Acid Arab, les pionniers de l’électro à la sauce orientale
Depuis les premières soirées organisées dans un club intimiste de la capitale française, jusqu’à sa formation actuelle, Acid Arab a bien grandi. Le groupe parisien s’est étoffé d’abord, en passant de deux à cinq musiciens. Et il s’est surtout forgé une solide réputation, celle d’un collectif de DJ à la pointe de l’électro orientale, même si Guido Minisky, l’un des deux membres fondateurs avec Hervé Carvalho, tient à le préciser : « Il ne faut pas perdre de vue que notre spécialité est de faire de la techno et de la house, pas de la musique arabe. »
Alors que certains artistes aiment aujourd’hui se définir grâce à des sous-genres musicaux toujours plus pointus, Acid Arab aspire à une certaine simplicité : la patte du collectif français, c’est une base d’acid house (un courant de musique électronique né à Chicago dans les années 1980), pimenté à la sauce arabe (chaâbi, raï, dabkeh, gnawa), d’où son nom.
Sauf que derrière cette sobriété affichée, se cache une musique complexe qui transporte aux quatre coins du monde arabo-musulman, sans pour autant perdre pied avec les codes de l’électro occidentale.
« Ils prônent une musique originale, qui ose le mélange des cultures et des influences », souligne Simon Ugolin, directeur artistique de La Friche Lucien, qui avait programmé Acid Arab au mois de juin à Rouen, avant d’être obligé d’annuler pour cause d’épidémie de coronavirus.
« Ils avaient déjà joué chez nous en 2017 et le public avait bien adhéré. Depuis leur passage cet hiver aux Trans Musicales de Rennes, ils ont pris une autre dimension. »
Une musique aujourd’hui populaire en Europe de l’Ouest
Considérée pendant plusieurs décennies comme ringarde en Occident, la musique orientale s’est démocratisée et popularisée, tenant le haut de l’affiche des clubs les plus branchés de Paris, Londres, Berlin ou encore Copenhague, notamment grâce à des artistes comme le Syrien Omar Souleyman ou le Libanais Bachar Mar-Khalifé.
« Avant, la musique arabe était inaccessible, il n’y avait pas de place pour elle sur les radios ou à la télé française. Elle était confinée dans de petites niches », analyse, pour Middle East Eye, Guido Minisky.
Un constat qui va changer à partir de la fin des années 1980, à la faveur, d’abord, de la diffusion de titres défrichés par Radio Nova en France et à « l’explosion d’internet » ensuite.
« Toutes les musiques sont désormais traitées de la même façon. C’est comme si le monde se réveillait et découvrait qu’il n’avait eu accès qu’à la moitié de la culture de la planète », ajoute-t-il, enthousiaste.
À la différence de certains artistes globe-trotteurs, Hervé Carvalho et Guido Minisky optent pour la quiétude de leur studio parisien pour composer, ce qui ne les empêche pas de multiplier les collaborations.
Pour Jdid (« nouveau » en arabe), sorti le 18 octobre 2019 sur le label Crammed Discs, Acid Arab s’est adjugé les services de pas moins de neuf artistes (sur onze chansons), issus de tout le bassin méditerranéen.
« Chaque morceau a une histoire différente ; toutes les personnes qui figurent sur le disque, on est allés les chercher parfois très loin », rappelle le cofondateur du groupe. Parmi eux, on peut citer la chanteuse algérienne Radia Menel, le claviériste syrien Rizan Said ou encore le compositeur turc Cem Yıldız.
Une musique « profonde et répétitive »
Pour ce deuxième album, finis les atermoiements : Acid Arab s’est concentré sur ce qu’il savait faire : de la musique électronique saupoudrée d’épices moyen-orientales. Avec Jdid, les Français font la part belle à l’amour et à « la poésie ésotérique ».
Selon Simon Ugolin, Acid Arab peut compter sur sa « fan base », un public fidèle qui suivra le quintet coûte que coûte.
« Le monde arabe commence à avoir bonne presse chez les aficionados de musique électro, notamment avec des villes comme Beyrouth et Tel Aviv », relève le directeur artistique de La Friche Lucien.
« C’est improbable et en même temps tellement logique. La musique arabe est souvent profonde et répétitive, notamment les lignes de synthé… Finalement, comme la techno ! »
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