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Cisjordanie : le camp de Nour Shams en deuil après un raid israélien meurtrier

Le raid de Nour Shams s’inscrit dans un contexte d’intensification de la violence en Cisjordanie occupée, où au moins 484 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes ou des colons depuis le début de la guerre à Gaza
Un Palestinien photographié après un raid israélien dans le camp de Nour Shams, à Tulkarem, en Cisjordanie occupée, le 21 avril 2024 (Ammar Awad/Reuters)
Par AFP à TULKAREM, Palestine occupée

Dans les rues de Nour Shams, le sifflement des balles a laissé la place aux cris et aux sanglots. Encore sous le choc d’un raid meurtrier de l’armée israélienne, des familles enterraient leurs proches dimanche dans ce camp proche de Tulkarem, en Cisjordanie occupée.

La poussière était à peine retombée quand, au milieu des rues portant les stigmates de l’opération israélienne, passait la procession funéraire. Des familles éplorées enterraient treize hommes et adolescents tués par l’armée lors de ce raid entamé jeudi soir et terminé samedi soir.

Les forces israéliennes mènent régulièrement des opérations militaires sur des localités de Cisjordanie occupée, et le nombre de ces raids a augmenté depuis le 7 octobre.

Au total, quatorze personnes ont été tuées en deux jours, selon le Croissant rouge palestinien.

L’armée israélienne avait dit samedi avoir tué dix personnes dans un raid « antiterroriste » sur ce camp du nord du territoire palestinien.

Mais les habitants de Nour Shams racontent une tout autre histoire.

Le fils de Niaz Zandeq, Jihad, a été tué d’une balle dans la tête par un soldat israélien, le jour de son quinzième anniversaire, raconte ce Palestinien de 40 ans. Des voisins ont expliqué qu’il était sorti de chez lui les mains en l’air quand il a été tué par un soldat.

Ils ont montré à l’AFP des photos de son corps gisant dans la rue, une blessure par balle sur le front.

« Ils ont ouvert le feu et l’ont touché à la tête au moment où il est sorti », ajoute Niaz Zandeq, en larmes. « Il n’était pas armé. »

Sollicitée par l’AFP, l’armée israélienne n’a pas été en mesure de répondre dans l’immédiat.

Un autre adolescent a été tué pendant ces 48 heures meurtrières. Qais Fathi Nasrallah, 16 ans, est mort après avoir été « touché à la tête par des tirs israéliens », avaient indiqué vendredi le ministère palestinien de la Santé et l’agence de presse palestinienne Wafa.

Le père de l’adolescent, secouriste, a appris la funeste nouvelle quand le corps de Qais a été transporté à l’hôpital où il travaillait, a raconté l’organisation dans une publication sur X.

« Un petit Gaza »

L’armée israélienne avait annoncé samedi avoir arrêté huit personnes et saisi des armes dans le camp, et que huit soldats et un officier de police avaient été blessés.

Dans les rues du camp, des journalistes de l’AFP ont constaté la présence d’hommes armés qui ont tiré en l’air lors des funérailles.

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« Quiconque riposte dans le camp est considéré comme terroriste », a déclaré à l’AFP Ibrahim Ghanim, un étudiant en droit de 20 ans assistant aux obsèques.

« Les soldats israéliens ont tué tellement de personnes ici au fil des années que j’en ai perdu le compte », soupire-t-il, désabusé.

En marge de la procession, certains s’affairaient déjà à déblayer les décombres autour des maisons, tandis que d’autres semblaient encore en état de choc.

À 85 ans, Hamdia Abdallah Sarhan n’avait « jamais vu autant de violence ». Des soldats ont fait irruption chez elle et ont tiré dans le mur pour tenter d’ouvrir une position de tir : elle est restée allongée au sol, « terrifiée », a-t-elle détaillé.

La vieille dame a des problèmes de santé et doit utiliser une machine à oxygène pour l’aider à respirer. À leur arrivée, les soldats ont cassé la machine, et elle n’a dû son salut qu’à des voisins qui ont trouvé une machine en urgence, alors qu’elle luttait pour respirer, a-t-elle ajouté.

Misk el-Cheikh, neuf ans, était à l’étage chez elle quand des bulldozers israéliens ont démoli la façade de sa maison jeudi soir. « J’ai eu très peur », a-t-elle confié, « je voulais que mon papa me prenne dans ses bras. »

« L’opération de l’armée israélienne ciblait la vie quotidienne des civils », argue son père, Moustafa el-Cheikh. « Ils ont transformé Nour Shams en un petit Gaza. »

Le raid de Nour Shams s’inscrit dans un contexte d’intensification de la violence en Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza déclenchée par l’attaque du Hamas du 7 octobre sur le sol israélien.

Au moins 484 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes ou des colons en Cisjordanie depuis le début de la guerre à Gaza.

Par Laurie Churchman.

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