Dôme de fer : ce qu’il faut savoir sur le système antimissile israélien
Le système antimissile israélien Dôme de fer s’attire depuis plus d’une semaine les louanges des médias occidentaux, alors que l’armée israélienne bombarde Gaza et utilise ce système pour abattre les roquettes tirées par des groupes armés palestiniens en direction du territoire israélien.
Ce mercredi matin, on recensait au moins 3 700 roquettes tirées sur Israël par les groupes armés palestiniens depuis le début du conflit la semaine dernière. Il s’agit en grande partie de systèmes non guidés : de nombreuses roquettes qui ne sont pas interceptées par le Dôme de fer s’écrasent dans des zones dégagées, loin des structures urbaines.
Ces roquettes ont, néanmoins, fait à ce jour douze victimes en Israël. À l’exception d’un soldat tué par un missile antichar près de la frontière israélienne avec Gaza, tous les décès seraient dus à des roquettes.
Les défenseurs du système antimissile soutiennent que sans lui, le nombre de morts dans le camp israélien serait bien plus élevé.
Middle East Eye examine ci-dessous le fonctionnement du Dôme de fer et répond à quelques questions sur le système principal de défense aérienne d’Israël.
Comment fonctionne le Dôme de fer ?
Le Dôme de fer est un système de défense antimissile qui emploie des missiles antimissiles et la technologie radar.
Pour résumer, le radar détecte un objet entrant, tel qu’une roquette ; cette information est traitée et transmise à une batterie de missiles qui exploite les informations relatives à la vitesse et à la trajectoire de l’objet pour se diriger sur celui-ci et l’intercepter en faisant exploser sa charge à proximité de l’objet afin de le détruire.
D’autres variables, telles que les conditions atmosphériques et météorologiques, sont également prises en compte avant le lancement des missiles.
En ce sens, le Dôme de fer est similaire à d’autres systèmes antimissiles, tels que le système Patriot de fabrication américaine et le S-400 russe. Ils différent par leur portée et le type d’objets qu’ils peuvent abattre. Alors que le Dôme de fer peut détecter des menaces entrantes à une distance allant de 4 à 70 km, la portée du S-400 peut atteindre 400 km, mais sa portée initiale est beaucoup plus élevée, puisqu’elle se situe à 40 km.
Le Dôme de fer est donc spécialisé dans les menaces à plus courte portée, tant sur terre qu’en mer.
Qui fabrique le Dôme de fer ?
Le système antimissile a été mis au point par le fabricant d’armes israélien Rafael, qui présente le Dôme de fer comme un « intercepteur rentable » doté d’une « capacité tout temps ».
Rafael est l’un des principaux fabricants d’armes israéliens et travaille en étroite collaboration avec le ministère israélien de la Défense. La société produit d’autres systèmes militaires, tels que des outils de surveillance et des armes antichars.
Bien que le système soit développé en Israël, les États-Unis ont été l’un des principaux soutiens du programme Dôme de fer. En 2011, le président américain de l’époque Barack Obama a fourni à Israël plus de 200 millions de dollars en vue de la production de batteries pour le système.
Quel est le taux d’interception du Dôme de fer ?
Alors qu’Israël affirme que le taux d’interception du Dôme de fer est d’environ 90 %, certains experts estiment que ce chiffre est plus proche de 80 %. Si l’on prend comme référence les 3 700 roquettes évoquées plus tôt, cela signifie que 740 roquettes passent le système de défense.
À ce stade, la qualité de la roquette et la précision de la visée entrent en ligne de compte. Dans la mesure où de nombreuses roquettes tirées depuis Gaza ne sont pas guidées, la plupart d’entre elles ne causent que des dommages minimes, mais comme le confirment les victimes côté israélien, ce n’est pas toujours le cas.
Cependant, certains chercheurs doutent de l’honnêteté d’Israël quant à ses données sur l’efficacité du Dôme de fer au combat.
À la suite de la guerre de Gaza de 2014, Theodore Postol, scientifique au Massachusetts Institute of Technology (MIT), a suggéré que le taux réel d’interceptions réussies du Dôme de fer pouvait ne pas dépasser les 5 %. Theodore Postol a expliqué que dans la plupart des cas présentés comme des interceptions réussies, les missiles Tamir du système avaient touché les objets entrants sans toutefois détruire la charge qu’ils transportaient.
L’universitaire a précisé que le mérite revenait davantage aux systèmes d’alerte avancés qui prévenaient les Israéliens afin qu’ils se mettent aux abris.
L’exploitation du système comporte-t-elle des risques ?
D’anciens soldats israéliens ont intenté un recours collectif contre le ministère israélien de la Défense en avril 2021, affirmant avoir contracté un cancer dans le cadre de leur service dans l’exploitation du Dôme de fer.
Donnant au système le surnom de « grille-pain », les soldats ont comparé l’exposition aux radars du système à l’exposition aux radiations à l’intérieur d’un micro-ondes.
Jonathan Haimovich, ancien opérateur du Dôme de fer, a notamment déclaré : « Quand on est près d’un radar, on sent littéralement son corps bouillir de l’intérieur… Si on essaie d’imaginer ce qui arrive aux aliments dans un micro-ondes, c’est comme ça. On sent la chaleur arriver par vagues. »
Au moins dix soldats âgés de 20 à 40 ans attribuent leur cancer à leur service au sein du Dôme de fer.
Les responsables israéliens rejettent tout lien entre le système et les cas de cancer.
Le Dôme de fer est-il utilisé ailleurs ?
Un certain nombre de nouveaux alliés d’Israël au Moyen-Orient et au-delà sont intéressés par l’intégration du Dôme de fer à leurs propres réseaux de défense aérienne.
Washington a fait l’acquisition d’un nombre limité de systèmes destinés à être utilisés sur le territoire américain, tandis que l’Azerbaïdjan a annoncé son intention d’acheter le système en 2016 puis en 2021 – on ignore toutefois si des transferts d’armement ont effectivement eu lieu. Bakou a récemment été impliqué dans un conflit avec l’Arménie portant sur la région du Haut-Karabakh, au cours duquel des armes israéliennes ont été utilisées.
En 2017, Middle East Eye a rapporté que les Émirats arabes unis envisageaient d’acheter le système, après avoir observé son déploiement contre des attaques de roquettes lancées depuis Gaza.
« Je serais intéressé d’entendre comment il [le Dôme de fer] s’en est sorti à Gaza récemment. J’ai lu les commentaires dans la presse sur sa performance, mais cela m’intéresserait d’en apprendre plus », avait déclaré dans un e-mail divulgué l’ambassadeur des Émirats arabes unis aux États-Unis, Yousef al-Otaiba, en référence au système antimissile.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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