Algérie : le mouvement séparatiste MAK ciblé par les autorités
Un journaliste du quotidien francophone algérien Liberté a été écroué mardi soir pour « appartenance à une organisation terroriste » et « diffusion de fausses informations », ont indiqué une association de défense des détenus et un avocat.
Mohamed Mouloudj a été « placé sous mandat de dépôt » par un juge d’instruction du tribunal de Sidi Mhamed, à Alger, selon le Comité nationale pour la libération des détenus (CNLD).
Le journaliste est poursuivi pour « atteinte à l’unité nationale, appartenance à une organisation terroriste et diffusion de fausses informations », a précisé l’avocat Abdelghani Badi sur Facebook.
Il avait été arrêté dimanche et son domicile perquisitionné, selon la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH).
Six autres personnes, arrêtées pour la même affaire, ont également été placées en détention provisoire après avoir été entendues par le juge d’instruction, a précisé le CNLD.
Lundi soir, la gendarmerie avait annoncé l’arrestation de seize membres présumés du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), un groupe séparatiste considéré comme terroriste par les autorités.
Les arrestations se sont tenues dans le cadre des enquêtes sur les feux de forêt survenus en août en Kabylie et le lynchage à mort de Djamel Bensmaïl, soupçonné à tort de pyromanie dans cette région du nord-est.
« Les arrestations tous azimuts se poursuivent à une cadence soutenue et font régner un climat de terreur. La psychose s’installe notamment en Kabylie où plusieurs arrestations sont opérées. Alors que la région peine à se relever du drame des feux de forêt, les citoyens sont plongés dans une extrême tension due aux arrestations quotidiennes. Des militants, hirakistes ou de simples citoyens ayant exprimé un simple avis ou une opinion discordante sont interpellés, arrêtés et mis, le plus souvent, sous mandat de dépôt », s’inquiète le quotidien Liberté.
« L’approche du tout-sécuritaire »
« L’offensive lancée contre le MAK dépasse cependant à l’évidence le cadre de l’enquête qui se mène au sujet des incendies. Tout au long des jours derniers, plusieurs arrestations ont été opérées dans des milieux ciblés. La présidente du Congrès amazigh et cinq autres personnes présentées comme étant des éléments importants de l’organisation ont été placées en garde à vue, avant d’être placées sous mandat de dépôt. Kamira Naït Sid est poursuivie pour atteinte à l’unité nationale et appartenance à une organisation terroriste », précise, pour sa part Le Soir d’Algérie.
Un autre journaliste algérien, Hassan Bouras, arrêté le 6 septembre, a été formellement placé en détention provisoire dimanche, notamment pour « apologie du terrorisme », selon ses avocats.
Mardi, le journaliste Fodil Boumala, activiste en vue du hirak, a été arrêté et son domicile perquisitionné, il a été présenté ce jeudi devant le parquet du tribunal de Sidi M’Hamed à Alger-Centre. Pour rappel, Boumala avait été emprisonné de septembre 2019 à mars 2020 pour « incitation à attroupement non armé », puis, trois mois après sa relaxation, il a été placé 24 heures en détention provisoire pour « atteinte à un corps constitué » et « publications pouvant porter atteinte à l’intérêt national ».
« L’adoption de l’approche du tout-sécuritaire pour faire face à la crise politique ne fera que creuser davantage le fossé de la confiance, alimenter les tendances extrémistes et augmenter la tension, ce qui aggraverait encore la situation », a dénoncé le Front des forces socialistes (FFS).
« Notre pays, qui fait face à une situation difficile et aborde d’énormes défis à tous les niveaux, a besoin de sagesse et d’instauration d’un climat de calme et de sérénité », a insisté le FFS, un des partis de l’opposition qui vient de décider de participer aux élections locales prévues le 27 novembre prochain.
De son côté, le Parti des travailleurs (PT) a réitéré « sa mise en garde contre le recours à l’amalgame et la généralisation dans la lutte contre le terrorisme et rappel[é] que des milliers d’Algériens innocents ont été victimes de ce type de pratiques, ce qui a prolongé la guerre de décomposition et alimente le terrorisme ».
« Il n’est donc point responsable de procéder à des arrestations à la hussarde et des condamnations irrationnelles pour appartenance à ce mouvement marginal [le MAK]. Ce qui de fait le victimise. En vérité, ce cours ressemble de plus en plus à une campagne de publicité en faveur de ce mouvement, comme cela s’est produit au début des années 1990 », poursuit le PT, faisant un parallèle avec la mouvance islamiste radicale qui déclencha une insurrection dès 1992 après l’annulation des législatives portant l’ex-FIS au pouvoir.
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