Aller au contenu principal

La guerre civile au Yémen exacerbée par les exécutions

À Ta’izz, la Résistance populaire déclare qu’il y a des infiltrés au sein du groupe qui exécutent des captifs houthis
La semaine dernière, les journaux houthis ont rapporté que la Résistance populaire à Ta’izz avait exécuté plus de vingt captifs

Plus tôt cette semaine, des hommes armés se réclamant du groupe Résistance populaire dans la province de Ta’izz ont exécuté des captifs houthis dans la ville de Ta’izz, traînant certains d’entre eux dans les rues.

L’un des prisonniers houthis a été exécuté sur la place publique, où les gens se sont réunis pour assister à l’événement. Le slogan de la Résistance populaire à Ta’izz apparaissait sur le mur de la place.

Ces exécutions ont été condamnées par des personnalités de toutes les provinces et de tous bords. Il s’agit de la première fois dans ce conflit que quiconque a été témoin de l’exécution de prisonniers de guerre.

Récompensée par le prix Nobel de la Paix en 2011, Tawakkol Karman a déclaré sur sa page Facebook que le prisonnier houthi exécuté était un sniper qui avait tué des dizaines d’habitants de Ta’izz : « Cependant, je condamne l’exécution des tireurs d’élite de cette manière, car la Résistance populaire ne doit pas se mettre au niveau des violences des Houthis. »

L’exécution du prisonnier houthi a eu lieu suite aux avancées de la Résistance populaire dans la province de Ta’izz plus tôt cette semaine.

Des infiltrés au sein de la Résistance populaire

Rashad al-Sharabi, un porte-parole de la Résistance populaire à Ta’izz, a affirmé à Middle East Eye que son groupe n’avait pas exécuté de captifs houthis dans la ville.

Il a rejeté l’assertion de Karman selon laquelle l’homme exécuté était un sniper houthi, déclarant : « Il y a des infiltrés au sein de la Résistance populaire à Ta’izz qui exécutent des captifs houthis afin d’exacerber les violences dans la ville. »

Al-Sharabi a confirmé que les dirigeants de la Résistance populaire à Ta’izz n’ont pas ordonné à ses membres d’exécuter de captifs, même les snipers houthis.

Des dizaines de captifs houthis sont détenus par la Résistance populaire à Ta’izz. Cependant, ils sont traités conformément aux prescriptions de la « loi islamique » et la Résistance populaire ne les torture pas, a assuré al-Sharabi.

« Les seuls à avoir bénéficié de cette exécution, ce sont les rebelles houthis. Après avoir vu les vidéos de l’assassinat des prisonniers à Ta’izz, ils ont immédiatement commencé à cibler la ville et des dizaines d’habitants ont été tués au cours des trois derniers jours, dont dix-sept enfants », a ajouté al-Sharabi.

Un membre du comité révolutionnaire suprême des Houthis a confié à l’agence de presse Saba, sous couvert d’anonymat, que ces derniers vengeraient les prisonniers exécutés à Ta’izz.

« Ceux qui ont exécuté les prisonniers houthis à Ta’izz font partie des renseignements houthis et la Résistance populaire à Ta’izz met tout en œuvre pour les arrêter », a ajouté al-Sharabi, déclarant que la présence d’infiltrés était monnaie courante en temps de guerre.

Dans l’une des vidéos des faits, visionnée par MEE, les personnes assistant à l’exécution scandaient le mot « sniper » et donnaient l’impression qu’elles soutenaient ces meurtres.

Un partisan de la Résistance populaire à Ta’izz a déclaré à MEE sous couvert d’anonymat : « La Résistance populaire doit exécuter les snipers qui tuent des civils, et nous savons tous que la Résistance populaire exécute les snipers houthis. Toutefois, après la ferme condamnation de cet acte, la Résistance populaire ne procède plus à ces exécutions. »

« Nous devons dire aux Houthis que les habitants de Ta’izz se battront pour leur ville et qu’ils tueront les envahisseurs houthis partout à Ta’izz. Nous devons leur dire que Ta’izz est le cimetière des Houthis », a ajouté ce partisan de la Résistance populaire.

Imitation du groupe EI

Au cours de la dernière semaine, les journaux houthis ont rapporté que la Résistance populaire avait exécuté plus de vingt captifs à Ta’izz, originaires principalement de la région d’al-Rumaima dans les montagnes de Sabir.

Cependant, al-Sharabi a certifié que la Résistance populaire n’avait pas exécuté ces combattants et qu’ils avaient été tués au combat à Ta’izz.

Hussein al-Boukhaiti, un militant houthi, a déclaré à MEE qu’à Ta’izz, la Résistance populaire imitait les membres du groupe État islamique (EI) dans la façon dont ils exécutaient les gens. « Le meurtre de prisonniers prouve clairement qu’il y a des membres du groupe EI qui se battent avec la soi-disant Résistance populaire. »

Jusqu’à présent, aucune déclaration officielle de la Résistance populaire n’est venue nier l’exécution des prisonniers houthis.

« La Résistance populaire à Ta’izz a mis en œuvre des exécutions en masse de combattants houthis. Voilà pourquoi les Houthis continueront à essayer de libérer Ta’izz des membres du groupe EI », a déclaré al-Boukhaiti.

Il a souligné que l’exécution avait eu lieu rue Gamal, qui est sous le contrôle de la Résistance populaire, indiquant que celle-ci devait être tenue pour responsable de tout ce qui se passe dans les zones sous son contrôle.

Hussein al-Boukhaiti a indiqué à MEE que les Houthis détenaient des dizaines de prisonniers, mais n’en avaient tué aucun.

Les habitants de Ta’izz contre les exécutions

Des habitants de Ta’izz soutiennent que la Résistance populaire a bel et bien exécuté les combattants houthis, même si celle-ci a refusé de l’admettre.

Abdulsalam Aref était un partisan de la Résistance populaire à Ta’izz, au début de la guerre. Mais il a commencé à s’y opposer après l’exécution des combattants houthis prisonniers.

« Tous les habitants de Ta’izz savent très bien que la Résistance populaire a exécuté ces combattants houthis pour célébrer sa victoire. L’exécution a eu lieu rue Gamal, une des principales artères du centre de Ta’izz, et c’est un comportement immoral », a-t-il rapporté à MEE.

Dimanche, la Résistance populaire à Ta’izz a célébré sa victoire dans de nouvelles zones de la ville. Les habitants se sont rassemblés rue Gamal et ont allumé des feux d’artifice. C’était le jour où un captif houthi avait été exécuté dans cette même rue.

Aref a déclaré : « Je soutiens la Résistance populaire si elle lutte pour empêcher les Houthis d’envahir Ta’izz, mais je ne soutiens pas l’exécution de personnes ; c’est une grave menace pour l’ensemble du pays s’il y a des gens qui tuent d’autres êtres humains. »
 

Traduction de l’anglais (original) par VECTranslation.

Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].