Les Saoudiens voulaient « sans équivoque » soutenir la privatisation de Tesla, selon Musk
Lors d’un procès très médiatisé qui doit durer trois semaines, Elon Musk a affirmé lundi 23 janvier devant le tribunal fédéral de San Francisco, aux États-Unis, que le fonds souverain de l’Arabie saoudite avait promis de l’aider à privatiser Tesla, son groupe automobile.
Le deuxième homme le plus riche au monde (derrière Bernard Arnault) a assuré que le fonds « voulait sans équivoque soutenir la privatisation de Tesla » en 2018. Interrogé à la barre sur le fait qu’il ne disposait d’aucune preuve écrite, Musk a répondu : « S’ils [les Saoudiens] disent qu’ils vont faire quelque chose, ils le font. Il n’y aucun document signé nulle part. »
Ce procès est intenté par des investisseurs qui prétendent qu’Elon Musk a manipulé le cours de l’action de Tesla en 2018, ce qui leur aurait coûté des milliards de dollars.
Le titre avait bondi dans la foulée des tweets très inhabituels (et le Nasdaq avait temporairement suspendu le cours de l’action Tesla), avant de décliner les jours suivants. Des articles de presse avaient fini par révéler que le patron n’avait pas vraiment les fonds.
Le patron de Tesla avait créé la stupeur le 7 août 2018 en affirmant dans un tweet qu’il voulait retirer son groupe automobile de la bourse au prix de 420 dollars par action, puis en assurant que le financement était « sécurisé ».
Musk a défendu sa position en affirmant que le directeur du fonds souverain saoudien, Yasir al-Rumayyan, avait conclu cet accord d’une « poignée de main », s’engageant à trouver l’argent nécessaire pour retirer Tesla de la bourse.
« Il faut être deux pour danser le tango »
Les messages envoyés par téléphone, contenus dans les dossiers judiciaires et divulgués en avril, montrent comment Musk s’est senti trahi par le fonds public d’investissement après la parution d’un article de Bloomberg disant que les deux parties n’avaient pas réellement conclu d’accord sur Tesla, mais étaient simplement engagées dans des pourparlers.
« Vous vous disiez définitivement intéressés par la privatisation de Tesla et que vous vouliez le faire depuis 2016 », a écrit Musk à Rumayyan dans un échange de SMS le 12 août 2018, se plaignant d’avoir été jeté « sous le bus » par un communiqué « décevant » du fonds public d’investissement, publié en réponse à l’article, selon des documents déposés au tribunal.
« Vous avez également précisé de manière claire que vous étiez le décideur, par ailleurs fortement soutenu par le prince héritier, qui considère cela comme stratégiquement important au niveau national », a ajouté Musk.
Rumayyan a alors répliqué en envoyant un texto au patron de Tesla dans lequel il lui explique qu’il n’avait pas reçu les informations financières nécessaires pour prendre une décision.
« Il faut être deux pour danser le tango », a-t-il écrit. « Regardons les chiffres et amenons nos camps à se rencontrer et à discuter. Nous ne pouvons pas approuver quelque chose sur laquelle nous n’avons pas suffisamment d’informations. »
« Je suis votre ami. Alors, s’il vous plaît, ne me traitez pas comme un ennemi », a ajouté Rumayyan, selon des documents judiciaires.
Le fonds saoudien de 620 milliards de dollars est présidé par le prince héritier Mohammed ben Salmane et est devenu le principal outil du dirigeant de 37 ans pour sortir l’économie du royaume de sa dépendance au pétrole. Le fonds avait déjà acquis 5 % de participations dans Tesla avant que Musk annonce son intention de privatiser l’entreprise.
L’équipe juridique de Musk avait assigné Rumayyan à comparaître, afin de le faire témoigner au procès. Mais les avocats du fonds souverain saoudien ont qualifié les citations à comparaître de « juridiquement déficientes » et de « franchement futiles ».
Musk a comparu devant le tribunal vêtu d’un costume sombre. Il a admis avoir passé une mauvaise nuit de sommeil et a échangé des commentaires avec l’avocat de la partie plaignante au sujet du prix qu’il avait fixé pour les actions de Tesla, de 420 dollars par action.
Aux États-Unis, les chiffres 4 et 20 accolés sont associés à la consommation de cannabis. Quand le milliardaire a proposé de racheter Twitter au printemps dernier, il a choisi un prix de 54,20 dollars par action.
« Avez-vous arrondi à 420 en guise de blague à l’attention de votre petite amie ? », a demandé Nicholas Porritt, le principal avocat des plaignants.
« Ce n’était pas une blague, cela représentait une prime de 20 % au-dessus du prix de l’action », a répondu Elon Musk, reconnaissant cependant qu’il y a « un certain karma autour [du chiffre] 420. »
« Pas sûr que ce soit un bon ou un mauvais karma à ce stade », a-t-il encore plaisanté.
Son avocat Alex Spiro l’a ensuite aidé à dresser le portrait d’un immigré parti de rien, venu aux États-Unis, « là où les grandes choses sont possibles », après une enfance « malheureuse » en Afrique du Sud, selon les mots du milliardaire.
« On m’a traité de fou à de nombreuses reprises », a déclaré Elon Musk après avoir énuméré les entreprises qu’il a cofondées. Mais « à ce stade je crois que j’ai levé plus d’argent que quiconque dans l’histoire », s’est-il vanté, attribuant sa réussite à son « honnêteté » à l’égard des investisseurs.
Traduit de l’anglais (original) et actualisé.
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