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La volte-face de l’Espagne au sujet du Sahara occidental lui fait perdre des millions en exportations algériennes

L’Algérie a imposé des sanctions depuis que l’Espagne a rejoint la position du Maroc sur le Sahara occidental. Et cela coûte cher à Madrid
Les échanges de biens et services non énergétiques entre l’Espagne et l’Algérie sont à l’arrêt depuis plusieurs mois (Reuters)

Les sanctions imposées par l’Algérie à la suite du revirement de l’Espagne au sujet du Sahara occidental ont coûté à Madrid plus de 258 millions de dollars de recettes d’exportation, selon les dernières données en date communiquées par le gouvernement espagnol.

Selon le ministère espagnol de l’Industrie, du Commerce et du Tourisme, le coût final de la brouille entre les deux pays pourrait être de plusieurs centaines de millions de dollars supplémentaires. 

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En juin, l’Algérie a introduit une série de mesures visant à bloquer les échanges de biens et de services non énergétiques après que le gouvernement espagnol du Premier ministre Pedro Sánchez a brusquement annoncé son soutien au plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara occidental.

Ancienne colonie espagnole, le Sahara occidental est classé en tant que « territoire non autonome » par l’ONU et est le théâtre d’un conflit vieux de plusieurs décennies entre le Maroc et le Front Polisario, le mouvement indépendantiste sahraoui soutenu par l’Algérie.

Les chiffres commerciaux les plus récents publiés par le ministère espagnol de l’Industrie, qui s’arrêtent à juillet, soit deux mois après la mise en œuvre des restrictions par l’Algérie, révèlent le coût croissant de cette mesure tant pour Alger que pour Madrid. 

Une relation « très compliquée »

Fin juillet, les deux parties semblaient avoir enterré la hache de guerre et les relations commerciales semblaient prêtes à être relancées. Mais peu de choses tendent à prouver cette évolution jusqu’à présent.

« Les dernières informations à ce sujet indiquent qu’il n’y a pas de commerce entre l’Algérie et l’Espagne, sauf pour le gaz », affirme une source algérienne à Middle East Eye sous couvert d’anonymat.

Une autre source dans le pays du Maghreb souligne que le sujet même des retombées économiques est périlleux sur le plan politique.

Dans le but de garantir l’approvisionnement en énergie pour l’hiver, l’Espagne s’est également engagée dans un âpre processus de négociation avec le producteur d’énergie algérien Sonatrach

« Notre relation avec Madrid est très compliquée. Je ne pense donc pas être en mesure de faire des commentaires à ce sujet », indique-t-elle.

Un examen plus approfondi des chiffres du ministère de l’Industrie révèle que les exportations espagnoles vers l’Algérie sont tombées à 28 millions d’euros en juillet, soit leur plus faible niveau depuis que les données à ce sujet ont commencé à être enregistrées en janvier 1995, contre 197 millions d’euros en mai.

Les données portant sur août et septembre ne sont pas encore disponibles. Cependant, il y a peu de chances de voir les chiffres des échanges se rapprocher de ceux enregistrés en mai, avant la crise. 

Le gouvernement algérien ne souhaite pas vanter ses sanctions économiques contre l’Espagne, tandis que l’opinion publique se montre réticente à en parler.

L’Algérie n’a pas interrompu son flux de gaz vers l’Espagne, qui lui rapporte des centaines de millions de dollars de revenus, et a été considérablement stimulé par la hausse des prix du gaz naturel dans un contexte d’intensification de la guerre en Ukraine.

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Dans le but de garantir l’approvisionnement en énergie pour l’hiver, l’Espagne s’est également engagée dans un âpre processus de négociation avec le producteur d’énergie algérien Sonatrach.

Récemment, les deux parties ont conclu un accord pour le reste de l’année et convenu de reprendre les négociations en 2023 pour de nouveaux approvisionnements. Certains analystes estiment que Madrid devra payer jusqu’à 30 % plus cher pour son gaz. 

« Les mesures de rétorsion économique de l’Algérie contre Madrid compliquent les négociations énergétiques avec l’Espagne », souligne Zine Ghebouli, chercheur post-doctorant à l’université de Glasgow et analyste spécialiste de l’Algérie.

Alger a suspendu en juin le traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération conclu il y a vingt ans avec Madrid, après que l’Espagne a annoncé son soutien au plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara occidental, à la grande surprise de l’Algérie.

« Malgré plusieurs tentatives de l’Espagne, Alger ne considère pas Madrid comme un partenaire fiable et risque de connaître davantage de difficultés économiques à mesure que la crise s’éternise », indique Zine Ghebouli à MEE.

Si le coût économique pour les exportateurs espagnols est de plus en plus évident – récemment, le ministre espagnol des Affaires étrangères du pays a laissé entendre qu’un « blocus » subsistait –, on parle moins du coup économique porté aux Algériens.

Faire de l’Espagne un « exemple »

« Cela a également un impact sur les acteurs économiques algériens qui dépendent de matières premières importées d’Espagne », explique Zine Ghebouli. 

« Si le poids exact de ces mesures de rétorsion sur l’Algérie reste à déterminer, il est vrai que les économies des deux pays continuent de pâtir de ce désaccord politique », ajoute-t-il.

« L’autre problème est que malgré la suspension du traité d’amitié, les autorités algériennes n’ont pas émis de nouvelles directives pour les entreprises affectées, ce qui entretient un flou autour de toute cette situation »

- Zine Ghebouli, spécialiste de l’Algérie à l’université de Glasgow et analyste 

L’impact sur l’Algérie des sanctions commerciales prises à l’encontre de l’Espagne a été atténué par une série d’accords gaziers lucratifs, alors que les nations européennes cherchent à diversifier leurs approvisionnements pour ne plus dépendre de la Russie.

Néanmoins, si l’Égypte augmente actuellement sa production et ses exportations de gaz, il est peu probable que l’Algérie expédie cette année un chiffre supérieur aux exportations totales de gaz enregistrées en 2021, situées à environ 55 milliards de mètres cubes.

D’autres effets secondaires des sanctions sont susceptibles de se manifester. « Cet impact a pu être observé à travers la pénurie de matières premières qui a entraîné une pénurie de denrées alimentaires et de matériaux industriels, ce qui s’est traduit par des fermetures de petites entreprises algériennes », ajoute Zine Ghebouli. 

Alors même que la guerre en Ukraine continue de faire rage, l’Espagne se tourne vers Moscou pour obtenir davantage de gaz, étant donné que l’Algérie privilégie de plus en plus d’autres nations européennes – notamment l’Italie – pour ses exportations. 

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Les États-Unis et même le Nigeria sont également intervenus pour combler les manques de l’Espagne. 

La publication économique Eco Times a récemment souligné que « la péninsule Ibérique regrett[ait] non seulement de ne pas pouvoir bénéficier de volumes supplémentaires de gaz, dont la machine économique du pays exprime des besoins pressants, mais s’apprêt[ait] aussi à payer une facture conséquente à Sonatrach ». 

Le litige entre les deux pays plonge les entreprises algériennes ordinaires dans l’incertitude.

« L’autre problème est que malgré la suspension du traité d’amitié, les autorités algériennes n’ont pas émis de nouvelles directives pour les entreprises affectées, ce qui entretient un flou autour de toute cette situation », explique Zine Ghebouli. 

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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