Pour l’Égypte, le choix est clair : la démocratie ou le chaos sous Sissi
Ce 25 janvier, les Égyptiens célèbrent le 9e anniversaire de la révolution. Les appels aux manifestations pour marquer l’occasion se sont multipliés.
Depuis des mois, l’opposition égyptienne s’efforce de trouver un consensus sur ce à quoi pourrait ressembler la période post-Sissi. Les valeurs du Printemps arabe forment la base de ce cadre, lequel permettrait à toutes les entités politiques de coexister.
Neuf ans après la révolution, l’Égypte est devenue l’un des régimes les plus répressifs au monde. La colère populaire a atteint un point de non-retour, comme l’ont montré les récentes manifestations.
Dans ce contexte, il a été décevant de constater que le Premier ministre britannique Boris Johnson a déroulé le tapis rouge cette semaine pour le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi au sommet Royaume-Uni – Afrique sur les investissements.
Esprit du Printemps arabe
Une semaine après la mort de Moustafa Kassem (citoyen américain né en Égypte) dans une prison du Caire, le « dictateur préféré » du président américain Donald Trump a pris la parole pour saluer la soi-disant performance économique et la stabilité politique de l’Égypte.
Toutefois, avec plus de 60 000 prisonniers politiques, notamment plus de 300 en grève de la faim, la répression a atteint des niveaux sans précédent en Égypte. Traiter Sissi avec tant d’égards est une faute morale et un non-sens stratégique.
Le Printemps arabe, qui secoue la région depuis 2011, a offert le choix de faire de la dignité humaine, de la liberté et de l’État de droit les indicateurs fondamentaux de ce qui est bien ou mal, et non la religion, la nationalité ou encore le milieu social ou politique.
Que nous soyons centristes, libéraux, gauchistes ou islamistes n’est d’aucune importance comparé aux valeurs qui nous unissent : démocratie, dignité humaine, justice, égalité et liberté
C’est dans cet esprit qu’a été créé le groupe d’action nationale égyptien par des membres clés de l’opposition égyptienne le mois dernier. Nous venons de différentes formations politiques mais nous avons mis nos différences de côté pour fonder ce groupe sans précédent, dont j’ai l’honneur d’être le porte-parole.
Que nous soyons centristes, libéraux, gauchistes ou islamistes n’est d’aucune importance comparé aux valeurs qui nous unissent : démocratie, dignité humaine, justice, égalité et liberté. Après plus de six ans du régime cruel de Sissi, l’esprit du Printemps arabe ne nous a jamais quittés. Il n’a fait que gagner en maturité et nous sommes plus déterminés que jamais.
Sissi : faible et effrayé
En septembre dernier, malgré la répression exercée par l’État, des milliers d’Égyptiens sont descendus dans la rue à travers le pays après une série de vidéos révélant l’étendue de la corruption au sommet du régime, notamment parmi l’armée autrefois tenue en haute estime. Les manifestations ont souligné la faiblesse et la peur régnant au sein du régime de Sissi. La répression violente, notamment l’arrestation arbitraire de plus de 4 000 personnes, n’ont fait qu’attiser la colère populaire.
Tous les ingrédients d’un nouveau soulèvement sont là. La pauvreté augmente, six Égyptiens sur dix sont pauvres ou vulnérables selon la Banque mondiale. Dans le même temps, l’opacité et les pots-de-vin semblent être les seuls mécanismes de gouvernance, et une part significative de l’économie appartient à l’armée.
L’Égypte est également confrontée à deux menaces existentielles émanant des pays voisins.
En Libye, les troupes égyptiennes se sont transformées en mercenaires véreux, soutenant un groupe putschiste contre le gouvernement reconnu par la communauté internationale. Cette honteuse guerre par procuration est désormais en pleine escalade et constitue un péril majeur à notre frontière occidentale.
De son côté, le barrage sur le Nil de l’Éthiopie menace les vies de millions d’Égyptiens qui dépendent des eaux du fleuve. Bien qu’il ait renoncé aux droits souverains de l’Égypte sur les eaux du Nil en 2015, désormais Sissi panique. Il a menacé l’Europe de cesser de contrôler le flux de migrants subsahariens, mais les Européens ont tout intérêt à se demander ce que feraient les quelque 100 millions d’Égyptiens si leur propre État s’effondrait.
Transition démocratique
L’Égypte ne va pas bien et le mécontentement populaire monte. Le groupe d’action nationale égyptien vise à éviter le chaos qui surviendra probablement si Sissi ne s’en va pas. Les rangs des dissidents et des défenseurs des droits de l’homme qui ont canalisé la révolution de 2011 ont été rompus par les arrestations massives depuis 2013.
C’est pourquoi nous avons élaboré un document de consensus entre de nombreuses personnalités politiques le mois dernier, définissant notre vision commune de l’ère post-dictature, comprenant notamment une période de transition.
Un projet national global et collaboratif est élaboré pour traiter les questions les plus urgentes en matière d’économie, restructurant les institutions étatiques et limitant le rôle de l’armée.
Je n’ai aucun doute sur le fait que Sissi et consort tomberont, et dans l’opposition, nous nous préparons à ce jour. Le Printemps arabe n’est pas terminé. Ce qui est moins certain, c’est le temps que cela prendra aux pays occidentaux pour réaliser le manque de clairvoyance dont ils ont fait preuve en laissant tomber le peuple égyptien.
La « politique de l’homme fort » n’a fait qu’engendrer plus d’instabilité et de soutien aux extrémistes dans la région.
Ces coûts pourraient être bien plus élevés que ce que rapportent les contrats de vente d’armes. Une véritable transition démocratique bénéficiera à tout le monde, surtout en comparaison du chaos qui surviendra si le règne de Sissi perdure.
- Ayman Nour est un homme politique et ancien député égyptien. Il est le fondateur et président du parti El Ghad.
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Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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