prestigieux tournoi.
Ons Jabeur est souvent décrite comme une pionnière : elle ouvre de nouvelles voies pour les Tunisiens, les Arabes et les Africains à chaque nouvelle avancée et chaque nouvel exploit au cours de sa carrière.
« J’essaie toujours de renvoyer ce message aux jeunes générations en Tunisie et dans le monde arabe, selon lequel ils doivent croire en eux et se dire qu’ils pourraient être ici à ma place un jour », a déclaré Ons Jabeur la semaine dernière.
Avant de s’incliner en quarts de finale, elle a battu trois anciennes gagnantes d’un tournoi du Grand Chelem au cours des huit derniers jours – Venus Williams, Garbiñe Muguruza et Iga Świątek – et conquis le public de Wimbledon.
L’histoire de celle qui s’entraînait jadis dans des stations balnéaires le long de la côte tunisienne avant de devenir rapidement l’une des plus grandes stars du tennis est suivie de près par des millions de personnes à travers le monde.
Une série de « premières » pour les femmes arabes
Ons Jabeur est née le 28 août 1994 à Ksar Hellal, une petite ville du nord-est de la Tunisie, et a grandi dans la grande ville côtière voisine de Sousse.
À l’âge de 3 ans, elle a été initiée au tennis par sa mère, qui pratiquait ce sport à titre récréatif. Elle s’est souvent entraînée dans des hôtels et des établissements touristiques, en raison du manque de courts dans les clubs de tennis locaux.
Ons Jabeur a disputé son premier tournoi national à l’âge de 6 ans et son premier tournoi international quatre ans plus tard. À l’âge de 12 ans, elle a déménagé à 150 km de là, dans la capitale Tunis, où elle s’est entraînée au lycée sportif d’El Menzah, une académie nationale multisports qui accueille les talents tunisiens en devenir.
« Ma mère me conduisait partout en Tunisie pour aller jouer les tournois et elle m’a encouragée à aller étudier dans une école spéciale », a-t-elle raconté.
« C’était un grand sacrifice de voir sa petite fille partir pour tenter de vivre un rêve qui, pour être honnête, n’avait pas 100 % de chances de se réaliser. Elle a cru en moi et m’a donné la confiance nécessaire pour être là. Je soutiens toutes les filles qui veulent être là un jour. »
Elle a fait ses débuts dans un tournoi du Grand Chelem junior à l’US Open en 2009, avant d’atteindre l’année suivante la finale de Roland Garros junior.
Traduction : « J’essaie toujours de renvoyer ce message aux jeunes générations en Tunisie et dans le monde arabe, selon lequel ils doivent croire en eux et se dire qu’ils pourraient être ici à ma place un jour. » -@Ons_Jabeur, historique. #Wimbledon »
C’est en 2011 qu’elle a attiré l’attention internationale en étant sacrée à Roland-Garros, devenant à 16 ans la première Arabe titrée en Grand Chelem chez les juniors.
Depuis lors, l’ancienne enfant prodige n’a cessé de battre des records et de s’aventurer en terrain inconnu.
En 2017, elle est devenue la deuxième femme arabe à entrer dans le top 100 mondial. Elle est désormais la femme originaire de la région la mieux classée de l’histoire.
L’an dernier, elle a réalisé le plus long parcours pour une femme nord-africaine ou arabe en Grand Chelem en atteignant les quarts de finale de l’Open d’Australie, un record égalé uniquement par le parcours qu’elle vient de réaliser à Wimbledon.
En juin, elle a remporté le premier titre de sa carrière sur le circuit de la Women’s Tennis Association (WTA) en battant Daria Kasatkina en finale du tournoi de Birmingham 2021. Elle est ainsi devenue la première femme tunisienne et la première femme arabe à remporter un titre WTA.
« Onstoppable »
Elle est actuellement entraînée par l’ancien joueur tunisien de Coupe Davis Issam Jellali, tandis que son mari Karim Kamoun, ancien escrimeur tuniso-russe, est son préparateur physique depuis 2017.
« Je suis heureuse d’avoir une équipe 100 % arabe et j’espère que nous pourrons réaliser beaucoup de belles choses », a-t-elle confié à Al Jazeera.
Traduction : « Un trio légendaire ! Ons était convaincue qu’elle pouvait réussir avec une équipe entièrement tunisienne et elle continue de prouver chaque jour aux sceptiques qu’ils ont tort. Elle offre aux athlètes du monde arabe un modèle de réussite dont nous avons si désespérément besoin. La première d’une longue série, inchallah ! » / « Toutes nos félicitations à @Ons_Jabeur pour son premier titre @WTA à Birmingham. #Historique pour la Tunisie. »
Le parcours d’Ons Jabeur à Wimbledon a été chaleureusement salué en Tunisie, où le hashtag « Onstoppable » a été largement relayé sur Twitter la semaine dernière.
