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Les Houthis critiquent la fuite de diplomates suite à la prise d'un camp militaire par AQPA

La prise d'un camp militaire par AQPA soulève des questions sur la stratégie américaine au Yémen en l'absence de diplomates ou d'alliés apparents sur le terrain
Rassemblement des Houthis en commémoration du quatrième anniversaire de la révolte qui a contraint l'ex-président Ali Abdallah Saleh à quitter le pouvoir (AFP).
Par MEE

Au Yémen, les miliciens Houthis ont critiqué la décision des Etats-Unis et d'autres pays de fermer leurs ambassades dans ce pays déchiré par les conflits suite à la prise de pouvoir par le mouvement chiite plus tôt cette semaine.

Après les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France, l'Italie est le dernier pays à fermer son ambassade jeudi dernier.

Ceci intervient alors qu'al-Qaïda dans la péninsule Arabique (AQPA) aurait pris jeudi le contrôle d'un camp militaire dans la ville de Beihan, située au sud du Yémen dans la province de Chabwa.

Au moins sept personnes ont trouvé la mort dans le combat ayant suivi la prise de la 19e brigade d'infanterie. La nouvelle sera certainement accueillie avec inquiétude par Washington qui aurait, plus tôt ce mois-ci, perdu la trace des armes et des équipements qu'il a fournis au Yémen depuis 2006 pour une valeur de 400 millions de dollars.

L'escalade de la violence a poussé le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, à mettre en garde jeudi contre le fait que, sans mesures drastiques visant à « éviter une guerre civile au Yémen », un conflit massif pourrait éclater rapidement.

« Soyons clairs : nous assistons à l'effondrement du Yémen. Nous ne pouvons pas nous contenter de l'observer en restant les bras croisés », a-t-il indiqué aux quinze membres du Conseil de sécurité.

Il a poursuivi en demandant à ce que l'on « accorde la liberté de circulation » au président Abd Rabo Mansour Hadi et à son Premier ministre, qui se sont de fait trouvés assignés à résidence suite à la prise du pouvoir par la milice chiite.

L'envoyé spécial de l'ONU au Yémen, Jamal Benomar, a également déclaré que la situation était critique.

« Aujourd'hui, le Yémen est à la croisée des chemins : soit il plongera dans la guerre civile et se désintégrera, soit il trouvera un moyen de remettre la transition sur les rails », a-t-il expliqué au Conseil par visioconférence depuis Sanaa.

AQPA est régulièrement considéré comme la branche la plus dangereuse d'al-Qaïda, et les Etats-Unis mènent une campagne antiterroriste intensive au Yémen pour l’éliminer.

L'Iran a également confirmé mercredi avoir participé à la « lutte contre le terrorisme » au Yémen.

Lors d'un rassemblement organisé à Téhéran à l'occasion du 36e anniversaire de la révolution islamique de 1979, le président Rohani a déclaré que l’Iran avait « aidé le peuple » du Yémen et encouragé « la paix et la stabilité » dans le pays, sans préciser toutefois sous quelle forme.

Bien que les Houthis chiites soient opposés à AQPA et considérés comme un contre-pouvoir de ce dernier, leur prise de pouvoir et de territoires, notamment des bases militaires, a suscité des craintes quant à une éventuelle vacance du pouvoir dont AQPA pourrait tirer parti.

« C'est précisément ce scénario qui inquiète les représentants américains : l'effondrement du Yémen, la progression d'al-Qaïda et l'absence d'alliés sur le terrain », a écrit Gregory Johnsen sur BuzzFeed vendredi dernier.

Malgré l'évacuation de l'ambassade américaine, les représentants officiels se sont empressés de souligner qu'il n'y aurait pas de relâchement dans les opérations de lutte contre le terrorisme.

Mercredi dernier, Josh Earnest, porte-parole de la Maison Blanche, a précisé qu'« il y a toujours des membres du département de la Défense [...] sur le terrain au Yémen qui assurent la coordination avec leurs homologues ».

Il a indiqué qu'ils menaient « les actions antiterroristes nécessaires à la protection du peuple américain et de ses intérêts de par le monde ».

Les représentants houthis ont toutefois déclaré que les fermetures de postes diplomatiques étaient un stratagème visant à « faire pression » sur le peuple yéménite.

« La décision de certains pays occidentaux de fermer leurs ambassades à Sanaa est totalement injustifiée », a indiqué Hussein al-Ezzi, le responsable houthi des Affaires étrangères, à l'agence de presse yéménite Saba.

Il a précisé que les nations étrangères « réaliseront rapidement qu'il est dans leur intérêt d'adopter une attitude positive envers la volonté du peuple yéménite, qu'elles doivent respecter ».

Mardi, la porte-parole du gouvernement américain, Jen Psaki, a déclaré que la perspective d'un regain de violence dans ce pays appauvri avait accéléré ce retrait.

« De récentes actions unilatérales ont interrompu le processus de transition politique au Yémen, entraînant un risque de regain de violence qui menace les Yéménites et la communauté diplomatique de Sanaa », a-t-elle indiqué.

Selon l'AFP, le personnel de l'ambassade américaine de Sanaa aurait détruit des documents et des armes suite à la prise de pouvoir par les Houthis. L'agence Reuters a ensuite signalé que ceux-ci s'étaient emparés de plus de trente véhicules appartenant aux ambassades après le départ des diplomates.

« L'objectif était de protéger [les véhicules], car certains conducteurs et employés locaux [des ambassades] souhaitaient se les approprier », a expliqué Hussein al-Ezzi, le responsable des Affaires étrangères.

« Les autorités aéroportuaires de Sanaa sont disposées à remettre les véhicules à un tiers fiable, comme par exemple l'ONU ».

La semaine dernière, les Houthis ont dissolu le parlement yéménite et proclamé un « conseil présidentiel » suite à la démission du président Abd Rabo Mansour Hadi le mois dernier, au motif qu'il n'était plus en mesure de gouverner.

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