Amnesty International appelle le Maroc à ne pas extrader vers la Chine un Ouïghour
Amnesty International a appelé, mardi 27 juillet, les autorités marocaines à ne pas expulser Idris Hasan, un Ouïghour de souche, vers la Chine, « où il risque d’être torturé », d’après un communiqué de l’ONG.
Selon Amnesty, « Hasan, 34 ans, père de trois enfants, a été arrêté après avoir pris l’avion pour le Maroc depuis la Turquie la semaine dernière, et emmené dans une prison près de la ville de Tiflet. Il a téléphoné à sa femme Zaynura vendredi dernier [23 juillet] et lui a dit qu’il pensait qu’il serait bientôt expulsé vers la Chine ».
L’épouse de Hasan a déclaré à l’ONG que son mari lui avait dit : « S’il vous plaît, soyez rapides, ou ils vont me renvoyer en Chine. »
Hasan, informaticien, possède la nationalité chinoise et un permis de séjour turc. Amesty dit ne plus avoir de ses nouvelles depuis ce vendredi, et pense qu’il risque d’être détenu arbitrairement et torturé s’il est renvoyé de force en Chine.
« Les autorités marocaines doivent garantir à Idris Hasan un accès immédiat à un avocat, la possibilité de contester toute mesure d’éloignement, et permettre à sa famille de le contacter pour assurer sa sécurité », a déclaré Joanne Mariner, directrice du programme de réponse aux crises d’Amnesty.
Une notice rouge d’Interpol
« Expulser Idris Hasan vers la Chine, où les Ouïghours et d’autres minorités ethniques sont confrontés à une horrible campagne d’internement de masse, de persécution et de torture, violerait le droit international », poursuit Joanne Mariner.
La Direction générale de la sûreté nationale du Maroc (DGSN) a indiqué, selon Associated Press, qu’un citoyen chinois avait été arrêté le 20 juillet à son arrivée à l’aéroport international Mohammed V de Casablanca à bord d’un vol en provenance d’Istanbul.
Selon la DGSN, l’homme « faisait l’objet d’une notice rouge émise par Interpol en raison de son appartenance présumée à une organisation figurant sur les listes d’organisations terroristes ».
La notice rouge, soit l’équivalent d’être inscrit sur la liste des personnes les plus recherchées par Interpol, a été émise à la demande de la Chine, qui demande son extradition, a indiqué la direction de la sûreté citée par AP, ajoutant que les autorités marocaines avaient informé Interpol et les autorités chinoises de l’arrestation, et que le citoyen chinois avait été déféré devant le parquet en attendant la procédure d’extradition.
Pour Amnesty, « le principe de non-refoulement garantit que personne ne doit être renvoyé dans un pays où il serait exposé à un risque réel de torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et d’autres violations graves des droits humains ».
« Idris Hasan vit en Turquie depuis 2012, explique Amnesty, avec sa femme Zaynura et leurs trois enfants. Sa femme et ses enfants ont un permis de séjour permanent en Turquie, mais son permis de séjour est classé comme ‘’humanitaire’’. »
Hasan peut courir un réel danger en Chine, puisque « le gouvernement chinois [le] considérerait comme un ‘’terroriste’’, en raison du travail qu’il a déjà effectué pour des organisations ouïghoures. La loi chinoise définit le ‘’terrorisme’’ et ‘’l’extrémisme’’ de manière trop large et vague, et [cela] a été utilisé pour réprimer les Ouïghours et d’autres minorités ethniques ».
Le mois dernier, Amnesty International a publié un rapport révélant comment des centaines de milliers d’hommes et de femmes musulmans dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang en Chine sont soumis à des détentions arbitraires massives, à l’endoctrinement et à la torture.
« Dans le rapport de 160 pages intitulé ‘’Comme si nous étions ennemis de guerre : internements, torture et persécutions perpétrés à une échelle massive contre les musulmans du Xinjiang’’, l’équipe d’intervention en cas de crise d’Amnesty International a publié des dizaines de nouveaux témoignages d’anciens détenus détaillant les mesures extrêmes prises par les autorités chinoises depuis 2017 pour essentiellement éradiquer les croyances et traditions religieuses islamiques, ainsi que les pratiques culturelles et les langues locales des groupes ethniques musulmans de la région », rappelle Amnesty.
L’ONG a également lancé une campagne appelant à la fermeture des camps d’internement, avec plus de 60 dossiers détaillés sur certains de ceux qui seraient actuellement détenus.
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