Trump lance un défi à l’Autorité palestinienne
Le président américain Donald Trump a provoqué des ondes de choc internationales mercredi en annonçant qu’il n’était pas attaché à une solution à deux États dans le conflit israélo-palestinien. Cependant, ce choc repose en grande partie sur deux suppositions erronées.
L’une d’elles est qu’un État palestinien viable est toujours possible lorsque son territoire est criblé de colonies israéliennes illégales accueillant plusieurs centaines de milliers d’occupants et dont la taille et la population augmentent rapidement.
L’absence d’engagement de Trump vis-à-vis d’une solution à deux États ne constitue pas un motif de réjouissance chez ceux qui préconisent un État binational avec égalité pour les deux peuples
En moins de quinze jours après l’investiture de Trump le 20 janvier, Israël a approuvé la construction de plus de 6 000 logements destinés aux colons ainsi qu’une nouvelle colonie, et a adopté une loi rétroactive légalisant 4 000 logements destinés aux colons construits sur des terres privées palestiniennes. Pendant ce temps, la Maison-Blanche a déclaré que Trump ne voyait pas les colonies comme un « obstacle à la paix ».
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L’autre supposition erronée est que les précédentes administrations américaines étaient attachées à la solution à deux États. Celles-ci et les autres gouvernements du monde entier n’y apportaient qu’un soutien de façade, accordant un soutien militaire, économique et diplomatique sans faille à Israël malgré ses efforts implacables pour rayer littéralement la Palestine de la carte. Le prédécesseur de Trump, Barack Obama, un personnage haï en Israël en raison de son opposition à l’expansion des colonies, n’était en rien différent à cet égard.
Accrochée à une illusion
En un mot, la solution à deux États était un grand mirage – pire, une tromperie – tout comme le « processus de paix » construit autour d’elle. Toutefois, l’absence d’engagement de Trump vis-à-vis d’une solution à deux États ne constitue pas un motif de réjouissance chez ceux qui préconisent un État binational avec égalité pour les deux peuples.
La version israélienne d’une solution à un État envisage un contrôle permanent sur les Palestiniens dans un système d’apartheid qui consacre la suprématie juive. En effet, l’actuel gouvernement d’Israël regorge de personnalités, notamment le Premier ministre Benyamin Netanyahou, qui rejettent un quelconque État palestinien.
Trump – qui a déclaré : « il n’existe personne de plus pro-israélien que moi », et dont le candidat au poste d’ambassadeur en Israël s’oppose également à un État palestinien – ne s’opposera certainement pas à la situation. Il a simplement abandonné le prétexte du cadre des deux États.
L’Autorité palestinienne s’accroche cependant encore aveuglément à cette illusion, réaffirmant son engagement envers une solution à deux États, même après la conférence de presse de Trump et Netanyahou.
Près d’un quart de siècle de négociations ont vu l’occupation et la colonisation d’Israël se renforcer. Pendant ce temps, la situation régionale n’a jamais semblé plus désespérée pour les Palestiniens.
Rien à perdre
Une grande partie du monde arabe est malheureusement divisée et instable après le Printemps arabe. La Turquie s’est réconciliée avec Israël. L’Égypte a renoué des relations étroites avec lui sous son président, Abdel Fattah al-Sissi. Les États du Golfe s’inquiètent des ambitions régionales de l’Iran et la faction palestinienne du Hamas a été ostracisée par Téhéran, Damas et le mouvement libanais Hezbollah pour soutenir la révolution syrienne.
Cependant, c’est précisément cette situation désespérée qui donne des options à l’AP, parce que cette dernière n’a rien à perdre. Elle pourrait révoquer la reconnaissance d’Israël, ce qu’elle a menacé de faire si Trump respecte son engagement de transférer l’ambassade américaine à Jérusalem. L’Autorité palestinienne pourrait concrétiser sa menace, énoncée en décembre, de prendre d’autres mesures contre Israël devant la Cour pénale internationale.
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Elle pourrait redynamiser ses efforts pour rejoindre les organisations et traités internationaux et obtenir une plus grande reconnaissance. Des options plus efficaces seraient de soutenir le mouvement de boycott, de désinvestissement et de sanctions (BDS) de plus en plus efficace et de renoncer à la coopération en matière de sécurité avec Israël.
L’Autorité palestinienne pourrait même approuver formellement la solution à un seul État, transformant la cause palestinienne d’une lutte de libération en un mouvement pour les droits civils. Les sondages montrent une augmentation significative de la popularité de l’option à un État parmi les Palestiniens (un sondage réalisé en septembre 2015 montre un soutien majoritaire), et une solide majorité est persuadée qu’une solution à deux États n’est plus possible.
Se redynamiser – ou être dissoute
Si l’Autorité palestinienne s’inquiète des mesures de rétorsion prises par Israël et des réductions de financement des donateurs occidentaux, elle devrait considérer qu’Israël et ses alliés ont un intérêt direct à éviter son effondrement parce que, en conséquence, soit le Hamas comblerait le vide, soit Israël devrait assumer la responsabilité de la population occupée (ce qu’il est légalement obligé de faire de toute façon). Israël est violemment opposé à l’un ou l’autre de ces scénarios.
Si l’Autorité palestinienne s’inquiète des mesures de rétorsion prises par Israël et des réductions de financement des donateurs occidentaux, elle devrait considérer qu’Israël et ses alliés ont un intérêt direct à éviter son effondrement
Cependant, cela ne devrait pas écarter l’option d’une autodissolution, ce que l’AP a déjà menacé de faire. Après tout, elle s’est avérée parfaitement incapable de parvenir à l’autodétermination palestinienne, sa raison d’être. Il vaut donc mieux que l’Autorité palestinienne force Israël à assumer le fardeau de l’occupation plutôt que d’agir comme son sous-traitant.
Malheureusement, l’AP demeure attachée à un cadre vide et préfère les privilèges personnels, les intérêts partisans et l’acceptation internationale aux mesures efficaces pour faire respecter les droits de ses citoyens.
Son président, Mahmoud Abbas, continue de consolider son pouvoir, des années après l’expiration de son mandat, dans le cadre d’une répression de la dissidence.
Il refuse aussi catégoriquement de soutenir le BDS (bien qu’il ait été décrit comme une menace stratégique par Israël et ses alliés) ou de renoncer à la coordination de la sécurité avec Israël, qu’il a qualifiée de « sacrée » alors que la grande majorité des Palestiniens sont opposés à ce que leurs dirigeants coopèrent avec l’occupant.
Ainsi, l’Autorité palestinienne n’est pas seulement incapable de réaliser les aspirations nationales palestiniennes. Fondamentalement, elle ne veut pas le faire.
Si elle est trop irréfléchie, obtuse ou investie pour entretenir un changement nécessaire de son modèle de pensée et stratégique, elle devient inutile et, pire, une partie du problème.
- Sharif Nashashibi est un journaliste et analyste primé spécialiste des affaires arabes. Il collabore régulièrement avec al-Arabiya News, al-Jazeera English, The National et The Middle East Magazine. En 2008, il a reçu une distinction de la part du Conseil international des médias « pour avoir réalisé et contribué à des reportages systématiquement objectifs » sur le Moyen-Orient.
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique éditoriale de Middle East Eye.
Photo : le président palestinien Mahmoud Abbas salue après avoir prononcé un discours lors du deuxième jour du 7e congrès du Fatah en novembre 2016 au siège de l’Autorité palestinienne à Ramallah (AFP).
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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