Le port de Haïfa, l’Indien Adani et le projet d’Israël pour le Moyen-Orient
« Libérateur ».
C’est ainsi que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a qualifié l’acquisition du port de Haïfa par le magnat indien Gautam Adani.
Aux côtés de ce dernier lors de la cérémonie de signature fin janvier, un Netanyahou souriant a fait l’éloge de cet accord à 1,2 milliard de dollars et a dit espérer que cela engendrerait une plus grande « connectivité entre [leurs deux] pays ».
« Je pense que c’est un événement marquant… Il y a plus de 100 ans, et pendant la Première Guerre mondiale, ce sont de courageux soldats indiens qui ont aidé à libérer la ville de Haïfa. Et aujourd’hui, ce sont des investisseurs indiens très solides qui aident à libérer le port de Haïfa », a proclamé Netanyahou.
Par cet accord, l’un des plus gros investissements étrangers de l’Inde dans un secteur israélien, Adani Ports and Special Economic Zone (APSEZ) a acquis une participation de 70 % dans le port de Haïfa désormais privatisé, tandis que le groupe israélien Gadot a acheté les 30 % restants.
Faisant la une des journaux en Israël comme en Inde, l’accord était censé être un moment historique pour le magnat du charbon, troisième personne la plus riche du monde au début de l’année.
« Le port de Haïfa est un site clé de l’édification de la nation sioniste et israélienne »
- Sharri Plonski, Queen Mary University
Mais quelques jours après la finalisation de l’accord, le vaisseau amiral d’Adani, Adani Group, vacillait sous les accusations de malversations financières, d’opérations frauduleuses et de manipulation du cours des actions.
La valeur de ses entreprises a chuté de façon spectaculaire malgré les 400 millions de dollars injectés par un fonds d’investissement d’Abou Dabi. En l’espace d’un mois, Adani, qui nie ces accusations, est sorti de la liste des dix personnes les plus riches du monde.
Compte tenu de sa proximité avec les décideurs à New Delhi, The Economist a affirmé que c’était « un embarras politique » pour le Premier ministre indien Narendra Modi et qui « met à l’épreuve le capitalisme indien, épreuve la plus rude depuis des années ».
Netanyahou a appelé Modi le 9 février et les deux amis ont discuté pendant une vingtaine de minutes. Bien que les détails de la conversation n’aient pas été divulgués, les deux pays ont réaffirmé leur engagement à renforcer leurs liens et leur partenariat stratégique.
Cette déclaration a semblé apaiser les craintes concernant l’implication d’Adani dans le port de Haïfa et ses liens avec plusieurs entreprises et initiatives israéliennes.
Plus tard, Noar Gilon, ambassadeur d’Israël à New Delhi, a indiqué à la presse locale : « Adani est un acteur très important dans le système portuaire mondial. C’est son cœur de métier. Nous pensons qu’il rendra ce port plus fort. Il a payé ce port.
« Le port appartient [à Adani]. Je crois que l’entreprise a intérêt à ce que ce port soit fructueux, c’est l’espoir d’Israël et dans son intérêt, et c’est aussi dans l’intérêt du groupe Adani. Je crois que ce port va être un port florissant en Méditerranée. »
En d’autres termes, l’affaire était conclue, Haïfa était vendu et les deux parties allaient le faire fonctionner.
L’histoire du port de Haïfa
Situé sur les rives de la Méditerranée, le port de Haïfa est une plaque tournante majeure pour les marins d’Afrique du Nord et d’Asie depuis des centaines d’années.
Sous l’Empire ottoman, il a été un port clé à la pointe nord de la Palestine et un catalyseur de la croissance démographique de la ville.
En 1918, les juifs constituaient moins de 3 000 des 22 000 habitants de la ville. En 1929, sous le Mandat britannique, des travaux ont commencé pour en faire un port en eau profonde à part entière.
Regev Nathansohn et Abbas Shiblak ont noté qu’au cours de cette période, la fin des années 1920 et 1930, Haïfa a prospéré et a été le centre administratif et économique du nord de la Palestine, même si 40 % de la population palestinienne vivait dans des quartiers pauvres.
