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#Dégage_Akhannouch : sur internet, la colère contre la cherté de la vie se focalise sur le chef du gouvernement marocain

Les internautes reprochent à Aziz Akhannouch son inaction face à la cherté de la vie, tout en l’accusant de profiter de la crise économique mondiale à travers sa société de distribution d’hydrocarbures, Afriquia, la première au Maroc
Sur les réseaux sociaux, Aziz Akhannouch est pastiché en vampire et accusé de « sucer le sang des Marocains » (Twitter)
Sur les réseaux sociaux, Aziz Akhannouch est pastiché en vampire et accusé de « sucer le sang des Marocains » (Twitter)
Par Correspondant de MEE à RABAT, Maroc

#Dégage_Akhannouch, #7dh_gasoil et #8dh_essence. Ces trois hashtags ont submergé les réseaux sociaux au Maroc, où la hausse des prix du carburant et des produits alimentaires a poussé des milliers d’internautes à manifester leur mécontentement en ligne.

Ils reprochent au chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, son inaction face à la cherté de la vie, tout en l’accusant de profiter de la crise économique mondiale à travers sa société de distribution d’hydrocarbures, Afriquia, la première au niveau national.

Traduction : « Seulement au Maroc : le Premier ministre détient la plus grande entreprise de carburants du pays et joue avec la vie des gens en fixant les prix selon son bon vouloir. »

Actuellement, les prix à la pompe affichent 16 dirhams (1,52 dollar) en moyenne pour le gasoil et 17, 75 dirhams (1,69 dollar) en moyenne pour l’essence, des tarifs bien trop élevés pour le pouvoir d’achat du Marocain moyen, pour qui le salaire médian est de 5 133 dirhams, soit autour de 489 dollars.

D’après les chiffres du site spécialisé Global Petrol Price, le Maroc est l’un des pays au monde où l’essence est la plus chère, le premier en Afrique du Nord, et le deuxième dans le monde arabe.

La contestation digitale s’organise dans des groupes Facebook dont les plus importants rassemblent plus de 100 000 membres. Les internautes y échangent autour de la possibilité d’un boycott général ou partiel des sociétés de distribution des hydrocarbures.

Un air de 2018

Une action qui rappelle celle de 2018 : un boycott s’était alors organisé autour de trois marques accusées d’appliquer des prix excessifs : Afriquia, le spécialiste français des produits laitiers Centrale Danone et l’eau minérale Sidi Ali.

Le boycott avait engendré pour Centrale Danone une perte de chiffre d’affaires de 40 % au deuxième trimestre puis de 35 % au troisième trimestre de l’année 2018.

Cette année, la colère populaire s’est même manifestée dans la rue, à Agadir – ville dont le maire n’est autre qu’Aziz Akhannouch lui-même –, lors du festival de musique Timitar.

Monté sur la scène de l’événement, le chef du gouvernement a été accueilli par les « Akhannouch, dégage ! » scandés par une partie des festivaliers, qui reprenaient le message du hashtag de la campagne sur internet.

Ce n’est pas la première fois qu’Aziz Akhannouch est hué par la foule lors d’un événement officiel. En 2018, alors qu’il occupait le poste de ministre de l’Agriculture, une foule rassemblée à l’occasion de l’inauguration, par le roi Mohammed VI, d’un port de plaisance à Tanger (nord) avait demandé le départ du ministre, dont la société Afriquia était ciblée par le boycott de l’époque.

Un an plus tôt, une commission d’information parlementaire avait révélé que les distributeurs d’hydrocarbures avaient engrangé des bénéfices de près de 17 milliards de dirhams (1,6 milliard de dollars) à travers une entente sur les prix : ceux-ci étaient augmentés en cas de hausse des cours du baril à l’international et non répercutés en cas de baisse.

Le Conseil de la concurrence s’est saisi de l’affaire et a conclu en juillet 2020 qu’il existait une entente entre géants pétroliers. Des sanctions ont été infligées aux trois leaders du marché, Afriquia, le Français Total et l’Anglo-Néerlandais Shell. Mais celles-ci n’ont pas été appliquées, après la nomination par Mohammed VI d’une commission pour statuer sur les « éventuelles ententes des sociétés pétrolières et le groupement des pétroliers du Maroc », dessaisissant ainsi le Conseil du dossier.

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