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Sufiyan Barhoumi, un détenu de Guantánamo, rapatrié en Algérie

Selon son avocate, des « problèmes bureaucratiques inexpliqués » ont bloqué la libération de Barhoumi dans les derniers mois de l’administration Obama
Sufiyan Barhoumi avait initialement été inculpé en 2005 pour complot lié au terrorisme (famille Barhoumi)
Sufiyan Barhoumi avait initialement été inculpé en 2005 pour complot lié au terrorisme (famille Barhoumi)

Un détenu algérien de la prison militaire de Guantánamo, Sufiyan Barhoumi, soupçonné d’avoir été un instructeur dans un camp d’al-Qaïda, a été rapatrié en Algérie, a annoncé samedi le ministère américain de la Défense.

« Le 4 février 2022, le ministre de la Défense, [Lloyd] Austin, a notifié le Congrès de son intention de rapatrier M. Barhoumi en Algérie et, en lien avec nos partenaires algériens, nous avons rempli les conditions requises pour un transfert sécurisé », a déclaré le Pentagone dans un communiqué.

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« Les États-Unis apprécient la volonté de l’Algérie et d’autres partenaires de soutenir les efforts américains persistants pour réduire » la « population carcérale et à terme fermer la prison de Guantánamo », a-t-il poursuivi.

Ce détenu algérien avait initialement été inculpé en 2005 pour « complot lié au terrorisme ». Il était accusé d’avoir été instructeur dans un camp d’al-Qaïda puis d’avoir formé deux Saoudiens à la fabrication des détonateurs à distance.

Mais dès 2008, le Pentagone avait abandonné les accusations contre lui. En 2016, la commission de révision de Guantánamo avait déterminé que sa détention n’était « plus nécessaire » pour protéger la sécurité des États-Unis d’une « menace sérieuse ».

Sa famille lui avait même trouvé une épouse

Malgré cela, rappelle le Washington Post, l’Algérien est resté emprisonné pendant toute la durée de l’administration du président Donald Trump, qui a en grande partie gelé les transferts depuis Guantánamo. Trump ne souhaitait pas fermer la prison militaire et avait à un moment donné suggéré qu’elle pourrait être utilisée pour héberger de futurs suspects dans des affaires de « terrorisme ».

« Des problèmes bureaucratiques inexpliqués ont bloqué la libération de Barhoumi dans les derniers mois de l’administration Obama », selon son avocat. « La famille de Barhoumi avait anticipé son retour il y a six ans et lui avait même trouvé une épouse », rappellent des médias américains.

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Mais lorsque Trump a été élu, son administration a interrompu les transferts. L’élection de Biden a offert une nouvelle fenêtre pour la libération de Barhoumi.

Shayana Kadidal, avocate principale au Centre pour les droits constitutionnels, qui rendait visite à Barhoumi à Guantánamo depuis douze ans s’est félicité après cette libération.

« Je suis ravie », a déclaré l’avocate à Fox News samedi. « Je le connais et je connais sa famille. Ce sont tous de bonnes personnes. Souvent, vous avez peur de ce qui se passera après leur libération […] Avec lui, je n’ai tout simplement pas ce genre d’inquiétude. Je sais qu’il va atterrir sur ses pieds et qu’il va avoir une belle vie. »

« Pas de rancune contre l’Amérique »

L’avocate, qui a représenté de nombreux autres détenus de Guantánamo, a également déclaré à Fox News que Barhoumi était le premier à avoir reçu une lettre de recommandation d’un ancien gardien à la commission d’examen.

« Il parle anglais et s’est forgé une réputation de médiateur et de pacificateur dans le centre de détention », a déclaré Shayana Kadidal.

« Barhoumi a perdu sa main gauche dans un accident de mine terrestre il y a deux décennies, et pense que c’est la raison pour laquelle l’armée l’a gardé à Guantánamo pendant si longtemps, parce qu’ils ont supposé qu’il l’avait fait exploser alors qu’il s’entraînait à fabriquer des bombes », selon son avocat.

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« Il a souvent déclaré qu’il n’avait pas de rancune contre l’Amérique malgré ses années de détention », a ajouté Shayana Kadidal.

En tout, 37 détenus sont encore présents à Guantánamo, après ce rapatriement qui suit celui, début mars d’un détenu saoudien vers son pays. Parmi eux, dix-huit sont également éligibles à un transfert, sept éligibles à un examen de leur dossier par la commission de révision et dix autres, dont le cerveau présumé des attentats de 2001, Khalid Sheikh Mohammed, dit « KSM », sont en attente de jugement par une commission militaire.

Des experts indépendants mandatés par les Nations unies ont enjoint en janvier les États-Unis de fermer leur prison militaire de Guantánamo, site de « violations incessantes des droits de l’homme ».

Le gouvernement américain s’est engagé à fermer, à terme, le tristement célèbre centre de détention, ouvert après les attentats du 11 septembre 2001 dans le cadre de « la guerre contre le terrorisme ».

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