Attaque contre des Kurdes à Paris : motivation raciste du suspect, violences à la marche d’hommage
Au lendemain de l’attaque, le parquet de Paris a annoncé que « le mobile raciste des faits » avait été « ajouté » à l’enquête ouverte pour assassinats, tentatives d’assassinats, violences avec arme, et infractions à la législation sur les armes.
Le suspect de 69 ans, un conducteur de train à la retraite de nationalité française, a fait feu à plusieurs reprises, vendredi peu avant midi devant un centre culturel kurde, situé dans un quartier commerçant animé et prisé de la communauté kurde dans le centre de Paris.
Trois personnes, deux hommes et une femme, ont été tuées et trois autres hommes blessés, dont un sérieusement, selon le dernier bilan.
Maîtrisé par plusieurs personnes avant l’intervention de la police, l’homme, qui avait déjà commis des violences avec arme par le passé, a indiqué lors de son interpellation avoir agi parce qu’il était « raciste », a rapporté une source proche du dossier.
A côté du suspect, a été découverte « une mallette » contenant « deux ou trois chargeurs approvisionnés, une boîte de cartouches calibre 45 avec au moins 25 cartouches à l’intérieur », selon la source proche du dossier. L’arme utilisée est un « Colt 45 de 1911 » de l’armée américaine « d’apparence usée ».
« Assassinats politiques »
La femme tuée, Emine Kara, était une responsable du Mouvement des femmes kurdes en France, selon le Conseil démocratique kurde en France (CDK-F). Elle avait fait une demande d’asile politique « rejetée par les autorités françaises », a précisé vendredi devant la presse le porte-parole du mouvement, Agit Polat.
Les deux hommes décédés sont Abdulrahman Kizil, « un citoyen kurde ordinaire », et Mir Perwer, un artiste kurde reconnu comme réfugié politique et « poursuivi en Turquie pour son art », selon le CDK-F.
Une source policière a confirmé les identités d’Emine Kara et Abdulrahman Kizil.
Samedi matin, le préfet de police de Paris Laurent Nuñez a reçu des responsables de la communauté kurde.
Un hommage aux victimes, rassemblant plusieurs milliers de personnes à Paris, a dégénéré en début d’après-midi.
Au moins quatre voitures ont été renversées, dont au moins une incendiée, et des poubelles brûlées. Quelques dizaines de manifestants ont jeté des projectiles sur les forces de l’ordre qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogènes. « Vive la résistance du peuple kurde », criaient plusieurs d’entre eux.
À Marseille, 1 500 personnes, selon la préfecture de police, ont défilé dans le calme.
La piste d’un attentat terroriste a été écartée à ce stade des investigations, suscitant l’incompréhension et la colère du CDK-F.
« Le fait que nos associations soient prises pour cible relèvent d’un caractère terroriste et politique », a déclaré Agit Polat après sa rencontre avec le préfet de police. « Nul doute pour nous que ce sont des assassinats politiques ».
Antécédents judiciaires
Le suspect, qui fréquentait un stand de tir, a « voulu s’en prendre à des étrangers » et « manifestement agi seul », avait estimé vendredi le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
« Il n’est pas sûr que le tueur qui a voulu assassiner ces personnes l’ait fait spécifiquement pour les Kurdes », avait-il souligné.
« Rien ne permet à ce stade d’accréditer une quelconque affiliation de cet homme à un mouvement idéologique extrémiste », avait pour sa part indiqué la procureure de Paris Laure Beccuau.
Il est inconnu des services de renseignements et « n’était pas fiché comme étant quelqu’un de l’ultradroite », selon Gérald Darmanin.
Le tireur présumé est mis en examen depuis décembre 2021 pour violences avec armes, avec préméditation et à caractère raciste, et dégradations pour des faits commis le 8 décembre 2021.
Il est soupçonné d’avoir blessé à l’arme blanche des migrants sur un campement à Paris et d’avoir lacéré leurs tentes.
Après un an en détention provisoire, il a été remis en liberté le 12 décembre, comme l’exige la loi française, et placé sous contrôle judiciaire, selon la procureure.
Il a en outre été condamné en 2017 à six mois de prison avec sursis pour détention prohibée d’armes et, en juin dernier, à douze mois d’emprisonnement pour des violences avec armes commises en 2016.
Le matin des faits, « il n’a rien dit en partant […] Il est cinglé. Il est fou », a déclaré à l’AFP le père du suspect âgé de 90 ans, le décrivant comme « taiseux » et « renfermé ».
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