« Ons Jabeur a rejoint les plus grandes », a titré le journal tunisien Al Chourouk, alors que l’ascension de la tenniswoman de 26 ans faisait la une des journaux.
« Toutes nos félicitations à la championne Ons Jabeur après sa qualification en quarts de finale de Wimbledon », a écrit Rached Ghannouchi, le président du Parlement tunisien.
Alors que la Tunisie traverse actuellement une troisième vague de la pandémie de coronavirus, de nombreux internautes ont remercié Ons Jabeur pour avoir contribué à remonter le moral de la population.
« Nous avons notre fournisseuse officielle de bonheur, la seule qui nous aide à oublier l’actualité sombre en Tunisie : bravo Ons Jabeur », a tweeté le journaliste Marwen Ben Mustapha.
Traduction : « Malgré la situation sanitaire difficile que la Tunisie connaît actuellement et les problèmes de santé mentale auxquels de nombreuses personnes sont confrontées à cause de la pandémie, il y a des bonnes nouvelles en provenance du gazon de Wimbledon pour notre pays, la Tunisie. Cela nous remplit de fierté pour notre pays. #Ons_Jabeur. Un grand match à tous les niveaux lui permet de se qualifier pour les huitièmes de finale, ce qu’elle mérite complètement. »
Ons Jabeur s’est souvent exprimée au sujet du soutien qu’elle reçoit de la part des Tunisiens, expliquant avoir rencontré peu d’obstacles en tant qu’athlète musulmane.
« Je n’ai pas eu de problèmes. Oui, certaines personnes vont probablement faire des commentaires sur ma tenue mais [je les ignore], parce que beaucoup de gens se montrent parfois agressifs. J’essaie de ne pas regarder le côté négatif de la chose », a-t-elle déclaré.
« Nous sommes en réalité très ouverts d’esprit en Tunisie et nous soutenons les femmes pour qu’elles réussissent dans le sport ou à tout autre niveau, donc je suis vraiment fière. Et je pense que c’est une minorité de personnes qui rendent la situation inconfortable pour moi ou pour les autres joueuses. »
Outre ses origines arabes, Ons Jabeur est bien consciente qu’elle brise également le plafond de verre pour les athlètes africaines.
« Parfois, lorsque nous jouons la Fed Cup, des membres des équipes africaines veulent prendre des photos, on me demande comment je joue. C’est vraiment une source d’inspiration pour moi », a-t-elle confié au Guardian.
« Quand quelqu’un me dit que je l’inspire, cela me donne plus de motivation pour m’entraîner et être encore plus exemplaire. J’espère que nous verrons davantage de joueuses africaines sur le circuit. »
Son succès à Wimbledon
Le style de jeu divertissant de la Tunisienne et sa sympathie ont conquis de nouveaux fans au cours de la première semaine de Wimbledon.
La palette d’Ons Jabeur, notamment ses drop shots audacieux, son quadrillage du court pendant les longs rallyes et sa détermination à retourner des situations mal engagées, lui a valu de longues ovations de la part du public de Wimbledon.
Sa légèreté – illustrée par ses jongles avec les pieds entre les points et sa réaction enthousiaste aux éloges de son héros d’enfance Andy Roddick – a également charmé les publics du monde entier.
Traduction : « “Est-ce qu’elle a vraiment fait ça ?!” Ce n’est là qu’un des nombreux gestes de classe mondiale d’@Ons_Jabeur #Wimbledon »
Le parcours historique d’Ons Jabeur a été reconnu par d’autres stars du tennis, dont la quintuple championne de Wimbledon Venus Williams, qu’elle a battue au deuxième tour.
« Je dirais qu’Ons est l’une des personnes que je préfère sur le circuit, honnêtement, elle fait tomber les barrières. C’est la première femme de son pays à faire ce qu’elle fait », a déclaré la joueuse de 41 ans avant leur affrontement à Londres la semaine dernière.
« Vous allez voir toute une autre génération de femmes d’Afrique du Nord arriver dans le tennis. C’est à elle qu’on le devra », a-t-elle ajouté.
« Vous ne pouvez pas limiter sa portée aux femmes de la région arabe. Elle inspire toutes sortes de femmes, moi y compris. »
Malgré sa défaite face à Aryna Sabalenka sur le court central lors de ce qui était sans aucun doute l’un des matchs les plus importants de sa carrière, Ons Jabeur poursuit son parcours pour devenir la première femme arabe et première femme tunisienne à remporter un tournoi du Grand Chelem.
Traduit de l’anglais (original) et mis à jour par VECTranslation.
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