Les factions armées chiites irakiennes auraient réglé leurs différends avant les élections
BAGDAD – Des dirigeants chiites irakiens de premier plan ont dirigé mardi des efforts de réconciliation entre le puissant ecclésiastique chiite Moqtada al-Sadr et ses rivaux afin de désamorcer les tensions et d’ouvrir la voie à une alliance politique chiite unifiée avant les prochaines élections parlementaires, ont déclaré des dirigeants chiites haut placés.
Au cours des dix dernières années, de nouvelles milices chiites ont été formées, tandis que d’autres groupes armés se sont séparés de l’Armée du Mahdi, l’ancienne branche armée du mouvement Sadr, dont deux groupes importants, Asaïb Ahl al-Haq et les Kataïb Hezbollah en Irak. Cette nouvelle organisation a contesté Sadr sur le plan politique.
Depuis lors, les tensions entre Sadr et ses anciens alliés ont atteint leur paroxysme et des séries de combats ont éclaté plusieurs dizaines de fois entre leurs partisans.
La lutte contre les militants du groupe État islamique, qui a capturé près d’un tiers du territoire irakien en juin 2014, continue d’occuper les milices chiites, qui soutiennent les forces gouvernementales. Cependant, alors que la contre-offensive contre l’État islamique touche bientôt à sa fin avec la bataille pour Mossoul, les craintes d’une reprise des conflits entre factions chiites armées ont ressurgi.
La réconciliation entre les factions armées sadristes a envoyé des signaux rassurants aux Irakiens quant au fait que les affrontements attendus entre chiites après la chute de l’État islamique seraient repoussés.
Des images télévisées diffusées par le bureau de Sadr ont montré l’ecclésiastique dans sa maison à Najaf lors d’une rencontre avec Abou Mahdi al-Mohandis, commandant supérieur des Unités de mobilisation populaire (UMP), et Hadi al-Ameri, chef de l’Organisation Badr, un groupe paramilitaire et parti politique puissant. Les deux hommes étaient en uniforme militaire et assis à côté de l’ecclésiastique.
Les UMP, une coalition dirigée par différentes milices chiites irakiennes, ont joué un rôle majeur dans l’offensive du gouvernement contre l’État islamique.
Qais al-Khazali, commandant d’Asaïb Ahl al-Haq et l’un des principaux rivaux politiques de Sadr, Akram al-Qaibi d’al-Nujaba, Adnan al-Shahmani de Tayyar al-Rasouli ainsi que d’autres chefs des UMP étaient assis à côté. Les hommes ont semblé engager des discussions amicales au cours de cette assemblée.
« La rencontre a été cordiale et dominée par l’optimisme. Tous les différends ont été réglés », a indiqué à MEE Ahmed al-Asadi, de la brigade Jund al-Imam. « En réalité, c’est un message adressé pour que chacun d’entre nous ferme la porte au nez des ennemis et des rivaux qui tentent de tirer profit de ces différends [entre factions chiites]. »
Khazali, Qaibi et Shahmani étaient des dirigeants de premier plan de l’Armée du Mahdi et sont restés proches de Sadr jusqu’en 2006, avant de se retourner contre lui pour protester contre son offensive visant à centraliser toutes les décisions entre ses mains.
Les trois hommes, en plus de beaucoup d’autres, se sont séparés de l’ecclésiastique basé à Najaf pour former les milices Asaïb et Kataïb, qui ont mené plusieurs attaques meurtrières contre l’armée américaine en Irak entre 2007 et 2011.
Sadr avait publiquement critiqué les milices, les accusant d’être impliquées dans des massacres sectaires et des enlèvements à Bagdad et dans d’autres provinces.
Les pourparlers de réconciliation de ce mardi, qui ont duré plus de trois heures, ont été la première rencontre entre Sadr, Khazali et Qaibi depuis 2006.
Tous les efforts déployés auparavant par de nombreux camps pour rassembler les trois dirigeants ont été avortés par Sadr. Des sources impliquées dans la rencontre ont indiqué à MEE que « les hommes avaient discuté de toutes les questions à l’origine de différends, dont leur vision pour l’avenir de l’Irak et la façon de protéger le pays contre toute attaque étrangère ».
« La séance a été bonne, productive et fraternelle [...] Tout le monde travaille pour servir les intérêts de l’Irak et libérer le territoire. Nous soutenons tous l’armée irakienne à Mossoul, Anbar et partout ailleurs », a déclaré Sadr lors de la conférence de presse télévisée consécutive à la rencontre.
« [La période post-État islamique] a été l’une des questions abordées lors de la rencontre. Nous nous sommes mis d’accord sur quelque chose pour l’avenir de l’Irak après Daech », a ajouté Sadr.
Sadr a fait part de son optimisme, affirmant espérer que toutes les préoccupations au sujet de l’Irak post-État islamique seraient résolues lors des prochaines rencontres.
« Tant que l’armée capture les terres et mène les batailles pour la libération, mes plus grandes craintes ont disparu », a déclaré Sadr.
Plusieurs personnes qui ont assisté à la rencontre ont indiqué à MEE que Sadr était préoccupé par le rôle des factions armées après la reprise espérée de Mossoul par les forces pro-gouvernementales.
Sadr a également discuté de la façon de soutenir l’État et d’incorporer les UMP dans les forces de sécurité du gouvernement pour faire en sorte qu’elles soient « totalement dirigées par le gouvernement et soumises aux lois militaires officielles ».
Deux commandants chiites de haut rang ont indiqué à MEE sous couvert d’anonymat que les efforts de réconciliation avaient été initiés il y a plusieurs mois par Sami al-Massoudi, dirigeant éminent du parti islamique chiite Fadhila.
« Le véritable objectif est de former un grand bloc politique afin de participer aux prochaines élections », a affirmé l’un des commandants.
Le parti Fadhila est également né d’une scission avec le mouvement Sadr.
« S’ils [les dirigeants du parti Fadhila] y parvenaient, cela signifierait que le prochain plus grand bloc parlementaire serait contrôlé par Sadr et que le poste de Premier ministre serait entre ses mains », a expliqué une source.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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