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« Inhumain et xénophobe » : une caricature d’Erdoğan électrocuté dans sa baignoire provoque la colère de la Turquie

Des officiels turcs ont répondu sur Twitter à l’hebdomadaire satirique français qui s’en prend régulièrement à la Turquie
« Ceux qui louent le mal se noient toujours dans leur propre haine et leur bêtise », a réagi le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavuşoğlu (AFP/Adem Altan)
Par MEE

« Comme Cloclo, seule la fatalité nous en débarrassera. » Une fois de plus, l’hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, qui a consacré mercredi 17 mai sa une à l’élection présidentielle en Turquie et à la probable victoire de Recep Tayyip Erdoğan au second tour qui se profile le 28 mai, a créé la polémique.

La caricature en une représente le président sortant, nu dans sa baignoire, en train de s’électrocuter alors qu’il change une ampoule – une référence au chanteur Claude François, mort dans ces circonstances le 11 mars 1978.

Des responsables turcs ont réagi sur les réseaux sociaux. Le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Çavuşoğlu, a qualifié cette une d’« inhumaine ».

Traduction : « L’inhumain et ignoble Charlie Hebdo continue d’insulter la nation turque. N’oublions pas ! Ceux qui louent le mal se noient toujours dans leur propre haine et leur bêtise. La véritable leçon est que ceux qui ne peuvent pas vaincre au jeu le libre arbitre de la nation turque comptent désespérément sur le destin. »

Charlie Hebdo avait publié des caricatures du prophète Mohammed en 2006 – comme d’autres journaux européens – pour défendre la liberté de la presse après que leur publication par un quotidien danois avait provoqué la colère de nombreux musulmans.

L’hebdomadaire a été victime en 2015 d’un attentat qui a fait douze morts, dont des journalistes et caricaturistes du journal.

La Turquie, cible récurrente 

Régulièrement, le titre s’en prend à la Turquie.

En février cette année, Charlie Hebdo a provoqué un tollé sur les réseaux sociaux pour avoir publié une caricature tournant en ridicule les tremblements de terre dévastateurs qui ont frappé la Turquie et la Syrie, responsables de plus de 50 000 morts.

Il s’agissait d’un « dessin du jour » partagé sur son compte Twitter, une caricature du dessinateur Juin, montrant un bâtiment endommagé, une voiture renversée et un tas de gravats avec pour légende : « Même pas besoin d’envoyer de chars ! »

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En octobre 2020, la publication avait représenté Recep Tayyip Erdoğan en t-shirt et sous-vêtements, en train de boire une bière et de soulever la jupe d’une femme portant le voile, dévoilant ainsi ses fesses nues.

« Nous condamnons cet effort tout à fait méprisable de la part de cette publication pour répandre son racisme culturel et sa haine », avait alors commenté le principal conseiller pour la presse du président turc, Fahrettin Altun, sur Twitter, en présentant cette publication comme le résultat du « programme anti-musulman du président français Macron ».

Le président turc avait lui-même vivement critiqué la caricature, la qualifiant d’« attaque ignoble » commise par des « vauriens ».

Dans un long tweet, Fahrettin Altun a une nouvelle fois exprimé sa désapprobation.

« Des publications comme Charlie Hebdo, dont la seule motivation est de vomir de la haine contre l’islam, continuent de cibler clairement notre président Erdoğan parce qu’il est l’un des dirigeants musulmans les plus importants des temps modernes », a-t-il commenté.

« Nous ne tomberons pas dans leur piège mais nous continuerons à dénoncer leur xénophobie dégoûtante qu’ils essaient de vendre comme de la liberté d’expression. »

Traduction : « Si le chiffon Charlie Hebdo est devenu si fou… c’est que nous sommes sur la bonne voie. Le mal est parfois comme ça. Il guide le bien. Ne t’inquiète pas Charlie Hebdo. Le 28 mai, notre nation te répondra d’une voix encore plus forte. »

Comme İbrahim Kalın, un autre conseiller d’Erdoğan, le vice-président Fuat Oktay a également condamné la couverture, réitérant l’importance du second tour.

Traduction : « Je condamne fermement le ciblage par Charlie Hebdo de notre président et de la volonté de la nation turque sous couvert de la liberté d’expression. Notre nation, et nous aussi, pouvons voir qui, où et comment le succès de notre président le 14 mai a dérangé. Notre nation bien-aimée donnera à nouveau la réponse nécessaire à cette mentalité le 28 mai. »

À l’issue du décompte des voix, le président Erdoğan affiche une confortable avance de plus de 2,5 millions de scrutins sur son opposant, avec 49,5 % des suffrages exprimés contre 44,9 % pour Kemal Kılıçdaroğlu.

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