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Selon un rapport israélien, les interrogatoires de détenus palestiniens vont jusqu’à la torture

Pour ce rapport ont été recueillis les témoignages de 116 Palestiniens détenus dans un centre d’interrogatoires entre 2013 et 2014
Des soldats israéliens arrêtant un Palestinien le 15 février 2016 dans le camp de réfugiés palestiniens d’Am’ari, près de la ville cisjordanienne de Ramallah (AFP)
Par MEE

Les Palestiniens en captivité dans un centre de détention géré par l’agence de renseignement israélienne Shin Bet font l’objet de maltraitances pouvant aller jusqu’à la torture, selon les conclusions d’un rapport fondé sur les témoignages de plus de 100 anciens prisonniers.

Le rapport conjoint de deux ONG israéliennes de défense des droits de l’homme, B’Tselem et HaMoked, a été rédigé à partir de déclarations sous serment et de témoignages de dizaines de Palestiniens qui avaient été questionnés par cette agence de sécurité israélienne.

Publié mercredi sous le titre « Avec le soutien du système : maltraitance et torture au centre d’interrogatoires de Shikma », ce rapport révèle que les mauvais traitements subis par les Palestiniens au centre de détention de Shikma sont allés jusqu’à la torture.

Les témoignages en question ont été recueillis auprès de 116 Palestiniens détenus entre août 2013 et mars 2014 à Shikma, un centre situé à Ashkelon, au sud d’Israël. Cette infrastructure est sous le contrôle de l’agence de renseignement intérieur Shin Bet.

La torture a été proscrite par la Cour suprême israélienne en 1999 ; cependant, un juriste de l’association HaMoked a déclaré que ce rapport était la preuve que les interrogateurs avaient enfreint cette décision de justice.

Les détenus ont été soumis à des privations de sommeil et à des actes de torture psychologique, ils ont été maintenus dans des positions douloureuses et exposés à des températures extrêmement élevées ou basses, est-il expliqué dans le rapport. Dans certains cas, les interrogateurs israéliens ont également insulté la famille des détenus. On leur a parfois refusé l’accès à une douche pendant des durées allant de plusieurs jours à plusieurs semaines, ils ont essuyé des crachats et ont été nourris d’aliments de mauvaise qualité et en petites quantités.

« Les conditions de détention au centre de Shikma font partie intégrante des interrogatoires menés sur place : elles contribuent à affaiblir le détenu aussi bien sur le plan physique que psychologique, en complément à l’interrogatoire à proprement parler, qui se déroule dans une salle dédiée », indique le rapport. « L’association des conditions imposées dans et en dehors de la salle d’interrogatoires représente de la maltraitance et des traitements inhumains et dégradants qui vont parfois jusqu’à la torture. »

Selon le rapport, la quasi-totalité des détenus a fait l’objet de ces mesures. Un tiers d’entre eux a été victime de coups ou d’insultes au moment de l’arrestation, et au moins quatorze de ces détenus avaient été torturés dans le cadre de leur interrogatoire par l’Autorité palestinienne peu de temps avant d’être arrêtés par Israël.

Mazen Abou Arich, 22 ans, a passé vingt jours en isolement cellulaire.

« Psychologiquement, être seul en permanence, c’est comme vivre dans des toilettes, a-t-il déclaré. Si quelque chose vous arrive, personne ne s’en rendra compte. On peut aussi bien mourir et n’être découvert que plusieurs jours après. On vous jette dans un coin, et on vous oublie. »

Le rapport a aussi mis l’accent sur la complicité d’autres branches et organes de la sécurité israélienne, comme le système carcéral : non seulement ces institutions ferment les yeux sur ce genre de pratiques, mais elles ont aussi tendance à fournir des conditions propices au déroulement de ces maltraitances ; elles se rendent ainsi responsables des divers aspects de ces « traitements inhumains, dégradants et violents » dont les Palestiniens font l’objet à Shikma.

« L’IPS, le Service des prisons israéliennes, est à l’origine de conditions de détention en accord avec la feuille de route des interrogatoires, dont le but est de briser le mental des détenus », est-il déclaré dans le rapport.

« Les soldats et les agents de police maltraitent les détenus pendant le transport vers les infrastructures de la sécurité israélienne… [tandis que les] juges militaires donnent presque automatiquement leur accord pour les envoyer en détention préventive, approuvant de fait les maltraitances permanentes et les conditions inhumaines de détention. »

Dans une déclaration officielle, le Shin Bet a précisé ne pas souhaiter émettre de commentaires sur ce rapport qualifié de « malhonnête ».

L’agence a soutenu que les interrogatoires se déroulaient dans le cadre prévu par la loi afin d’empêcher les attaques et « toute activité pouvant porter atteinte à la sécurité du pays. »

Traduction de l’anglais (original) par Mathieu Vigouroux.

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