Avec Omar Souleyman, la Syrie se fait un nom sur la scène électro
Dès les premières notes de clavier, les corps se déhanchent et les mains se lèvent au son des youyous. Il y a comme un parfum d’Orient, ce vendredi soir, dans la petite salle de concerts strasbourgeoise du Café de la Biennale.
Au pied de la scène, la foule est électrisée, chauffée à blanc et n’attend plus que l’arrivée de son maître pour exploser : Omar Souleyman, le roi de l’électro chaâbi.
Un chanteur de mariage
Rien ne destinait pourtant ce Syrien de 53 ans à vivre l’incroyable carrière qu’il connaît aujourd’hui sur la scène internationale.
Originaire du village de Tall Tamr, dans le gouvernorat de Hassaké, au nord-est de la Syrie, Omar Souleyman se construit, au milieu des années 1990, une solide réputation d’animateur de mariages. Il y chante l’amour sur fond de dabkeh revisitée à grands coups de synthétiseur.
Un style de danse folklorique envoûtant, qui va bientôt dépasser les frontières de cette région reculée du Levant.
La musique d’Omar Souleyman s’exporte hors du Moyen-Orient dès 2007, grâce au coup de génie de Mark Gergis, un musicien californien baroudeur, qui l’invite à sortir une compilation sur son label.
S’ensuivent une première tournée à l’étranger, le tube « Warni Warni » aux 50 millions de vues et quatre albums studio, dont le dernier, To Syria, With Love, est sorti en juin 2017.
Qamis et keffieh
Contraint de s’exiler en Turquie en 2013, Omar Souleyman n’en oublie pas pour autant sa terre natale, ravagée par la guerre civile depuis près de huit ans.
« Il donne l’impression de vouloir faire son boulot pénard, en restant à distance des paillettes et des médias »
- Elsa Plaza, programmatrice
« Je souhaiterais avoir une pensée pour la Syrie et pour tous les Syriens, ceux qui sont présents ce soir dans la salle, les réfugiés et ceux qui sont restés au pays », déclare-t-il avec émotion à l’issue du concert.
New York, Sydney, Oslo, Berlin, Istanbul, Beyrouth… Omar Souleyman fait aujourd’hui danser les fêtards du monde entier.
« C’est une expérience de live assez dingue à vivre. Il y a quelque chose de généreux et il arrive à réunir des personnes très différentes », décrit Elsa Plaza, programmatrice au Café de la Biennale.
« J’écoutais ses cassettes quand j’étais enfant. Je ne savais même pas qu’il était célèbre en Europe », s’étonne Turki, un jeune spectateur saoudien.
Une notoriété grandissante qui n’a toutefois pas eu d’incidence sur son style vestimentaire. À la manière des Bédouins, c’est affublé d’un qamis traditionnel et d’un keffieh rouge et blanc vissé sur le crâne que la nouvelle étoile de l’électro oriental assure le show, sobrement accompagné de son claviériste.
Sa gestuelle non plus n’a pas bougé d’un iota. Pas de performance scénique grandiloquente, mais des applaudissements contenus, ponctués de « shukran » (merci) polis.
« Il donne l’impression de vouloir faire son boulot pénard, en restant à distance des paillettes et des médias », complète la programmatrice strasbourgeoise. Et c’est sans doute cette timidité adolescente, doublée d’une énergie contagieuse, qui a réussi à conquérir le cœur du public.
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