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Le retrait émirati, un nouveau chapitre de la guerre au Yémen ?

Les EAU retirent leurs troupes de la côte occidentale du Yémen, mais des combattants yéménites sont intervenus pour les remplacer
Des combattants émiratis des forces de la coalition soutenue par l’Arabie saoudite, sur la ligne de front de la côte ouest du Yémen, montent à bord d’un hélicoptère sur une base militaire à Khokha, à 100 km au sud de la ville portuaire de Hodeida, sur la mer Rouge, le 20 janvier (AFP)
Par Correspondant de MEE à SANAA, Yémen

Le 8 juillet, les Émirats arabes unis (EAU) ont annoncé qu’ils limitaient leur engagement militaire au Yémen, s’engageant à réduire le nombre de soldats qu’ils avaient déployés dans ce pays ravagé par la guerre.

Les EAU sont impliqués militairement au Yémen depuis 2015 en tant que membre de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite qui lutte contre les Houthis et soutient le président yéménite en exil Abd Rabbo Mansour Hadi.

La récente annonce a été faite quand un porte-parole à Abou Dabi a déclaré aux journalistes que le pays passait au Yémen d’une « stratégie militaire d’abord » à une « stratégie de paix d’abord ».

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Cependant, les Yéménites qui ont parlé à Middle East Eye semblent croire que cette décision était peut-être plus motivée par le manque de soutien civil et les luttes de pouvoir entre milices susceptibles de dégénérer davantage maintenant que les EAU sont sur le chemin de la sortie.

Après la prise des zones de Moka, Khokha et autres sur la côte ouest au début de 2017 par la coalition dirigée par l’Arabie saoudite, les EAU sont devenus de fait la puissance dirigeante dans la région entre les provinces de Hodeida et Ta’izz.

Les Émirats ont formé les forces yéménites sur la côte ouest sous le nom d’al-Amaliqa, ainsi que les combattants fidèles à Tareq Saleh, le neveu de l’ancien président yéménite Ali Abdallah Saleh.

Les deux groupes ont uni leurs forces dans l’ouest du Yémen sous le nom de « Gardes de la République » et agissaient aux côtés des EAU.

« Les forces yéménites [pro-Hadi] sont suffisamment qualifiées »

La récente décision émiratie de réduire sa présence sur la côte ouest est liée au rôle accru de ces forces yéménites amies.

« Les dirigeants des forces émiraties au Yémen ont décidé de réduire le nombre de combattants émiratis sur la côte ouest et ils ont quitté un camp à Khokha, mais cela ne signifie pas qu’ils se sont retirés de la bataille », confirme à MEE une source au sein des forces d’al-Amaliqa à Moka. 

« Les forces émiraties ont entraîné les forces yéménites et nous combattons sur le terrain sous la supervision d’officiers émiratis sur la côte ouest et à Aden. »

Pendant ce temps, les forces saoudiennes et soudanaises restent présentes sur la côte ouest

Selon notre source, les EAU auraient dû restreindre leur présence dans l’ouest du Yémen il y a au moins un an, faisant valoir que les forces yéménites pro-Hadi étaient suffisamment formées et équipées pour combattre et défendre la côte ouest contre les Houthis.

« Il est irrationnel que les soldats émiratis combattent sur les lignes de front alors que les Yéménites ne le font pas. Nous pouvons défendre notre pays et nous n’avons besoin que d’instructions et de suggestions de la part des experts militaires émiratis », ajoute-t-il.

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« Les Houthis ont essayé de nous attaquer, mais nous avons pu gérer toutes les attaques seuls sans l’aide des forces émiraties », affirme la source d’al-Amaliqa. « Les récentes attaques des Houthis ont confirmé que les forces yéménites [pro-Hadi] sont suffisamment qualifiées pour mener seules les batailles contre les Houthis. »

Pendant ce temps, les forces saoudiennes et soudanaises restent présentes sur la côte ouest et ont également été impliquées dans de violents combats en cours dans la région depuis que les troupes émiraties ont commencé à se retirer – bien que selon la source d’al-Amaliqa, elles surveillent principalement les combattants yéménites et ne sont pas impliquées dans des batailles directes.

Contrôle à distance

Les soldats émiratis quittent peut-être la côte ouest mais les habitants yéménites pensent que ce petit pays du Golfe reste la principale puissance qui contrôle la région.

