Raid israélien sur al-Aqsa : récit d’un témoin oculaire
Témoignage brut recueilli par Nadda Osman.
C’était une nuit banale, j’étais à la mosquée al-Aqsa comme nous le faisons les dix derniers jours du Ramadan. Aux environs de 3 h du matin, nous avons commencé à voir des Israéliens forcer l’entrée de la mosquée et se rassembler en groupes. Ce fut comme un signal d’alarme pour nous.
Les fidèles musulmans ont poursuivi les prières de la nuit, mais le bruit des gens s’introduisant dans la mosquée était source d’inquiétude.
On a fait le fajr (prières de l’aube) vers 4 h du matin et avons regardé les colons continuer à affluer, apportant des pierres avec eux et tous les matériaux qu’ils pouvaient pour former une barricade. Les forces israéliennes étaient positionnées à des endroits stratégiques, visant les fidèles autour.
Alors que les jeunes se préparaient pour leur séminaire à 8 h, la police israélienne a commencé à nous viser par le biais de snipers tirant des balles en caoutchouc. Certains jeunes ont réagi en jetant des pierres.
Les forces israéliennes ont fait tout le tour du côté ouest de la mosquée, brisant tout ce qu’elles pouvaient, y compris les caméras dans la zone environnante. La solidarité entre Palestiniens a été forte, ils se sont rassemblés pour se soutenir les uns les autres alors qu’ils avaient du mal à respirer en raison des gaz lacrymogènes.
J’étais près de la mosquée al-Qibli quand les policiers ont lancé leur attaque contre nous. Ils étaient positionnés en rangs et nous visaient avec des gaz lacrymogènes. Ils visaient de sorte à pousser les gens vers le nord, et de là, vers la porte afin d’évacuer la mosquée.
C’était terrible. En quelques minutes, on a eu l’impression que le ciel nous tombait sur la tête. Je voulais essayer d’échapper aux balles en caoutchouc, donc je me suis caché, afin d’être hors de vue.
Autour de moi, les gens n’ont pu s’empêcher de crier contre la sauvagerie de la police et la quantité de munitions utilisées dans la mosquée. Dans de nombreux cas, les gens ont été frappés alors qu’ils faisaient leur prière. Ils n’ont respecté ni les personnes âgées ni les femmes ni les jeunes.
Le gaz lacrymogène a provoqué des problèmes respiratoires ; les personnes âgées avaient du mal à s’enfuir, suffoquant sous les gaz lacrymogènes et incapables de voir clairement où elles allaient.
Ma mère, qui a près de 70 ans, peinait à s’enfuir après avoir fini ses prières à la porte de la Miséricorde. Tout le monde avait du mal à respirer du fait de l’utilisation de gaz lacrymogène en lieu clos. De nombreuses femmes âgées comme ma mère en ont souffert.
Beaucoup ont été pris par surprise.
Des tensions couvaient en raison des expropriations prévues dans le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem, et beaucoup anticipaient des troubles alors que les Israéliens se préparaient à célébrer le jour de Jérusalem, qui commémore la prise de Jérusalem-Est par Israël lors de la guerre des Six Jours en 1967. Mais les Palestiniens se sont rassemblés à al-Aqsa pour prier, pensant qu’on les laisserait en paix.
Cette attaque était inattendue. Nous ne pensions pas que les soldats israéliens entreraient de force dans la mosquée. Énormément de grenades assourdissantes ont été utilisées, nous ne savions pas d’où venaient les attaques et le bruit était horrible. Nous ne savions absolument pas quoi faire.
Bien que ce soit un choc, ce raid n’a pas entamé la résolution des Palestiniens, qui sont déterminés à continuer à résister.
De nombreux Palestiniens se sont soutenus les uns les autres et ont fini blessés eux-mêmes alors qu’ils voulaient aider ceux qui avaient été battus ou s’étaient fait tirer dessus. Tout le monde ne voulait qu’aider.
Les Palestiniens ne font que devenir plus forts, ils sont retournés à la mosquée malgré les soldats israéliens qui leur ont barré les portes.
Après le raid, la mosquée était jonchée de pierres, d’éclats de verre et les tapis étaient tachés.
Cependant, malgré la violence et les troubles causés par ce raid, les Palestiniens sont vite retournés à la mosquée pour la nettoyer.
Le Ramadan n’est pas terminé et nous voulons que la mosquée retrouve son état originel, afin de pouvoir revenir faire les prières de la nuit, en particulier pendant ces derniers jours avant l’Aïd.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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