« La ville est devenue un pôle d’attraction, attirant des entrepreneurs arabes et de la main-d’œuvre des pays voisins et d’ailleurs, et elle offrait de plus en plus de diversité par rapport à “l’autre”, ainsi qu’une ouverture et une tolérance envers les nouveaux arrivants », écrivent Nathansohn et Shiblak dans Haifa Before & After 1948: Narratives of a Mixed City.
Dans le même temps, la ville a également été témoin d’une campagne clivante pour l’établissement d’un « foyer national juif ».
« Depuis lors, le port de Haïfa est un site clé de l’édification de la nation sioniste et israélienne », explique à Middle East Eye Sharri Plonski, maîtresse de conférences à l’Université Queen Mary.
« C’était aussi le port d’attache des missions clandestines du “Palyam”. Ces milices navales pré-étatiques étaient connues pour leur sabotage des navires britanniques et leurs “sauvetages audacieux” de réfugiés juifs des camps de détention britanniques dans les années 1940 », ajoute cette dernière.
En 1947, la présence juive avait augmenté et constituait environ la moitié des 140 000 habitants de la ville. Dans le cadre du plan de partition de l’ONU, Haïfa a été désignée comme faisant partie du nouvel État d’Israël et a été témoin d’une violence intense lorsque les Palestiniens ont commencé à être expulsés en 1948.
Les milices sionistes ont déplacé des dizaines de milliers de Palestiniens de la ville et des environs lors d’un événement que les Palestiniens appellent la Nakba, ou catastrophe.
Le 30 juin 1948, le drapeau britannique a été retiré du port.
« Haïfa était historiquement un port stratégique dans le passé. C’était là que le pétrole arrivait d’Irak. [Les Britanniques] l’ont perdu lors de la guerre de 1948 », commente à MEE Toufic Haddad, spécialiste des sciences sociales basé à Jérusalem.
« En matière de port fiable pour les intérêts occidentaux en Méditerranée orientale, Israël est le principal bastion et Haïfa est important », poursuit-il.
Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, Haïfa est restée un point d’entrée clé pour des milliers de réfugiés et de colons juifs venus d’Europe.
Dans les années 1950, le port s’est développé sous le contrôle de l’État et deviendra plus tard le plus grand et le plus important des trois ports d’Israël, les autres étant Ashdod et Eilat.
Le port de Haïfa fait tellement partie intégrante du PIB d’Israël qu’on estime qu’il traite environ 50 % de toutes les marchandises du pays.
Puis est venu Adani
Au début des années 2000, les délibérations sur la privatisation du port ont commencé dans le cadre d’une série de réformes économiques initiées par Netanyahou, qui a encouragé à plusieurs reprises la vente de biens publics pour prétendument réduire la corruption et les coûts.
En 2015, Shanghai International Port Group (SIPG) a remporté un appel d’offres pour exploiter le terminal Haifa Bayport pendant 25 ans, au grand dam du gouvernement américain.
Lors de sa visite en Israël en mai 2020, Mike Pompeo, alors secrétaire d’État, a appelé Israël à cesser les projets d’infrastructure avec les Chinois.
« Cet accord montre que les Israéliens font suffisamment confiance à l’Inde pour privatiser le port de Haïfa, propriété de l’État, et le confier à des Indiens »
- Hananya Naftali, influenceur israélien
« Nous voulons le succès du peuple chinois, mais nous ne voulons pas que le Parti communiste chinois ait accès aux infrastructures et systèmes de communication israéliens – toutes ces choses qui mettent les citoyens israéliens en danger – et à leur tour mettent en péril la capacité de l’Amérique à travailler aussi aux côtés d’Israël sur d’importants projets », déclarait Pompeo.
Un an plus tard, cependant, les Chinois commençaient les opérations au terminal. Lors de l’ouverture des appels d’offres pour le port de Haïfa, DP World (Dubaï), la Turquie et la Chine ont initialement manifesté leur intérêt, mais les États-Unis ont fait pression contre Beijing pour acquérir le port stratégique et DP World s’est retiré de la course en décembre 2021.
« Tout le monde au port m’a dit qu’ils étaient ravis de l’implication de DP World. Je ne sais pas pourquoi ils se sont retirés », confie Sharry Plonski, de l’Université Queen Mary de Londres.
