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Israël : le mouvement des colons remporte une victoire au Parlement

Le vote de la nuit dernière rend désormais possible une éventuelle légalisation par les autorités israéliennes d’une colonie recréée sans leur aval à Homesh, en Cisjordanie occupée
Des colons juifs et leurs partisans retranchés à l’intérieur de la colonie de Homesh en Cisjordanie brûlent un drapeau israélien, 23 août 2005, protestant contre leur évacuation par les autorités israéliennes (AFP/Thomas Coex)
Des colons juifs et leurs partisans retranchés à l’intérieur de la colonie de Homesh en Cisjordanie brûlent un drapeau israélien, 23 août 2005, protestant contre leur évacuation par les autorités israéliennes (AFP/Thomas Coex)

Le mouvement des colons a remporté une victoire mardi au Parlement israélien avec l’annulation d’une disposition législative interdisant aux Israéliens de séjourner dans une zone du nord de la Cisjordanie occupée dont les habitants juifs avaient été évacués en 2005.

Cette année-là, Israël s’était retiré unilatéralement de la bande de Gaza, évacuant les colonies juives dans ce territoire palestinien ainsi que quatre colonies du nord de la Cisjordanie, dans les environs de Naplouse.

La loi votée pour permettre ce désengagement interdit depuis aux Israéliens de séjourner dans ces zones, mais un amendement adopté définitivement lors d’un vote nocturne au Parlement les autorise désormais à revenir dans la partie évacuée du nord de la Cisjordanie.

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Ce vote rend désormais possible une éventuelle légalisation par les autorités israéliennes d’une colonie recréée sans leur aval à Homesh, la seule des quatre colonies juives de la zone dont les habitants avaient dû être évacués de force en 2005 avant la destruction des lieux par l’armée israélienne.

Toute l’entreprise de colonisation israélienne en Cisjordanie est jugée illégale au regard du droit international par l’ONU.

Alors que le conflit israélo-palestinien semble emporté dans une nouvelle spirale de violence depuis l’entrée en fonctions fin décembre d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire d’Israël sous la direction du Premier ministre Benyamin Netanyahou, le Conseil de sécurité de l’ONU a demandé le 20 février aux « parties de faire preuve de calme et de retenue et de s’abstenir de tout acte de provocation ».

Le Conseil a rappelé qu’il s’opposait « fermement à toutes les mesures unilatérales qui entravent la paix, notamment, entre autres, la construction et l’expansion de colonies de peuplement par Israël, la confiscation de terres palestiniennes et la ‘’légalisation’’ des avant-postes de colonies ».

Bezalel Smotrich satisfait 

Les colons d’extrême droite ont fait de Homesh un symbole de leur combat. Un petit groupe de militants y a créé une « yeshiva » (un institut d’études talmudique) en 2009, évacuée des dizaines de fois depuis par les forces de l’ordre, jusqu’à ce que l’armée finisse par les laisser s’installer.

En décembre 2021, un photographe de l’AFP y avait vu la yeshiva mais aussi un dortoir, deux installations de fortune constituées de bâches montées sur des armatures en bois, sous bonne garde de l’armée israélienne. 

Que sont les colonies israéliennes en Palestine ?

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Combien de colons israéliens ?

Quelque 475 000 Israéliens résident dans des colonies en Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967, où vivent 2,9 millions de Palestiniens.

Ils sont également 230 000 à Jérusalem-Est, secteur palestinien occupé depuis 1967 puis annexé par Israël, où résident plus de 360 000 Palestiniens. Ceux-ci veulent faire de cette partie de la ville la capitale de l’État auquel ils aspirent.

Alors que cette coexistence est souvent conflictuelle, des dizaines de milliers de Palestiniens vont chaque jour travailler en Israël ou dans ces colonies, souvent attirés par des rémunérations plus élevées.

La colonisation, considérée par une grande partie de la communauté internationale comme un des principaux obstacles à un règlement du conflit israélo-palestinien, s’est poursuivie sous tous les gouvernements israéliens depuis la guerre des Six Jours en 1967 mais a fait un bond sous le Premier ministre Benyamin Netanyahou.

Toutes les colonies israéliennes sont illégales au regard du droit international.

Qui sont les colons ?

De nombreux colons israéliens se sont installés en Cisjordanie et à Jérusalem-Est à la recherche de logements moins chers que sur le territoire israélien. Le gouvernement les encourage à s’installer dans des colonies devenues de véritables villes, comme Ariel, Maale Adoumim ou les colonies spécialement destinées aux juifs ultra-orthodoxes telles Beitar Illit et Modiin Illit.

Pour beaucoup de juifs nationalistes religieux, vivre dans les terres bibliques de Judée et de Samarie (nom donné par les Israéliens à la Cisjordanie) est l’accomplissement d’une promesse divine. Des centaines d’entre eux vivent ainsi près du caveau des Patriarches à Hébron, un site sacré pour les juifs et les musulmans et un des lieux où se focalise la violence entre Israéliens et Palestiniens.

Que sont les colonies sauvages ?

De taille très variable, pouvant aller de quelques tentes à des préfabriqués reliés aux réseaux d’eau et d’électricité, les « avant-postes de colonie », selon l’appellation de l’ONU, ont été établis sans l’aval des autorités israéliennes.

Israël a annoncé le 12 février 2023 qu’il allait légaliser neuf de ces colonies en Cisjordanie en réponse à des attentats meurtriers à Jérusalem-Est.

Ces implantations, dont certaines existent depuis des années, se trouvent notamment dans les secteurs de Hébron (sud), de Naplouse (nord) et dans la vallée du Jourdain.

De nouveaux logements doivent également être construits dans des colonies existantes, mais le gouvernement israélien n’a pas précisé leur nombre ni leur emplacement.

L’organisation israélienne anticolonisation La Paix maintenant a fustigé une politique d’« annexion folle », tandis que Washington, Berlin, Paris, Rome et Londres se sont dits « fermement » opposés à cette légalisation.

Ils ont dénoncé « les actions unilatérales qui ne font qu’accroître les tensions entre Israéliens et Palestiniens et qui nuisent aux efforts visant à parvenir à la solution négociée des deux États ».

Comment les Palestiniens voient-ils les colonies ?

Les Palestiniens considèrent les colonies israéliennes comme un crime de guerre et un obstacle majeur à la paix. Ils veulent que les Israéliens se retirent de toutes les terres qu’ils occupent depuis la guerre de 1967 et qu’ils démantèlent toutes les colonies, bien qu’ils aient accepté le principe de petits échanges territoriaux limités égaux en taille et en valeur.

De son côté, Israël exclut un retour complet aux frontières d’avant 1967, mais se dit prêt à se retirer de certaines parties de la Cisjordanie tout en annexant les plus grands blocs de colonies, qui abritent la grande majorité des colons.

Le Premier ministre Netanyahou a redit en janvier 2023 sa volonté de « renforcer les colonies », sans afficher de volonté de relancer les négociations de paix, au point mort depuis 2014.

Le ministre des Finances israélien Bezalel Smotrich, lui-même habitant d’une colonie de Cisjordanie occupée, pour qui « les Palestiniens n’existent pas », comme il l’a déclaré dimanche, a qualifié sur Twitter le vote « d’historique ».

« Cette nuit, nous commençons à effacer la honte de l’expulsion et à faire avancer la régularisation de notre présence à Homesh », a-t-il ajouté.

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