« Nous ne voyons pas les combattants émiratis dans les rues, mais nous pouvons voir leurs drapeaux sur les institutions publiques et chaque jour nous faisons face aux forces yéménites sur le terrain qui sont pires que les Émiratis », souligne Ali, un habitant de Moka, à MEE.

« Les Émirats pillent nos richesses pendant que nos enfants meurent de faim »

- Ali, un habitant de Moka

« Les forces émiraties pensent que nous allons croire que les Yéménites ont pris le contrôle de la côte ouest », ajoute-t-il. « Mais nous savons tous que les forces émiraties se sont retirées après avoir placé leurs pions [les forces yéménites pro-Hadi] le long de la côte ouest. »

De nombreux habitants de la région apprécient peu les EAU, surtout après l’interdiction faite aux aux pêcheurs de naviguer ou de pêcher au large des côtes plus tôt cette année.

« Les Émirats pillent nos richesses pendant que nos enfants meurent de faim », déplore Ali. « Les Émiratis contrôlent toujours à distance la côte ouest et la plupart des provinces du sud, et personne ne peut s’y opposer. »

Alors qu’à Abou Dabi, les autorités ont évoqué le passage à une « stratégie de paix d’abord », les civils yéménites déclarent qu’ils n’ont pas une impression de paix sur la côte ouest avec les combats qui font toujours rage.

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Salem Abu al-Leil, un habitant de la province de Hodshaeida, rapporte que les combats n’ont pas ralenti à Hodeida et qu’il ne prévoit aucun progrès vers la paix dans la province.

« Nous avons entendu dire que les forces émiraties se sont retirées de Hodeida, mais… le seul développement est que les Yéménites combattent désormais les uns contre les autres de sorte que les Émirats ne perdent plus de combattants », relève Abu al-Leil à MEE.

« Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un pas vers la paix, mais il peut s’agir d’une nouvelle stratégie de guerre de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite. »

Pour Abu al-Leil, le manque de soutien populaire envers les EAU parmi les habitants de Hodeida et des environs a été un facteur qui a conduit le pays à croire que la meilleure ligne de conduite serait de remplacer ses forces par des groupes yéménites plus susceptibles d’être acceptés par les habitants.

Difficultés de la coalition

Ziyad al-Sharif, un combattant pro-EAU à Aden, explique à MEE qu’il voit la décision émiratie comme un premier pas vers la paix, avec d’autres qui suivront dans les prochains mois – avant d’accuser le mouvement Islah (affilié aux Frères musulmans) d’être derrière les critiques des EAU, bien qu’il soit également accusé d’être du côté du président Hadi.

« Les membres d’Islah et leurs partisans critiquent les Émirats quel que soit le développement, même si c’est positif », estime Sharif. « Les Émirats arabes unis réduisent leurs troupes au Yémen pour permettre aux Yéménites de mener les batailles et il n’y a rien de mal à cela. »

« Les membres d’Islah et leurs partisans critiquent les Émirats quel que soit le développement, même si c’est positif »

- Ziyad al-Sharif, un combattant pro-EAU à Aden

Il s’en prend aux critiques d’Islah qui saperaient la coalition pro-Hadi, ce qui bénéficierait en fin de compte aux Houthis.

« Le parti Islah et les Houthis sont du même côté pour critiquer et combattre la légitimité [de Hadi], que les Émirats arabes unis sont venus soutenir », ajoute Sharif. « Les Émirats arabes unis sont venus aider les Yéménites, pas nous tuer, mais les partisans d’Islah n’y croient pas. »

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Pendant ce temps, Mohammed Ali, journaliste chevronné basé à Ta’izz, rapporte à MEE que le retrait des EAU pourrait être lié à des tensions croissantes entre les forces séparatistes du sud et les combattants de Tareq Saleh dans l’ouest.

« Les forces du Sud soutenues par les EAU étaient la principale puissance sur la côte ouest, mais le président Hadi a envoyé les forces de Tareq l’année dernière dans les mêmes zones », precise-t-il.

« Les forces du sud n’ont pas accueilli favorablement les forces de Tareq et inversement. Bien que les deux soutiennent les EAU, il était difficile pour les Émirats de rester sur la côte ouest. »

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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