Sissi veut surveiller les internautes ayant plus de 5 000 abonnés
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a promulgué une loi portant sur la réglementation de la presse et des médias, qui va permettre de surveiller étroitement certains comptes d'utilisateurs de réseaux sociaux, a rapporté samedi le journal officiel.
En Égypte, si vous avez plus de 5 000 abonnés en ligne – sur un site, un blog ou sur les réseaux sociaux – vous pourrez être surveillé par les autorités. C’est ce que prévoit la nouvelle loi votée par le Parlement égyptien en juillet, promulguée samedi 1er septembre par le président Abdel Fattah al-Sissi.
Toute personne qui « publie ou diffuse de fausses nouvelles » ou « incite à violer la loi, à la violence ou à la haine » verra son blog ou son site personnel suspendu ou bloqué par le Conseil supérieur de régulation des médias, un organisme connu pour censurer et attaquer régulièrement les médias et la presse.
Cette nouvelle loi visant à réglementer la presse et les médias prévoit par ailleurs une peine de prison d’un an et une amende de 50 000 à 100 000 livres égyptiennes (d’environ 2 5000 à 4 900 euros) pour toute personne qui « accède délibérément ou par erreur, et sans raison valable, à un site, un compte privé ou un système informatique dont l’accès est interdit », selon le texte de loi.
« Tous ceux qui créent, dirigent ou utilisent un site ou un compte privé dans le but de commettre ou de faciliter la commission de crimes punis par la loi » risqueront au moins deux ans d’emprisonnement et 100 000 livres égyptiennes d’amende (4 885 euros).
Cette loi controversée a suscité l’indignation et de nombreuses critiques sur la toile où le président égyptien a été décrit comme « un dictateur » et « un criminel ».
« La censure en ligne se légalise et se renforce »
Le 18 août, l’Égypte a promulgué une loi sur la « cybercriminalité » qui accorde aux autorités judiciaires le droit d’« ordonner la censure de sites » chaque fois qu'un site héberge du contenu représentant « une menace à la sécurité nationale ou compromet la sécurité nationale ou l'économie nationale ».
Selon le dernier rapport de l'Association pour la liberté de pensée et d'expression (AFTE), plus de 500 sites d'informations ou d'ONG sont actuellement bloqués en Égypte.
« La censure en ligne se légalise et se renforce », relève l’ONG Reporters sans frontières (RSF), « au nom de la sécurité nationale, qui est définie de manière très large et floue, les autorités égyptiennes s’arrogent le droit de censurer des sites d’information ou d’ONG dont le tort est de révéler des violations des droits humains commises par les autorités », affirme Sophie Anmuth, responsable du bureau Moyen-Orient de RSF.
L’Égypte qui occupe le 161e rang au classement mondial de la liberté de la presse est devenue « une des plus grandes prisons au monde pour les journalistes » avec au moins 36 journalistes détenus à cause de leur travail d’information.
Plusieurs journalistes, blogueurs et activistes connus sur les réseaux sociaux ont été arrêtés par les autorités égyptiennes. Comme le fameux blogueur Wael Abbas, arrêté le 23 mai et détenu à un endroit qui n'a toujours pas été divulgué par les autorités égyptiennes. Ou encore le chercheur et journaliste d’investigation Ismaïl Alexandrani, condamné à dix ans de prison sans en être informé directement. Selon les dernières informations annoncées par des activistes égyptiens, le chercheur a été « transféré dans l’aile des drogués et des fous de sa prison égyptienne où il est victime d’agressions répétées ».
Traduction : « Le journaliste et chercheur Ismail Alexandrani, déjà condamné à dix ans de prison pour des charges fallacieuses pour son travail sur le Sinaï, a été transféré dans l’aile des drogués et des fous de sa prison égyptienne où il est victime d’agressions répétées. Ismail vit une situation infernale »
La répression exercée contre les journalistes, les activistes et la société civile s’est intensifiée en Égypte selon le dernier rapport d’Amnesty International. « Les journalistes et les personnes qui critiquaient le gouvernement, manifestaient pacifiquement ou défendaient les droits humains étaient couramment arrêtés et détenus arbitrairement avant d’être jugés lors de procès d’une iniquité flagrante », explique le rapport.
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