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France : après le Fonds Marianne, une autre initiative de l’État pour lutter contre la radicalisation démontée par la Cour des comptes

C’est au tour du Comité interministériel de la prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) de se faire épingler pour des dysfonctionnements touchant notamment son organisation et la gestion de ses fonds
Une photographie prise le 16 octobre 2023 montre un portrait du professeur de français assassiné Samuel Paty lors d’une cérémonie d’hommage à l’école du Bois d’Aulne à Conflans-Sainte-Honorine, près de Paris (AFP/Bertrand Guay)
Une photographie prise le 16 octobre 2023 montre un portrait du professeur de français assassiné Samuel Paty lors d’une cérémonie d’hommage à l’école du Bois d’Aulne à Conflans-Sainte-Honorine, près de Paris (AFP/Bertrand Guay)
Par MEE

De « graves dysfonctionnements ». Dans un audit, rendu public lundi 4 mars, la Cour des comptes, présidée par Pierre Moscovici, a pointé une série d’anomalies dans le fonctionnement du Comité interministériel de la prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) et ordonné une « remise en ordre rapide ».

L’instance, créée en 2006, placée sous l’égide de Matignon et rattachée au ministère de l’Intérieur, est composée d’une équipe interministérielle d’une soixantaine de personnes et dirigée par un secrétaire général (Étienne Apaire, depuis août 2023).

Elle devait à l’origine mettre en œuvre la politique de prévention de la délinquance en France. Au fil du temps, ce comité a vu ses missions se diversifier : elle doit aujourd’hui « œuvrer à la lutte contre le « séparatisme », la prévention de la radicalisation et de la délinquance, le déploiement d’un contre-discours républicain, en ligne et hors ligne, la protection des personnes vulnérables et la prise en charge des personnes signalées ».

Le rapport de la Cour des comptes, qui a étudié l’activité du comité entre 2018 et 2022, énumère une série d’anomalies dont l’Inspection générale de l’administration (IGA) s’était déjà alarmée en juin et juillet 2023.

Il note d’abord que le statut du comité est « insuffisant et de moins en moins adapté » au regard de « son périmètre d’intervention de plus en plus large ».

Il relève ensuite que « l’organigramme en place manque de clarté », soulevant des incohérences dans les liens hiérarchiques et des déséquilibres dans les dotations de postes des services.

 

De « graves insuffisances dans la gestion des fonds » sont aussi soulignées. En 2022, le comité avait été doté de 75 millions d’euros. « L’examen des dossiers 2020, 2021 et 2022 relevant de l’enveloppe centrale a montré un niveau de maîtrise insuffisant des procédures d’instruction, d’exécution des crédits et de contrôle des bénéficiaires », est-il développé dans l’audit.

Le précédent du Fonds Marianne

« Ces carences sont apparues de manière encore plus manifeste à l’occasion des appels à projet nationaux lancés en 2021, le premier destiné à la ‘’lutte contre les dérives sectaires’’, le second, le ‘’Fonds Marianne’’, dont le lancement et l’arbitrage ont été mal préparés et mis en œuvre dans des conditions ne permettant pas une instruction satisfaisante. »

L’audit de la Cour des comptes relève plusieurs anomalies dans le renouvellement des conventions. En 2021, par exemple, une association n’a produit aucun compte-rendu financier pour cinq subventions octroyées d’un montant total 134 779 euros. Pourtant, le CIPDR a accordé à l’association un renouvellement de subvention en 2022 pour plusieurs projets pour un montant total de 150 000 euros.

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« Ces renouvellements irréguliers concernent également le Fonds Marianne. À l’occasion de cet appel à projet, trois associations, qui avaient bénéficié de subventions en 2020, ont bénéficié d’un renouvellement de subvention en 2021. Or, lors de la précédente subvention, les dossiers de ces trois associations présentaient des anomalies, comme l’absence de production des documents obligatoires à remettre dans les six mois de l’attribution de la subvention », précise le rapport.

Trois ans après sa création en 2021, le Fonds Marianne, mis en place par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée chargée de la Citoyenneté dans le gouvernement Jean Castex, en réponse à l’assassinat de Samuel Paty, pour s’attaquer au « séparatisme », notamment religieux, s’était retrouvé au cœur de deux enquêtes, judiciaire et parlementaire, pour soupçons de détournement de fonds, accusations de favoritisme ou encore contenus controversés.

Au printemps de l’année dernière, une enquête conjointe de deux médias français, France 2 et le magazine Marianne, avait décrit une gestion opaque, une liste de bénéficiaires tenue secrète où figurait en première place une association méconnue – l’Union des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire – qui aurait utilisé 355 000 euros de subventions pour des publications très peu suivies et salarier deux de ses ex-dirigeants.

Alors que le président de la Cour des comptes a brandi après la publication de l’audit sur le CIPDR la menace d’un éventuel jugement et d’une possible condamnation, le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé qu’une réunion du CIPDR était prévue « à la fin du premier semestre 2024 ».

Le chef du gouvernement aurait en tête de transformer la structure en « une délégation interministérielle », promettant « d’améliorer le suivi des programmes et des financements ».

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