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À Gaza, la pénurie de médicaments met en danger de mort de nombreux malades du cancer

Non seulement le blocus israélien a sérieusement limité la capacité de Gaza à importer des médicaments, mais Israël rejette également les autorisations de sortie de patients nécessitant un traitement médical immédiat
Un Palestinien atteint d’un cancer reçoit des soins dans un hôpital de Gaza (AFP)

GAZA, Territoires palestiniens occupés – À Gaza, les patients cancéreux ont désespérément besoin d’aide.

Le ministère palestinien de la Santé a tenu une conférence lundi dernier pour demander une assistance urgente pour plusieurs centaines de patients cancéreux dans la bande de Gaza.

Selon des responsables des services de santé, 700 patients de l’hôpital Abdel al-Aziz al-Rantisi, dont 200 enfants, n’ont pas pu recevoir de chimiothérapie lundi dernier en raison d’une grave pénurie de médicaments et de matériel.

La plupart des réserves en médicaments de chimiothérapie de Gaza sont épuisées, selon des responsables palestiniens (MEE/ Hind Khoudary)

« Nos patients sont en danger. Aujourd’hui, les patients sont venus à l’hôpital et nous les avons informés que nous n’avions pas de traitement médical pour eux ; ils sont rentrés chez eux en pleurs », a déclaré Mohamed Abu Salmiya, directeur de l’hôpital.

« Nous sommes dans une situation très dangereuse. Si nous ne trouvons pas de solution, des centaines de patients perdront la vie », a-t-il ajouté.

« Nous sommes dans une situation très dangereuse. Si nous ne trouvons pas de solution, des centaines de patients perdront la vie »

– Mohamed Abu Salmiya, directeur d’hôpital

Des professionnels de la santé ont indiqué à Middle East Eye que les stocks nécessaires aux traitements étaient épuisés dans la majeure partie de l’enclave.

« Nous avons été informés que la majorité des médicaments nécessaires à la prise en charge des patients atteints de cancer étaient épuisés ; il s’agit là d’une grave aggravation de la situation existante », a déclaré le Dr Mahmoud Daher, directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à Gaza.

« La pénurie chronique de médicaments persiste depuis quelques années ; tous les patients cancéreux sont en danger de mort à cause de cette situation », a-t-il ajouté.

« Quatre-vingts pour cent des médicaments utilisés pour la chimiothérapie de 700 personnes ne sont pas disponibles dans le département principal de cancérologie du ministère de la Santé, qui fournit les services médicaux dans la bande de Gaza », a poursuivi Daher.

Un de ces médicaments, le Neupogen, utilisé pour stimuler le système immunitaire du patient, est presque complètement épuisé, a précisé Ashraf al-Qedra, porte-parole du ministère gazaoui de la Santé.

Asmaa Bahnsawi, une patiente cancéreuse, a exprimé sa consternation après avoir appris que les médicaments pour le traitement de son cancer du sein n’étaient pas disponibles. 

« Je suis venue ici aujourd’hui parce que j’ai besoin d’une dose pour ma séance de chimiothérapie, mais le médecin m’a dit qu’il n’y avait pas de dose, ni d’injection. J’ai été surprise, choquée et sans voix », a-t-elle confié à MEE.

« Que va-t-il m’arriver jusqu’à ma prochaine [séance de] chimiothérapie ? Les médecins m’ont dit de prendre des analgésiques, mais si je ne reçois pas ma chimiothérapie d’ici la semaine prochaine, je serai morte »

- Asmaa Bahnsawi, atteinte d’un cancer du sein

Bahnsawi a découvert son cancer du sein en décembre 2017 et a effectué sa première séance de chimiothérapie en mars. Elle a expliqué qu’elle se trouvait depuis deux mois en difficulté après avoir été contrainte d’acheter du Neupogen par ses propres moyens.

« Aujourd’hui, j’ai demandé au médecin quand je pourrais avoir ma nouvelle séance de chimiothérapie, et il m’a répondu : “Je ne peux pas vous répondre” », a-t-elle raconté.

« Que va-t-il m’arriver jusqu’à ma prochaine [séance de] chimiothérapie ? Les médecins m’ont dit de prendre des analgésiques, mais si je ne reçois pas ma chimiothérapie d’ici la semaine prochaine, je serai morte », a-t-elle ajouté.

Impossible de sortir

La commission des affaires civiles de Palestine à Gaza a déclaré à MEE qu’Israël avait renforcé les mesures de sécurité et rejeté les autorisations de sortie des patients nécessitant un traitement médical immédiat.

Mahmoud Ahmad, un avocat de 27 ans atteint d’un ostéosarcome, une forme de cancer osseux, est dans ce cas. Israël a refusé sa demande de sortie pour recevoir un traitement médical et les médecins lui ont indiqué qu’un traitement de « chimiothérapie protocolaire », indisponible à Gaza, était nécessaire.

Un médecin de l’hôpital al-Rantisi montre l’endroit où les médicaments auraient dû été stockés (MEE/Hind Khoudary)

Khadija, la mère d’Ahmad, a expliqué à MEE que son fils souffrait d’une profonde dépression et refusait de voir quiconque.

Très inquiète pour son fils, elle a ajouté : « Chaque jour qui passe, la vue de mon fils en souffrance me tue. Je ne peux rien y faire et l’état de mon fils s’aggrave. »

« Israël n’a aucune pitié, ils ne savent pas à quel point mon fils nous est précieux », a-t-elle ajouté.

Occasionnellement, l’attente d’une autorisation de sortie pour recevoir un traitement se termine tragiquement.

Après trois mois passés à attendre son autorisation médicale pour obtenir sa chimiothérapie, Subhi Abu Nour, 62 ans, a succombé le 12 août dernier à un lymphome, une forme de cancer des ganglions lymphatiques.

« Si je ne reçois pas d’autorisation dans les prochains jours, je perdrai la vie et mes enfants perdront leur mère »

– Areej Abu Zayed, patiente cancéreuse

Areej Abu Zayed, une mère de quatre enfants âgée de 33 ans, souffre d’un cancer du sein et attend une chimiothérapie depuis plus d’un mois. Son mari doit s’occuper des enfants alors qu’elle est toujours hospitalisée à al-Rantisi.

« Si je ne reçois pas d’autorisation dans les prochains jours, je perdrai la vie et mes enfants perdront leur mère », a-t-elle confié à MEE.

« Il est très difficile pour nous tous [les patients cancéreux] de ne pas pouvoir recevoir notre traitement. Nous avons le droit de recevoir nos médicaments. Ma vie est en danger, je ne veux pas mourir », a-t-elle ajouté, avant d’être prise d’une toux si forte que sa mère a dû l’aider à mettre un masque à oxygène.

Israël, qui continue d’imposer des restrictions à la bande de Gaza, a interdit et retardé l’arrivée de divers types de médicaments dans l’enclave assiégée.

L’Autorité palestinienne à Ramallah aurait envoyé mardi dernier un camion de médicaments anticancéreux à Gaza pour tenter de soulager partiellement les souffrances que connaissent actuellement les patients.

Pendant ce temps, des Palestiniens comme Zayed, Ahmad et Bahnsawi attendent leur traitement.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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