Guerre à Gaza : ces Israéliens qui bloquent l’aide humanitaire
L’opération s’appelle Tsav-9. Elle a été nommée ainsi en référence à Tsav-8, le code d’alerte envoyé aux réservistes de l’armée israélienne en cas de mobilisation. L’objectif : empêcher l’aide humanitaire d’entrer dans la bande de Gaza.
Depuis la fin du mois de janvier, des civils israéliens se réunissent régulièrement à la frontière avec l’Égypte pour bloquer les camions acheminant vivres et carburants aux Palestiniens assiégés depuis le 7 octobre.
Au début, ils se retrouvaient près du seul terminal encore ouvert entre Israël et la bande de Gaza, Kerem Shalom. Mais ce dernier étant devenu une zone militaire, ils se sont dirigés vers le point de passage de Nizzana, à la limite du Sinaï égyptien et du Néguev israélien, séparés par une haute clôture auréolée de barbelés.
Le 18 février, rapporte l’AFP, une centaine d’entre eux se sont mobilisés pour faire obstruction aux convoyeurs qui, en raison de leur présence, ne peuvent entrer en Israël, où l’aide humanitaire doit être examinée en détail par les autorités.
Les manifestants se disent persuadés que l’aide profite non pas à la population mais au Hamas. Mais l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, encore principal opérateur humanitaire à Gaza, assure n’avoir pas constaté de détournement systématique de l’aide par le Hamas ou un autre groupe armé, « grâce à des procédures robustes » de contrôle notamment menées par Israël.
Des activistes de droite, des colons, des proches d’otages
Dimanche soir, le Croissant-Rouge palestinien a annoncé que 123 camions étaient entrés à Gaza via Kerem Shalom. Mais aucun via Nizzana, en raison de la manifestation.
D’après l’ONU, les manifestations qui ont eu lieu ces derniers mois à Nizzana et Kerem Shalom et empêchent pendant plusieurs heures l’entrée des camions dans Gaza réduisent encore les maigres ressources disponibles dans le territoire ravagé par la guerre.
Selon les agences de l’ONU, les denrées alimentaires et l’eau potable sont devenues « extrêmement rares » à Gaza et 90 % des jeunes enfants y souffrent de maladies infectieuses. « La bande de Gaza est sur le point d’assister à une explosion du nombre de décès évitables d’enfants », a déclaré Ted Chaiban, responsable adjoint de l’action humanitaire à l’UNICEF
Parmi les protestataires, se trouvent « surtout des activistes de droite et d’extrême droite », relate France Info.
« Des colons venus de Cisjordanie et des sionistes religieux sont présents en nombre. Quelques habitants de Tel Aviv, moins conservateurs, ont aussi fait le déplacement. Certains sont armés, comme c’est autorisé dans certaines zones en Israël. Depuis quelques jours, ils sont aussi rejoints par des familles de disparus, otages du Hamas depuis près de quatre mois. »
Dimanche, plusieurs membres d’Israel is Forever, une association de « mobilisation des forces sionistes francophones », comme indiqué sur son site officiel, parmi lesquels des Franco-Israéliens, sont venus bloquer l’aide à Gaza.
« Le Hamas ne va pas de bonté d’âme libérer nos otages si nous donnons des camions humanitaires à la population civile de Gaza. De toute façon, il n’y a pas de population civile innocente à Gaza », affirme Nili Kupfer-Naouri, avocate franco-israélienne et présidente de l’association.
Sa solution ? « Que les Gazaouis partent de Gaza » s’ils veulent de l’aide. Selon elle, l’aide de la communauté internationale à Gaza ne fait qu’y favoriser le maintien du Hamas.
Dans un post partagé sur X, le député de La France insoumise (LFI, gauche radicale) Thomas Portes a dénoncé le comportement de la Franco-Israélienne et annoncé avoir saisi le procureur de la République de Paris.
Une avocate franco-israélienne bloque l’aide humanitaire qui doit rentrer à Gaza.
— Thomas Portes (@Portes_Thomas) February 18, 2024
Combien de temps la France va laisser ces bi-nationaux être complices des crimes de guerre ?
Je saisi immédiatement la Procureur de la République de Paris. @E_DupondM vous devez engager des… pic.twitter.com/y8nF5Dc7Fs
Le Hamas a menacé ce weekend de suspendre les pourparlers en vue d’une trêve à Gaza assortie de la libération d’otages enlevés lors de l’attaque du 7 octobre en Israël, si davantage d’aide n’entrait pas rapidement dans le territoire palestinien.
Une première trêve avait permis fin novembre la libération d’une centaine d’otages sur environ 250 personnes enlevées ce jour-là et emmenées à Gaza. Selon Israël, 130 otages y sont encore retenus, dont 30 seraient morts.
D’après un sondage de la chaîne israélienne 12 publié fin janvier, 72 % des Israéliens estiment que l’aide humanitaire ne devrait pas entrer à Gaza tant que les otages ne sont pas relâchés.
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