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Maroc : Omar Radi juge sa condamnation « disproportionnée »

Condamné à quatre mois de prison avec sursis pour un tweet fustigeant la justice, le journaliste Omar Radi, contacté par MEE, dénonce un verdict injuste et fait appel
« J’ai décidé de faire appel en maintenant la même stratégie de défense. En tant que journaliste, je dois être poursuivi en vertu du code de la presse », a déclaré Omar Radi à Middle East Eye (Twitter)

Poursuivi pour « outrage à magistrat », le journaliste et militant marocain Omar Radi a été condamné mardi 17 mars à quatre mois de prison avec sursis et 500 dirhams d’amende (près de 50 euros). Une sentence « disproportionnée », réagit Omar Radi, joint par Middle East Eye : « Je ne m’y attendais pas car il y avait des indices d’apaisement. Je m’attendais à un acquittement, au pire à une amende. » 

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Convoqué le 26 décembre par la police judiciaire, le journaliste avait été, le jour même, présenté devant le procureur du roi avant d’être placé en détention et poursuivi dans le cadre d’une comparution immédiate pour « outrage à magistrat ».

 

Après une mobilisation importante de la société civile, des médias et des réseaux sociaux, le journaliste s’était vu accorder la liberté provisoire le 31 décembre, après cinq jours passés en prison.

Le chef d’accusation d’outrage à magistrat se fondait sur un tweet, publié en avril 2019, dans lequel Omar Radi critiquait le verdict sévère rendu contre des militants du hirak rifain : « Lahcen Talfi, juge de la cour d’appel, bourreau de nos frères, souvenons-nous bien de lui. Dans beaucoup de régimes, les petits bras comme lui sont revenus supplier après en prétendant ‘’avoir exécuté des ordres’’. Ni oubli ni pardon avec ces fonctionnaires sans dignité ! »

« J’ai été surpris par le verdict. Il devait être innocenté. Il n’y a pas d’outrage dans son tweet mais plutôt un soutien aux détenus des hirak. Et il s’est exprimé en tant que journaliste, il aurait dû ainsi être poursuivi selon le code de la presse et non selon le code pénal », souligne à MEE son avocat, Miloud Kandil.

Le journaliste a en effet été condamné en vertu du code pénal qui, dans son article 263, punit d’un mois à un an d’emprisonnement et d’une amende de 250 à 5000 dirhams quiconque est jugé coupable d’« outrage » à un magistrat. Entré en vigueur en 2016, le nouveau code de la presse, lui, ne prévoit pas de peine de prison à l’encontre des journalistes.

« C’est complètement injuste. D’autant que les éléments censés constituer le fait qu’on lui reproche ne sont pas réunis. Le juge part du principe qu’il y a l’intention d’outrager, ce qui est faux. Mon client affirme lui-même que le tweet ne visait pas tant le magistrat que la condamnation par la justice de membres du hirak », poursuit Me Kandil.

« J’ai décidé de faire appel en maintenant la même stratégie de défense. En tant que journaliste, je dois être poursuivi en vertu du code de la presse », insiste Omar Radi.

Fin décembre, Sarah Leah Whitson, directrice du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord à Human Rights Watch, avait appelé à l’abandon des poursuites contre le journaliste, qui « empestent la vengeance ».

Traduction : « Emprisonné pour un tweet ! Le Maroc devrait immédiatement libérer Omar Radi et abandonner ses poursuites contre lui, qui empestent la vengeance politique contre son journalisme critique et son activisme. »

Omar Radi a été poursuivi pour « outrage à magistrat » quelques jours après son retour d’Alger, où il avait tenu au micro de Radio M des propos critiques envers le pouvoir.

Dans le dernier classement annuel de Reporters sans frontières (RSF) sur la liberté de la presse, le Maroc figure à la 135e position sur 180 pays.

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