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Élection présidentielle en Turquie : troisième mandat pour Erdoğan, qui s’assure cinq ans de plus au pouvoir

Il a transformé la Turquie comme nul autre depuis Mustafa Kemal Atatürk, le fondateur de la République dont il a déjà largement battu le record de longévité. Recep Tayyip Erdoğan, au pouvoir depuis deux décennies, a été réélu dimanche pour cinq ans
« Cette élection a montré que personne ne peut attaquer les acquis de cette nation », a déclaré Recep Tayyip Erdoğan dimanche soir (capture d’écran)
« Cette élection a montré que personne ne peut attaquer les acquis de cette nation », a déclaré Recep Tayyip Erdoğan dimanche soir (capture d’écran)
Par AFP

« Le vainqueur de cette élection est l’ensemble de la nation turque forte de 85 millions d’habitants », a déclaré Recep Tayyip Erdoğan sur le toit d’un bus garé devant sa résidence à Istanbul vers laquelle a convergé une foule enthousiaste.

Au soir du second tour de la présidentielle en Turquie, qui confirme une volonté de stabilité de la part de la population, le président sortant a revendiqué la victoire.

« Nous tiendrons toutes nos promesses faites au peuple », a lancé le chef de l’État, au pouvoir depuis vingt ans, affirmant que « chaque élection est une renaissance. Cette élection a montré que personne ne peut attaquer les acquis de cette nation », a-t-il poursuivi. 

Selon les résultats portant sur plus de 98 % des bulletins, publiés par l’agence officielle Anadolu, le chef de l’État a obtenu 52,1 % des suffrages contre 48 % à son rival social-démocrate Kemal Kılıçdaroğlu, qui a perdu le pari de l’alternance et de la « démocratie apaisée » qu’il promettait.

Dans des remarques télévisées après sa défaite, Kılıçdaroğlu a déclaré : « Cette élection a clairement indiqué que la nation a une réelle volonté de combattre et de changer le gouvernement autocratique ».

Bien que l’avenir de cet homme de 74 ans soit incertain, le chef du Parti républicain du peuple (CHP) a déclaré : « Je continuerai mon chemin ».

Des rassemblements spontanés se sont formés partout dans les villes où le Reis (chef) a triomphé, en particulier au cœur de l’Anatolie.

De retour à Ankara au cœur de la nuit, fêté en rock star par une foule de dizaines de milliers de partisans qui l’attendait depuis des heures devant le palais présidentiel, le chef de l’État n’a pas manqué de faire huer son adversaire malheureux.

Le premier tour le 14 mai, qui avait donné une avance de 9,5 % au président sortant, s’était déroulé de manière « compétitive » mais « limitée », du fait de « l’avantage injustifié » accordé par les médias officiels, avait estimé la mission commune de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l’Europe.  

Dimanche, après la fermeture des votes, la commission électorale a assuré n’avoir pas relevé d’incidents.

En dépit d’un fort désir de changement d’une partie de l’électorat, le chef du Parti de la justice et du développement (AKP), 69 ans, partait favori avec cinq points d’avance à l’issue du premier tour du 14 mai, où il avait recueilli 49,5 % des suffrages.

Veiller sur les urnes jusqu’aux résultats définitifs

Visage fatigué, se déplaçant avec lenteur, Recep Tayyip Erdoğan a voté à la mi-journée dans le quartier d’Üsküdar sur la rive asiatique d’Istanbul : une foule enjouée l’y attendait, à laquelle les gardes du corps ont distribué des jouets tandis que le président glissait quelques billets de banque à des enfants.

« Aucun pays au monde ne connaît des taux de participation de 90 %, la Turquie les a presque atteints. Je demande à mes concitoyens de venir voter sans faiblir », a-t-il fait valoir.

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Au premier tour, la participation avait atteint 87 %.

Presque simultanément, tout sourire malgré les pronostics défavorables, Kemal Kılıçdaroğlu déposait son bulletin à Ankara en incitant ses concitoyens à voter « pour se débarrasser d’un gouvernement autoritaire ».

Les deux candidats ont appelé leurs partisans à veiller sur les urnes jusqu’aux résultats définitifs. « Il est maintenant temps de protéger la volonté de notre nation au-dessus de nos têtes jusqu’au dernier moment ! », a tweeté Erdoğan immédiatement après la fermeture des bureaux de vote.

Son camp n’a eu de cesse de qualifier l’opposition emmenée par Kiliçdaroglu de « terroriste » en raison du soutien que lui ont apporté les responsables du parti pro-kurde HDP.

Au soir du premier tour, les premiers résultats avaient fait l’objet de nombreuses contestations verbales de la part de l’opposition qui a, cette fois, décidé de poster cinq scrutateurs devant chaque urne, soit un million d’observateurs à travers le pays.

Pas plus que lors de la campagne du premier tour, l’économie ne s’est imposée dans le débat national malgré une inflation autour de 40 % et la dégringolade de la monnaie nationale qui impacte fortement le pouvoir d’achat de la population.

Même les zones dévastées par le séisme du 6 février, qui a fait au moins 50 000 morts et trois millions de déplacés, avaient massivement accordé leur confiance au chef de l’État qui a multiplié les largesses et les promesses de reconstruction. 

Faute d’accès aux grands médias et surtout aux chaînes de télévision officielles, Kemal Kılıçdaroğlu a bataillé sur Twitter quand ses partisans tentaient de remobiliser les électeurs par du porte-à-porte dans les grandes villes.

L’émir du Qatar, Tamim ben Hamad al-Thani a été premier à féliciter Erdoğan. Le président russe Vladimir Poutine, qui n’avait pas caché son soutien au président, a rapidement salué un « résultat logique » de même que le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a dit espérer « renforcer ses liens avec Ankara ».

Premier des dirigeants occidentaux, le président français Emmanuel Macron a également « félicité » Erdoğan, suivi par le chancelier allemand Olaf Scholz et les responsables de l’Union européenne Ursula Von der Leyen et Charles Michel, notamment.

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