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Turquie : après l’attentat à Istanbul, les Kurdes du PKK dans le viseur des autorités

Un attentat a visé dimanche 13 novembre le cœur battant d’Istanbul, faisant au moins six morts et des dizaines de blessés. Le ministre de l’Intérieur a annoncé l’arrestation d’une personne et accusé le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)
Des membres de la police sécurisent les lieux après qu’une forte explosion a secoué l’avenue commerçante d’Istiklal à Istanbul, le 13 novembre 2022 (AFP/Yasin Akgul)
Des membres de la police sécurisent les lieux après qu’une forte explosion a secoué l’avenue commerçante d’Istiklal à Istanbul, le 13 novembre 2022 (AFP/Yasin Akgul)

Au moins six personnes ont été tuées et 81 blessées après qu’une explosion a frappé ce dimanche 13 novembre la très commerçante avenue Istiklal dans le quartier de Taksim à Istanbul, en Turquie, au moment où la foule était particulièrement dense dans ce lieu de promenade prisé des Stambouliotes et des touristes.

Traduction : « NOUVEAU : Des image divulguées sur les réseaux sociaux montrent le moment de l’explosion sur l’avenue Istiklal. Le coupable pourrait être un sac laissé sur le site. »

« Nous considérons qu’il s’agit d’un attentat terroriste dû à l’explosion d’une bombe déclenchée par un assaillant qui serait une femme, selon les premières informations », a déclaré Fuat Oktay lundi soir devant la presse. « Nous trouverons ceux qui sont derrière cet attentat, qui que ce soit, même s’il va à l’autre bout du monde » a-t-il promis.

Le ministre de l’Intérieur turc Süleyman Soylu a annoncé dans la nuit de lundi à mardi l’arrestation d’une personne et accusé le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

« La personne qui a déposé la bombe a été arrêtée » de l’attentat, a-t-il affirmé. Le ministre n’a pas précisé les conditions dans lesquelles cette « personne » suspectée a été arrêtée, ni s’il s’agit bien d’une « femme ».

La police d’Instanbul, qui a par ailleurs déclaré que 46 personnes avaient été arrêtées, a donné son nom : Ahlam Albashir. Cette ressortissante syrienne aurait avoué avoir été entraînée par les combattants kurdes. 

Le ministre avait cette nuit déjà accusé les forces kurdes qui contrôlent la majeure partie du nord-est de la Syrie, qu’Ankara considère comme « terroristes », d’être derrière l’attentat.

« Nous estimons que l’ordre de l’attentat a été donné de Kobané », a-t-il ajouté.

Ville restée célèbre pour la bataille qui, en 2015, a permis aux forces kurdes de repousser le groupe État islamique (EI), Kobané est contrôlée par les Forces démocratiques syriennes (FDS) dont les Unités de protection du peuple (YPG), alliées au PKK, sont une composante majeure.

Le président Recep Tayyip Erdoğan, s’adressant aux journalistes avant son départ pour le sommet du G20 à Bali, a dénoncé lundi un « vil attentat » et promis : « Les auteurs de ce vil attentat seront démasqués. Que notre population soit sûre [qu’ils] seront punis. »

« Un sac activé à distance »

Le ministre de la Justice, Bekir Bozdağ, a évoqué lundi un « sac » déposé sur un banc : « Une femme s’est assise sur un banc pendant 40 à 45 minutes et, quelque temps après, il y a eu une explosion. Toutes les données sur cette femme sont actuellement en cours d’examen », a-t-il poursuivi.

« Soit ce sac contenait un minuteur, soit quelqu’un l’a activé à distance », a-t-il ajouté.

Des images envoyées à Middle East Eye depuis les lieux montraient les corps mortellement blessés d’un enfant et d’un homme.

Selon des images diffusées sur les réseaux sociaux au moment de l’explosion, celle-ci, accompagnée de flammes, a été entendue de loin et a déclenché aussitôt un mouvement de panique. Un large cratère noir est visible sur ces images, ainsi que plusieurs corps à terre gisant à proximité.

Pendant ce temps, le régulateur turc des médias, RTUK, a imposé une interdiction du partage des images ou des reportages sur l’explosion, exception faite des déclarations du gouvernement.

Traduction : « Voici une femme soupçonnée d’avoir participé à l’explosion/l’attaque, selon Halk TV et des reportages sur OdaTV. Elle porte un pantalon de treillis et un foulard mais son cou est visible. Les images précédentes montraient qu’un sac avait explosé. Pas une bombe suicide. »

L’Autorité des technologies de l’information et de la communication (BTK) a annoncé quelques heures après l’incident qu’elle avait réduit les services internet pour les réseaux sociaux à travers le pays « [pour arrêter la propagation de] contenus terroristes et les images violant l’éthique de la presse. »

Le maire d’Istanbul Ekrem İmamoğlu s’est rapidement rendu sur place : « J’ai été briefé par les équipes de pompiers. Ils poursuivent leur travail en coordination avec la police » a-t-il indiqué sur Twitter, en présentant ses condoléances aux victimes et à leurs proches.

Selon un communiqué du bureau du procureur général d’Istanbul, une enquête a été ouverte.

2016 et l’attentat à la bombe de Beşiktaş

Istanbul a déjà été frappée par plusieurs explosions. Un attentat suicide dans la même avenue Istiklal a été perpétré en 2016 par un membre présumé du groupe État islamique (EI), faisant quatre morts.

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La même année, les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), un groupe radical lié aux séparatistes du PKK, a revendiqué la responsabilité d’un attentat à la bombe qui a tué 47 personnes dont 39 policiers devant un stade de football dans le quartier de Beşiktaş, dans le centre d’Istanbul.

Le PKK est par ailleurs au cœur d’un bras de fer entre la Suède et la Turquie, qui bloque depuis mai l’entrée de Stockholm dans l’OTAN en l’accusant de mansuétude envers le PKK.

Ankara a réclamé l’extradition de plusieurs de ses membres dans un mémorandum d’accord signé en juin avec la Suède et la Finlande, autre pays nordique désireux de rejoindre l’Alliance atlantique.

Le Premier ministre suédois Ulf Kristersson s’est rendu la semaine dernière à Ankara et a promis à Recep Tayyip Erdoğan de répondre aux « inquiétudes » de la Turquie.

Le 1er janvier 2017, 39 personnes, dont 27 étrangers, ont été tuées et 79 autres blessées dans une fusillade au Reina, discothèque huppée d’Istanbul.

Le PKK est au cœur d’un bras de fer entre la Suède et la Turquie, qui bloque depuis mai l’entrée de Stockholm dans l’OTAN en l’accusant de mansuétude envers le PKK

Un assaillant armé d’un fusil d’assaut avait tiré sur la foule qui fêtait le Nouvel An, avant de prendre la fuite. 

L’EI avait revendiqué l’attentat. Après une vaste chasse à l’homme, un Ouzbek, Abdulkadir Masharipov, avait été arrêté. Après avoir avoué être l’auteur du carnage, il était revenu sur ses aveux lors de son procès en février 2019. 

La rue Istiklal, qui signifie « l’Indépendance », est l’une des plus célèbres artères d’Istanbul, entièrement piétonne sur 1,4 km. Sillonnée par un vieux tramway, bordée de commerces et de restaurants, elle est empruntée par près de 3 millions de personnes par jour durant le week-end. 

Traduit de l’anglais (original) et actualisé.

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