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Visite du président émirati à Paris : des ONG de défense des droits de l’homme interpellent Macron

Trois ONG ont demandé au président français d’exprimer les préoccupations de la France concernant les questions des droits de l’homme aux Émirats arabes unis et au Yémen lors de sa rencontre avec Mohammed ben Zayed à Paris ce lundi
Mohamed ben Zayed al-Nahyane a été reçu le 18 juillet par Emmanuel Macron au Palais de l’Élysée à Paris (AFP/Giuseppe Cacace)
Mohamed ben Zayed al-Nahyane a été reçu le 18 juillet par Emmanuel Macron au palais de l’Élysée à Paris (AFP/Giuseppe Cacace)
Par MEE

Le président des Émirats arabes unis (EAU), Mohamed ben Zayed al-Nahyane (MBZ), est arrivé dimanche à Paris pour une visite au cours de laquelle il devrait signer plusieurs accords, notamment dans le secteur de l’énergie, dans un contexte de hausse des prix du pétrole.

Pour sa première visite d’État en tant que président des Émirats, riche pays pétrolier du Golfe, Mohamed ben Zayed est reçu ce lundi par son homologue Emmanuel Macron à l’Élysée. 

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Cette visite devrait être marquée par « l’annonce de garanties émiraties concernant les quantités d’hydrocarbures [diesel uniquement] fournies à la France », a indiqué un conseiller présidentiel à l’AFP.

À l’occasion de cette visite, plusieurs ONG de défense des droits de l’homme – la Ligue des droits de l’homme, le Gulf Center for Human Rights et la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) – ont adressé une lettre au président français, le priant « d’exprimer lors de [l]’entretien avec le président émirati [sa] préoccupation quant aux graves violations des droits humains en cours, d’exiger leur cessation et de s’abstenir d’y contribuer en manifestant un engagement ferme de suspendre toutes les ventes d’armes aux Émirats arabes unis en respect des engagements nationaux et internationaux de la France en la matière ».

Ces ONG expliquent que « de manière continue et depuis le déclenchement des révoltes arabes, les autorités émiraties ont intensifié les actes de répression contre ceux et celles qui expriment des critiques et contre les membres de la société civile ».

« Cette situation est illustrée par le sort des défenseurs des droits humains comme Ahmed Mansoor, lauréat du prix Martin Ennals pour les droits de l’homme, condamné pour ses critiques du régime et toujours en détention alors qu’il a purgé sa peine », lit-on dans la lettre adressée au président français.

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Les violations des droits de l’homme touchent également les militantes dans ce pays du Golfe.

« L’un des exemples les plus frappants est peut-être la souffrance qui a conduit à la mort de la détenue Alia Abdel Nour en 2019, après un long combat contre le cancer à l’intérieur de la prison aux Émirats arabes unis », citent les ONG, rappelant également le sort des défenseures des droits ayant purgé leurs peines mais qui restent en détention à ce jour, comme Amina al-Abdouli et Maryam al-Balushi, dont les peines ont expiré le 19 novembre 2020.

Les poursuites judiciaires contre les militants des droits de l’homme n’épargnent pas non plus les ressortissants étrangers.

« C’est le cas par exemple d’Ahmed Etoum, un citoyen jordanien résidant aux EAU, qui a été condamné en février 2021 à dix ans de prison, sur la base d’accusations vagues ‘’d’actes contre un État étranger’’, suite à des publications sur Facebook où il critiquait pacifiquement l’État jordanien. »

L’autre cas est celui du défenseur des droits syrien Abdel Rahman al-Nahhass, qui réside aux EAU depuis 2013 et qui « a été arrêté et maintenu arbitrairement en détention pendant treize mois avant d’être transféré dans un lieu de détention secret et [qui] n’a eu aucun contact avec sa famille depuis ».

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Enfin, les ONG rappellent « les graves violations des droits humains et du droit international humanitaire au Yémen ».

« Alors que les Émirats arabes unis avaient annoncé le retrait de leurs forces présentes au Yémen depuis 2019, leurs attaques contre des civils dans ce pays ont continué et leurs graves violations du droit international pendant la guerre sont avérées. »

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Dans un rapport de 2019, le Groupe d’experts éminents (GEE) des Nations unies sur le Yémen a affirmé qu’il avait « des motifs raisonnables de croire que les gouvernements du Yémen, des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite […] sont responsables […] de privations arbitraires du droit à la vie, de disparitions forcées, de détentions arbitraires, de viols et d’autres formes de violence sexuelle, d’actes de torture, de mauvais traitements et de recrutements d’enfants, ainsi que de violations des libertés fondamentales et des droits économiques, sociaux et culturels ».

Retournant une déclaration d’Emmanuel Macron sur le conflit ukrainien, qui estimait qu’« il y a des gens qui font beaucoup d’argent sur la guerre. On appelle ça des profiteurs de guerre », les ONG signataires ont pointé le « contrat conclu en décembre dernier avec les Émirats arabes unis pour la vente d’avions de combat Rafale et d’hélicoptères Caracal, d’une valeur de 16 milliards d’euros ».

« En poursuivant la conclusion de contrats d’armements avec les Émirats arabes unis, la France participe à la pérennisation du conflit au Yémen et aux graves violations des droits humains commises dans ce cadre. »

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