Aller au contenu principal

Les forces syriennes soutenues par les États-Unis annoncent le début de la campagne contre Raqqa

Selon les Forces démocratiques syriennes (FDS), l'opération « Colère de l'Euphrate » mobilisera plus de 30 000 hommes

Les chefs des Forces démocratiques syriennes (FDS) en conférence de presse à Aïn Issa pour annoncer le nouvelle opération sur Raqqa (Reuters)

Une force arabo-kurde soutenue par les États-Unis a lancé une offensive ce dimanche contre la ville qui est, de fait, la capitale syrienne du groupe État islamique (EI), Raqqa. Alors que les forces irakiennes sont entrées dans le bastion de l’EI à Mossoul, cette opération met un peu plus la pression sur le groupe de combattants.

« La grande bataille pour la libération de Raqqa et de sa province a commencé », a annoncé Jihan Sheikh Ahmed, une commandante des Forces démocratiques syriennes (FDS) qui a lu un communiqué dans la ville d'Aïn Issa, située à plus de 50 km au nord de Raqqa.

L'offensive baptisée « Colère de l'Euphrate », qui mobilise quelque 30 000 hommes, a débuté sur le terrain samedi soir selon Jihan Sheikh Ahmed.

« Raqqa sera libérée grâce à ses fils et ses factions arabes, kurdes et turkmènes, des héros combattant sous la bannière des Forces démocratiques syriennes. »

Elle a également précisé que les FDS appelaient « les organisations humanitaires à faire le nécessaire » envers la population de Raqqa.

Talal Sello, porte-parole des FDS basé à Hassaké, a expliqué à l’AFP que l'opération se déroulerait en « deux étapes : libérer la province de Raqqa pour isoler la ville » et ensuite « en prendre le contrôle ».

« La bataille ne sera pas facile et demandera des opérations pointues et prudentes parce que l'EI défendra son bastion car il sait que la perte de Raqqa signifie sa fin en Syrie », a-t-il ajouté.

Le correspondant de l'AFP présent à Aïn Issa a vu des dizaines de combattants se diriger à bord de véhicules vers le front.

Cette opération très attendue arrive deux ans après la prise de contrôle de vastes parties de la Syrie et de l’Irak par l’EI.

Ces derniers mois, ses combattants ont essuyé une série de défaites territoriales et se retrouvent sous pression sur plusieurs fronts.

Depuis le début de l’offensive sur Mossoul, le 17 octobre, les forces spéciales irakiennes ont progressé dans la ville vendredi mais se retrouvent confrontées à une résistance acharnée de l’EI.

Champ de bataille compliqué

La perte de Mossoul et de Raqqa priverait l’EI de ses centres de populations les plus importants, sapant la prétention du groupe à se revendiquer « État ».

Mais la prise de ces deux villes, toutes les deux foyers de populations civiles importants, devrait être un processus laborieux et certainement sanglant.

Traquer les combattants dans leurs bastions urbains a marqué la fin du match depuis que la coalition menée par les États-Unis a lancé des frappes aériennes contre l’EI pendant l’été 2014. La coalition a formé et fourni des centaines de conseillers pour travailler avec les forces irakiennes et sélectionner les combattants syriens, y compris les FDS.

« La coalition menée par les Américains a fourni une première livraison d'arsenal et d'équipements, dont des armes anti-char », a précisé Talal Sello.

Peu de temps après avoir visité l’Irak le mois dernier pour superviser l’offensive sur Mossoul, le secrétaire américain à la Défense Ahston Carter avait prévenu qu’un assaut sur Raqqa serait organisé « dans les prochaines semaines ».

Le projet d’opérations simultanées contre Mossoul et Raqqa « fait partie de notre plan depuis un bon moment », a-t-il déclaré.

Dimanche, le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a également annoncé que la coalition menée par les États-Unis contre l’EI devait commencer la bataille de Raqqa pendant que l’offensive contre Mossoul suit son cours.

« La bataille de Raqqa doit avoir lieu », a-t-il déclaré au micro d’Europe 1.

Jean-Yves Le Drian, dont le pays est le second contributeur à la coalition, a ajouté que la bataille de Mossoul serait longue et compliquée compte tenu du fait que l’EI se mélange à la population locale.

Mais à Raqqa, le front est encore plus complexe.

Après cinq ans de guerre civile, la Syrie est divisée en un patchwork de fiefs sur tout un territoire aux mains du président Bachar al-Assad, de l’EI et des forces de l’opposition.

Ashton Carter a désigné les FDS comme le partenaire potentiel de la coalition sur le terrain, et la semaine dernière, la force a annoncé qu’elle conduirait l’assaut.

Avec à sa tête les puissantes Unités de protection du peuple (YPG) kurdes, les FDS ont ces derniers mois débusqué l’EI de larges bandes de territoire au nord de la Syrie, y compris dans la ville de Manbij, une poudrière, au mois d’août.

La scène des pires atrocités

Washington a promu les FDS comme des alliés essentiels dans la bataille contre l’EI mais cette alliance se complique par l’opposition féroce de la Turquie à la participation des YPG.

Ankara considère la milice comme un groupe terroriste, et en août dernier, avait lancé sa propre opération au nord de la Syrie, pour cibler à la fois l’EI et les YPG.

Talal Sello a déclaré dimanche que les FDS s’étaient « mises d'accord de manière définitive » avec les États-Unis pour qu'il n'y ait aucun rôle des Turcs ou des rebelles qui leur sont alliés dans l'offensive contre Raqqa.

Le chef d'état major de l’armée turque a toutefois rencontré son homologue américain à Ankara dimanche, à la demande de l’armée américaine, ont déclaré les forces armées turques.

Aucun détail n’a été donné sur cette rencontre entre Hulusi Akar et Joseph Dunford.

Les forces turques au nord de la Syrie veulent repousser les combattants de l’EI plus au sud depuis la ville d’al-Bab et se trouvent actuellement à une dizaine de kilomètres de la ville, a précisé le président turc Recep Tayyip Erdoğan.

Raqqa, au nord de la Syrie, sur le fleuve de l’Euphrate, comptait 240 000 habitants avant 2011. Plus de 80 000 personnes ont fui de la ville et d’autres régions du pays depuis. Raqqa était aussi la première capitale de province à tomber entre les mains des rebelles en mars 2013 , deux ans après le début du soulèvement contre Bachar al-Assad.

Raqqa est devenue la scène des pires atrocités commises par l’EI, des lapidations aux décapitations jusqu’à la traite d’esclaves sexuelles.

Des milliers de combattants étrangers ont afflué vers Raqqa pour rejoindre les rangs de l’EI. Les États-Unis ont décrit la ville comme le centre névralgique des attaques du groupe à l’étranger.

Traduit de l’anglais (original).

Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].