Dan Catarivas, coordinateur israélien du Forum des PDG Inde-Israël, admet qu’en dépit de l’enthousiasme relatif à la possibilité d’un partenaire arabe à Haïfa, il reconnaît l’existence de rumeurs selon lesquelles l’accord n’a pas abouti en raison du possible risque sécuritaire lié au fait de s’associer à un pays arabe.
Tout cela a créé le scénario parfait pour que les Indiens s’impliquent.
Cependant, quand Adani a soumis son offre avec Gadot, cela a noyé la concurrence.
Elle était supérieure de 55 % à la deuxième offre la plus élevée. Ce n’était pas seulement un achat, c’était une déclaration d’intention.
Adani Group, une société colossale en Inde – impliquée dans la fabrication de panneaux solaires, la distribution de gaz, les usines de traitement de l’eau, les aéroports, mais aussi les services financiers ou encore l’immobilier –, a donné à Israël la confiance qu’un acteur majeur avec le soutien de l’État indien aiderait à réaliser le potentiel du port.
Même alors, l’ampleur de cette offre démesurée a surpris les observateurs.
Aucune entreprise indienne n’avait jamais été aussi aventureuse dans ses achats à l’étranger, commente à MEE Nicolas Blarel, professeur adjoint de relations internationales à l’Institut de sciences politiques de l’université de Leiden aux Pays-Bas.
« Je pense que c’était le plus gros accord [Inde-Israël] que j’ai vu. Il y a eu de gros accords, mais surtout dans le secteur de la défense. Mais dans le secteur privé, c’est complètement nouveau », estime-t-il.
Alors que les liens de l’Inde avec Israël sont en plein essor depuis l’arrivée au pouvoir de Modi en 2014 et que New Delhi fait partie intégrante du bloc américain contre la Chine, l’acquisition semble avoir plu à Washington.
Pour Israël, l’acquisition était une aubaine. Elle aiderait à rétablir le port en tant que plaque tournante clé au Moyen-Orient et offrirait une occasion unique d’établir une route commerciale reliant la Méditerranée et le Golfe, en contournant le canal de Suez.
Adani a promis de « transformer tout le paysage portuaire ».
« Le Haïfa de demain sera bien différent du Haïfa d’aujourd’hui. Avec votre soutien, nous respecterons cet engagement et ferons notre part pour transformer cette ville », a déclaré le président et fondateur du groupe.
MEE a contacté Adani Group à plusieurs reprises, mais n’avait pas reçu de réponse au moment de la publication de cet article.
DP World a refusé de répondre aux questions relatives à son offre.
Relations Inde-Israël
En tant que chef de file du mouvement des non-alignés depuis le début des années 1950, l’Inde post-indépendance a toujours été perçue comme un ami proche du peuple palestinien.
Alors qu’Israël est devenu un État en 1948, New Delhi ne l’a reconnu qu’en 1950. L’Inde a également voté en 1975 à l’ONU la résolution 3379 qui désignait le sionisme comme une forme de racisme.
Mais une fois que l’Inde a normalisé ses relations avec Israël en 1992, les liens ont rapidement évolué.
Trente ans plus tard, New Delhi est désormais le plus gros acheteur d’armes israéliennes, se rapprochant de plus en plus des 2 milliards de dollars par an.
« Il me semble que le soutien passé de l’Inde aux Palestiniens dans le cadre de son rôle de leadership dans les mouvements non alignés et tiers-mondistes a été abandonné il y a déjà un certain temps », fait observer à MEE Sai Englert, maître de conférences en études régionales à l’université de Leiden.
« Sous la direction de Modi, ce processus s’est certainement accéléré, car il a activement cherché à établir des relations avec d’autres régimes répressifs et conservateurs à travers le monde. »
« En ce sens, son rapprochement avec Israël fait partie d’une tendance plus vaste », ajoute-t-il.
Au cours des cinq dernières années, en particulier, des entreprises indiennes comme celle d’Adani ont également commencé à coproduire des armes israéliennes. Il s’agit notamment des fusils d’assaut Tavor X95, des mitrailleuses légères Negev, des fusils de sniper Galil ainsi que des drones Hermes 900 à moyenne altitude et longue endurance.
