Un nouveau plan de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations en France
La Première ministre française Elisabeth Borne a présenté lundi un plan de lutte contre le racisme, l’antisémitisme, l’anti-tsiganisme et les discriminations liées à l’origine, visant notamment à rendre moins vulnérable la jeunesse aux messages haineux.
« C’est en faisant savoir que l’on empêche l’Histoire de bégayer », a fait valoir la Première ministre Borne, dont le père de confession juive a été déporté puis a mis fin à ses jours quand sa fille avait 11 ans.
Durant sa scolarité, chaque élève devra ainsi participer à la « visite d’un lieu historique ou mémoriel en lien avec le racisme, l’antisémitisme ou l’anti-tsiganisme », car « c’est dès l’enfance que des stéréotypes peuvent s’installer », a-t-elle souligné.
« C’est en faisant savoir que l’on empêche l’Histoire de bégayer »
- Elisabeth Borne, Première ministre
« C’est dans notre jeunesse que certaines théories du complot foisonnent. C’est aussi sur nos jeunes que les messages haineux des réseaux sociaux ont le plus d’effet », a insisté la cheffe du gouvernement français.
Le nouveau plan 2023-2026 présenté lundi prévoit une série de mesures qui touchent différents secteurs, de l’éducation à l’emploi en passant par la justice ou le sport.
Il vise à systématiser dans les entreprises les tests sur les discriminations à l’emploi et à « élaborer des outils » avec les plateformes numériques et les influenceurs. Il portera aussi sur l’accès au logement pour « mettre en avant les bonnes pratiques, et dénoncer les mauvaises ».
Un code de bonne conduite pour les jeux vidéo et l’e-sport va aussi être mis en place. Des dispositifs de signalements pour tous ceux qui sont victimes de propos haineux dans les transports sont prévus d’ici à mars.
Un musée à la mémoire des gens du voyage
Elisabeth Borne a promis une « fermeté totale dans [la] réponse pénale », en permettant « l’émission de mandats d’arrêt » contre les personnes qui « dévoient la liberté d’expression à des fins racistes ou antisémites ». « Il n’y aura pas d’impunité pour la haine », a-t-elle assuré.
Les peines seront aussi aggravées en cas d’expression raciste ou antisémite « même non publique » pour les personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public, a-t-elle ajouté.
Le plan doit permettre de « mieux mesurer » ces phénomènes, « de mieux éduquer et former », de « mieux sanctionner » les auteurs et de « mieux accompagner les victimes », a résumé la Première ministre.
Parmi les mesures, Elisabeth Borne a annoncé la création sur le site d’un ancien camp de concentration dans l’ouest de la France d’un musée à la mémoire des gens du voyage internés pendant la Seconde Guerre mondiale.
« Cette communauté a besoin que cette histoire-là rentre dans l’Histoire de France », a salué Dominique Raimbourg, président de la Commission nationale consultative des gens du voyage.
Le président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France ) Yonathan Arfi s’est félicité qu’une visite mémorielle soit proposée à chaque jeune dans sa scolarité, tandis que le président de l’ONG SOS racisme, Dominique Sopo, a qualifié de « positif » le fait que « pour la première fois, un plan intègre la question de la discrimination raciale ».
Un autre plan contre les discriminations liées à l’orientation sexuelle devrait être présenté en juin par le gouvernement français.
L’islamophobie oubliée dans le plan
Le parti d’extrême gauche Lutte ouvrière a réagi à l’annonce de ce plan en considérant que « les déclarations d’intention se dissolvent immédiatement dans la démagogie contre les étrangers qui est l’ordinaire du gouvernement, des sorties [du ministre de l’Intérieur Gérald] Darmanin contre le droit du sol à Mayotte, aux restrictions d’accès à la nationalité et aux expulsions en hausse programmées dans la nouvelle loi sur l'immigration ».
Le site d’information Médiapart note, pour sa part, que « le gouvernement n’a à aucun moment évoqué l’islamophobie qui sévit dans notre pays. Une lacune récurrente dans le discours du pouvoir depuis plusieurs années ».
Par ailleurs, le même média explique que « le plan gouvernemental risque en outre de se fracasser sur le mur de la faisabilité ». Car « plusieurs des dispositions promises lundi relèvent du champ législatif et doivent être adoptées par le Parlement pour entrer en vigueur. Une subtilité loin d’être anodine, alors que le camp présidentiel n’a pas de majorité absolue à l’Assemblée nationale et que le moindre vote de cette mandature relève pour l’exécutif d’une épreuve de force ».
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