Les Houthis reconnaissent avoir subi des revers dans le sud du Yémen
AL-MUKALLA, Yémen – Les dirigeants du mouvement rebelle houthi qui combattent les forces pro-gouvernementales dans le sud du Yémen ont admis que l'intervention de la coalition internationale menée par l'Arabie saoudite les avait contraints à battre en retraite.
Après des mois jalonnés d'échecs, les forces menées par les Saoudiens, loyales au président yéménite exilé Abd Rabo Mansour Hadi, ont pris leur revanche sur les milices houthies ces dernières semaines en reprenant le contrôle de la ville portuaire stratégique d'Aden et d'une base militaire dans le quartier de Khour Maksar.
Cherchant à justifier la perte d'Aden lors d'un discours télévisé au début du mois, le chef houthi Abdul-Malik al-Houthi a affirmé que ses troupes avaient été affaiblies car l'attaque était intervenue pendant les vacances de l'Aïd, alors que les combattants étaient en famille.
« Une certaine clémence a régné sur Aden au cours des derniers jours du Ramadan et de la période précédant l'Aïd, durant laquelle certains membres des comités populaires et de l'armée ont pris des congés pour rendre visite à leurs familles », a-t-il déclaré.
Il a également attribué les revers essuyés à Aden à l'intensité des raids aériens ayant frappé ses forces et aux « efforts collectifs » de l'Arabie saoudite, des États-Unis, des EAU et d'Israël. Il a toutefois précisé que ces attaques n'avaient en rien émoussé la « ténacité » des Yéménites et assuré qu'ils ne s'inclineraient pas.
Les houthis avaient acquis une influence sans précédent en septembre en envahissant des organismes gouvernementaux majeurs, dont le palais présidentiel, dans la capitale yéménite Sanaa, avant de s'emparer du contrôle effectif de plusieurs provinces du sud.
Le président Hadi et d'autres membres du gouvernement avaient alors fui à Aden puis avaient été contraints de s'exiler en Arabie saoudite en février.
Cependant, les houthis ont dû endurer pendant des semaines les attaques de forces lourdement armées, appuyées par des frappes aériennes agressives, qui les ont chassés des gouvernorats rebelles d'Aden, d'Ad Dali' et de Lahij, dans le sud du pays, où ils ont également perdu le contrôle de la base militaire majeure d'al-Anad.
Mohammed al-Bukhiti, un porte-parole du mouvement, a indiqué à Middle East Eye que l'équipement des houthis permettait uniquement de combattre efficacement les membres légèrement armés d'al-Qaïda, de l'État islamique ou des milices pro-Hadi, et non les forces de la coalition « lourdement armées ».
« Ils ne sont pas équipés pour faire face à une invasion extérieure. Il est donc logique qu'ils aient quitté leurs positions avant de riposter », a-t-il expliqué.
Toutefois, même s'ils affirment être en train de rassembler leurs forces afin de riposter, les houthis continuent à perdre le contrôle du sud.
Dimanche, un officier militaire anti-houthis a indiqué à MEE que ses troupes avaient repris la majeure partie du gouvernorat d'Abyan au sud du pays.
Les combats se sont désormais déplacés vers la périphérie de la ville de Lawdar, dernière zone contrôlée par les rebelles dans ce gouvernorat.
L'« invasion » saoudienne
Mohammed al-Bukhiti qualifie d'« invasion » les rapports faisant état de l'arrivée de soldats originaires d'Arabie saoudite, des EAU et d'Égypte sur le sol yéménite, et estime que celle-ci poussera les Yéménites à rejoindre les comités populaires houthis afin de les chasser hors du pays.
Jeudi, un porte-parole du ministère de la Défense yéménite a informé MEE que les forces terrestres de la coalition s'étaient jetées dans la mêlée, et ce malgré le fait qu'un haut responsable militaire égyptien ait par la suite nié toute implication de l'Égypte.
Toutefois, le général de division Ahmed Saif al-Yafae, commandant de la 4e région militaire d'Aden ayant mené des combats contre les houthis dans le sud du pays, a expliqué que l'avancée des forces pro-Hadi était due au courage des résistants face à la domination des houthis.
« La population n'a eu d'autre choix que d'affronter les houthis, qui attaquaient leurs maisons et les forçaient à fuir », a-t-il indiqué à MEE lors d'une conversation téléphonique depuis Aden.
Il reconnaît également l’aide fournie par les forces aériennes de la coalition, qui ont permis de renverser la situation.
« Les frappes aériennes ont paralysé la puissance de feu des houthis, qui se compose de canons et de roquettes. Elles ont également empêché les houthis de bombarder nos troupes », a-t-il précisé.
Depuis le début des opérations militaires dans le sud, de nombreux spécialistes avaient prédit une opposition armée à la présence du mouvement chiite des houthis puisque le sud est majoritairement sunnite et qu'il s'agit d'une place forte des séparatistes, partisans d'un éclatement du pays.
« Il est vrai que nous n'avons pas autant de soutiens dans le sud que dans certaines zones du nord, mais nous nous sommes rendus dans le sud pour assurer notre propre défense. Lorsque le président Hadi s'est enfui à Aden, il a menacé de hisser le drapeau yéménite à Sa'dah [la place forte des houthis], dans les montagnes de Marran », indique Mohammed al-Bukhiti.
Ce dernier a accusé le président Hadi d'avoir trahi son pays en demandant une intervention étrangère et de conspirer avec al-Qaïda et l'État islamique. Tandis que le Yémen est depuis longtemps une place forte d'al-Qaïda dans la péninsule arabique, l'État islamique a revendiqué la responsabilité de deux attentats suicides contre des mosquées de la capitale yéménite qui ont entraîné la mort de dizaines de personnes.
« Nous avions également pour objectif de combattre les entités d'al-Qaïda et de l'État islamique au sud qui sont responsables des explosions dans les mosquées de Sanaa », a-t-il ajouté.
Traduction de l’anglais (original) par VECTranslation.
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