Les drones Hermes, testés pour la première fois sur des Palestiniens lors du bombardement de Gaza en 2014, sont produits pour les forces armées indiennes ainsi que pour le marché d’exportation.
Et bien que les liens entre les deux pays aient continué à prospérer, l’Inde et Israël signant un partenariat stratégique en 2017, ce sont les accords de normalisation entre des pays arabes et Israël facilités par l’ancien président américain Donald Trump, dénommés « accords d’Abraham », qui ont marqué le début d’un rôle plus important de New Delhi dans la région.
Les liens de l’Inde avec les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et l’Égypte ont également connu plusieurs améliorations depuis les accords d’Abraham.
L’acquisition du port de Haïfa a en outre été promue de manière agressive comme une victoire massive pour l’Inde et Israël.
L’influenceur israélien Hananya Naftali l’a qualifiée de « percée dans notre alliance [avec l’Inde] ».
« Je pense que cet accord montre que les Israéliens font suffisamment confiance à l’Inde pour privatiser le port de Haïfa, propriété de l’État, et le confier à des Indiens », estime-t-il.
Plusieurs observateurs ont également noté que cette acquisition signalait un énorme changement dans les relations avec Israël. Non seulement elle a donné à l’Inde une chance d’étendre son empreinte de l’Asie au Moyen-Orient et en Europe, mais cela a également consolidé la quête de New Delhi pour devenir un acteur économique mondialement respecté.
En effet, le port de Haïfa a placé Adani au centre du commerce entre l’Asie et l’Europe. Les observateurs ont noté que cette décision pourrait faciliter les accords de libre-échange longtemps retardés entre l’Inde et l’Union européenne ainsi qu’avec Israël.
Mais cela contribuera également à élargir les interactions économiques d’Israël avec l’Asie du Sud et l’Asie de l’Est, et plus important encore, à intégrer davantage l’économie israélienne au Moyen-Orient après des années d’isolement de la part de ses voisins.
« L’implication [d’Adani] en Israël, ou dans le port de Haïfa, n’est pas ponctuelle. Cela s’inscrit dans une stratégie du conglomérat visant à amener Israël et l’Inde dans la région du Moyen-Orient », explique Dan Catarivas à MEE.
« Je pense que le port est très important dans la connexion Est-Ouest [pour Adani] et que les choses finiront par évoluer positivement au Moyen-Orient, et le port de Haïfa est une porte d’entrée pour l’Europe depuis le Moyen-Orient et l’Asie. »
« Dans la planification à moyen et long terme d’Adani, il s’agit d’une acquisition stratégique qui s’appuie sur une réflexion géopolitique », poursuit Dan Catarivas.
« Amplifier les mythes »
Lorsque Netanyahou a remis à Adani la clé symbolique du port de Haïfa le 31 janvier, cela avait déjà été le mois le plus meurtrier pour les Palestiniens depuis 2015.
Au moins 35 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes rien qu’en janvier de cette année.
Cela faisait suite à l’année la plus meurtrière pour les Palestiniens depuis la fin de la deuxième Intifada en 2005. Environ 220 Palestiniens, dont 48 enfants, ont été tués en 2022.
Lors de la cérémonie de signature, Gautam Adani s’est concentré sur une seule chose : faire l’éloge d’Israël.
« Israël m’a toujours motivé ; vous avez réécrit les règles en ce qui concerne ce qu’une population de moins de 10 millions d’habitants peut réaliser. Vous avez réécrit les règles en prouvant ce que peut réaliser un pays avec très peu de ressources naturelles », a-t-il déclaré.
« Israël », a poursuivi Adani, est le « résultat de sa capacité à vaincre tous les obstacles grâce à la puissance de la science et de la technologie. »
« Votre rythme d’innovation dans plusieurs secteurs me stupéfie. Votre envie d’innover me fait me demander comment nous pouvons apprendre de vous. »
Ce discours a irrité les critiques d’Israël et de l’Inde, qui ont noté que les deux pays continuent d’amplifier leurs mythes fondateurs en tant que pays démocratiques et ingénieux alors même qu’ils poursuivent des projets d’exclusion ethno-nationalistes.
