Peines de prison en série pour les militants des droits de l’homme au Maroc
Un tribunal marocain a condamné vendredi 29 avril la militante des droits humains Saïda El Alami à deux ans de prison ferme notamment pour « outrage envers un corps constitué », a-t-on appris auprès de sa défense.
Placée en détention depuis le 23 mars, Saïda El Alami, qui se présente comme une « dissidente politique » sur Facebook, postait régulièrement des publications critiques à l’encontre des autorités sur les réseaux sociaux.
Cette femme de 48 ans, active sur les réseaux sociaux, était poursuivie pour « outrage envers un corps constitué », « outrage envers des fonctionnaires publics dans l’exercice de leurs fonctions », « atteinte à la justice » et « diffusion de fausses allégations ».
« Le tribunal de première instance de Casablanca a condamné Saïda El Alami à deux ans de prison ferme, une peine assortie d’une amende de 5 000 dirhams [près de 474 euros] », a déclaré à l’AFP son avocate Souad Brahma, qui compte faire appel.
Membre du collectif « Femmes marocaines contre la détention politique », la militante a affiché son soutien à des journalistes et activistes marocains condamnés par la justice, comme Omar Radi, début mars, et Soulaimane Raissouni, fin février.
« Accusations forgées de toutes pièces »
Le procureur l’a également interrogée au sujet de ses publications sur les réseaux sociaux, en particulier d’un post sur Facebook du 22 mars dans lequel elle critiquait le directeur de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) et de la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST) pour avoir envoyé des agents interroger ses voisins à son sujet alors qu’elle était sortie.
Dans un autre post Facebook publié le 20 janvier, sur lequel s’appuient également les poursuites, Saïda El Alami dénonçait la corruption au sein de la justice.
« Les autorités marocaines harcèlent et intimident les militants par le biais d’informations judiciaires infondées »
- Amna Guellali, directrice adjointe pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International
Amnesty International a dénoncé récemment dans un communiqué un « durcissement du harcèlement visant les défenseurs des droits humains » au Maroc, citant notamment le cas de Saïda El Alami.
« Les autorités marocaines harcèlent et intimident les militants par le biais d’informations judiciaires infondées et d’accusations forgées de toutes pièces, en vue de faire taire les voix critiques et de faire barrage au militantisme pacifique », a ainsi déclaré Amna Guellali, directrice adjointe pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International.
Dès son incarcération, Saida El Alami a entamé une grève de la faim.
Série noire pour les activistes
Amnesty rappelle également que, le 26 mars, « les forces de police ont également arrêté le blogueur Mohamed Bouzlouf, qui avait exprimé sa solidarité avec Saïda El Alami sur Facebook ».
Un tribunal de Ouarzazate l’a condamné à deux mois de prison le 4 avril. Par ailleurs, deux autres militants, Abderrazak Boughanbour et Brahim Nafai, font l’objet d’investigations et ont été convoqués pour interrogatoire au sujet de publications sur Facebook dans lesquelles ils appelaient respectivement à manifester et à un boycott du carburant, dans un contexte de hausses des prix.
Le 17 février, la police marocaine a convoqué pour interrogatoire Abderrazak Boughanbour, ex-président de la Ligue marocaine de la défense des droits de l’homme (LMDDH), précise encore Amnesty. « Cette convocation est survenue après qu’il a partagé une publication à trois reprises sur sa page Facebook, invitant le Front social marocain, coalition d’associations, de mouvements politiques et de syndicats, à se joindre aux manifestations prévues en commémoration du mouvement du 20 février, qui appelait à une réforme politique ».
Lundi, un autre militant marocain des droits humains, Rabie Al Ablaq, a été condamné à quatre ans de prison ferme pour « offense » envers le roi Mohammed VI sur les réseaux sociaux.
Resté en liberté provisoire, il a fait appel du jugement.
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