Sous Modi, l’Inde a connu une forte augmentation des attaques contre les musulmans, les chrétiens et les dalits. La révocation du statut semi-autonome du Cachemire fait écho au projet d’Israël en Cisjordanie occupée, selon Sai Englert.
La loi indienne sur la citoyenneté de 2019, discriminatoire envers les musulmans, présente des similitudes avec la loi israélienne sur le droit au retour.
« Il est certainement vrai que les propres politiques de Modi au Cachemire – les transferts de population, l’accaparement des terres et le déni des droits du peuple cachemiri – ont elles-mêmes été décrites comme coloniales et présentent des similitudes plus que superficielles avec les politiques coloniales d’Israël dirigées contre le peuple palestinien », observe Englert.
« En fait, il y a eu des transferts directs de connaissances et de technologies d’Israël vers l’Inde pour faciliter davantage ce processus. »
Quelques jours après l’annonce, un drapeau indien a été hissé, aux côtés d’un drapeau israélien, à l’entrée du port.
« Dans un endroit comme Israël, où l’État construit ses histoires et sa nostalgie, en tant que moyen de se légitimer, en opposition aux histoires palestiniennes – qui concernent le même endroit –, il est important d’amplifier ces mythes », dit Plonski.
« L’impact le plus tangible de cette marque efface la question de Palestine », observe Plonski.
Internationalisation de l’occupation
En octobre 2021, le bloc d’Asie occidentale, dénommé I2U2 (Israël, Inde, États-Unis, Émirats arabes unis), a été officiellement formé.
Dans les jours qui ont précédé le sommet, New Delhi a déclaré que le groupe encouragerait les investissements conjoints dans des domaines tels que l’eau, l’énergie, les transports, l’espace, la santé et la sécurité alimentaire.
Tout comme les accords d’Abraham l’avaient fait, l’I2U2 a accéléré le processus de développement et de modernisation, pour étendre les projets de sécurisation et de privatisation à travers la région, précise Englert, de l’Université de Leiden.
La vente du port de Haïfa n’a pas seulement illustré la centralité d’Israël dans un certain nombre de manœuvres géopolitiques différentes dans la région, elle a représenté la consolidation d’une alternative dirigée par les Américains à l’initiative chinoise des nouvelles routes de la soie.
« Le port est [la] première réalisation importante [d’I2U2] », a déclaré Englert, ajoutant que l’acquisition signifiait également la poursuite de l’internationalisation de l’occupation israélienne.
Moins d’un mois après la conversation téléphonique entre Netanyahou et Modi après la crise d’Adani, une société américaine, GQG Partners Inc, a annoncé qu’elle investirait 1,88 milliard de dollars dans quatre sociétés sous la bannière Adani. Cela comprenait une participation de 4,1 % dans Adani Ports pour 640 millions de dollars.
L’effet a été immédiat. Les actions des quatre sociétés Adani ont augmenté de 5 et 10 % en un jour. La roupie indienne s’est également renforcée par rapport au dollar américain en raison de l’investissement – la plus forte variation en un mois.
Espace hypernational
Alors que l’Inde investit massivement en Israël, d’autres observateurs ont prévenu qu’il pourrait y avoir de dangereuses répercussions.
La vente du port de Haïfa et la « délocalisation d’Israël », comme le décrit Sharry Plonski, font partie d’un plan visant à dissocier Israël de sa conquête coloniale au nom de la création d’espaces soi-disant privés, efficaces et pratiques pour le commerce mondial.
Pour qu’une opération comme celle-ci se déroule de la manière hypercapitaliste dans laquelle elle est envisagée, elle nécessite une sécurisation, un confinement et un traitement violent supplémentaires vis-à-vis des Palestiniens, développe la professeure de l’Université Queen Mary de Londres.
« Le projet de délocalisation consiste à déconnecter ces circuits du commerce mondial [comme le port de Haïfa] de tout – comme les lois ou la politique locales – ce qui pourrait interrompre le mouvement rapide des biens et des services », explique-t-elle.
« Rien ne bouge dans l’espace comme par magie. Les ports ne sont pas des espaces vides. Ils sont pleins d’identités nationales, lucratives, impériales et ils portent tout cela à la fois.
« Ils restent des espaces hypernationaux, comme le montre le drapeau indien à Haïfa », conclut Sharry Plonski.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].