Qu’est-ce que Cham el-Nessim ? La fête égyptienne du printemps en cinq questions
Chaque année, les Égyptiens de toutes religions et classes sociales accueillent le printemps avec la fête de Cham el-Nessim, qui signifie « parfum de la brise ».
Cette fête nationale, qui remonte aux traditions pharaoniques, ressemble à la fête iranienne de Norouz, qui symbolise le début du printemps et le renouveau.
Middle East Eye répond à quelques questions sur l’une des plus anciennes fêtes d’Égypte.
Quand a lieu Cham el-Nessim ?
Cette année, Cham el-Nessim tombe le 25 avril. Chaque année, la célébration se tient le lendemain de la Pâque copte.
Chez les Églises occidentales, Pâques a généralement lieu entre le 22 mars et le 25 avril, conformément au calendrier grégorien. Cependant, les chrétiens coptes fêtent Pâque selon le calendrier julien, cet événement religieux a donc lieu un peu plus tard. Cette année, les Églises orientales célèbrent la Pâque le 24 avril.
La fête de Cham el-Nessim ne dure qu’une journée, même si les gens s’y préparent plusieurs jours à l’avance en confectionnant des plats traditionnels et en prévoyant des sorties.
Quelles sont les origines de cette fête ?
Cham el-Nessim remonte à environ 2 700 avant notre ère, on l’appelait alors Chémou. Lors de cette fête de printemps, les anciens Égyptiens offraient du poisson salé et d’autres aliments à leurs dieux ; ce moment coïncidait avec l’équinoxe de printemps.
Pendant cette période, qui correspond à l’ère de la troisième dynastie, l’arrivée du printemps était un événement important pour les Égyptiens car le changement des saisons était significatif pour les tâches agricoles.
À la suite de l’introduction du christianisme en Égypte au premier siècle, cette fête a été associée à la Pâque copte, et se tenait chaque année le lendemain du dimanche de Pâque.
Le nom Cham el-Nessim vient de la langue copte, elle-même dérivée de la langue de l’ancienne Égypte. À l’origine, on prononçait « tshom ni sime », ce qui signifie jardin, près. Lorsque l’Égypte s’est arabisée, le nom s’est transformé d’un point de vue phono-sémantique en « cham el-Nessim », ce qui signifie « parfum de la brise » en arabe.
Cette fête a également été appelée « fête de schmo » par certains, ce qui signifie résurrection.
Qui fête Cham el-Nessim ?
Tout le monde. Cham el-Nessim est l’une des rares fêtes célébrées par les Égyptiens quelle que soit leur confession, rassemblant à la fois les chrétiens et les musulmans.
Comment célèbre-t-on Cham el-Nessim ?
Familles et amis accueillent le printemps en se rassemblant pour des pique-niques en plein air, dans les jardins et les parcs et même sur les rives du Nil.
Lors des pique-niques, les gens jouent souvent de la musique et s’affrontent dans des jeux. L’une des chansons les plus populaires associées à cette fête est El donya rabee (c’est le printemps), une chanson de l’actrice et chanteuse égyptienne populaire Soad Hosni, surnommée la « Cendrillon du cinéma égyptien », lorsqu’elle a connu la gloire dans les années 1950.
Une autre chanson populaire est Adi el rabee ad men tany (revoilà le printemps) du chanteur et compositeur Farid al-Atrash. On l’a parfois surnommé le « roi de l’oud » car il a enregistré plus de 500 chansons et est apparu dans plus d’une trentaine de films. Il était considéré comme l’une des personnalités les plus importantes et influentes de la musique arabe au XXe siècle.
D’autres célèbrent cette journée en visitant les zoos ou à la plage, ou à l’une des nombreuses fêtes foraines qui fleurissent à travers le pays à cette occasion, avec des manèges pour divertir les enfants.
Peindre et décorer des œufs durs font aussi partie des traditions de Cham el-Nessim. Généralement, les familles préparent les œufs la veille et passent la journée à les décorer avec divers motifs. Les œufs symbolisent la renaissance et le renouveau. Certaines personnes choisissent d’écrire des vœux sur les œufs et de les suspendre aux arbres ou chez eux dans l’espoir qu’ils se réalisent.
Que mange-t-on à Cham el-Nessim ?
De nombreux aliments sont étroitement associés à cette fête. L’un des plus populaires est le fesikh : du mulet très salé et fermenté. Ce mets est tellement âcre que la plupart des familles ne le mangent pas en intérieur ou chez eux.
Chaque année, le ministère égyptien de la Santé met en garde contre les intoxications alimentaires lors de Cham el-Nessim. S’il n’est pas préparé avec soin, le fesikh peut être pourri et provoquer le botulisme. En 1991, dix-huit morts ont été recensées par l’État. Les conseils délivrés par les autorités encouragent les gens à manger du fesikh avec modération et à l’inspecter à la recherche de tout signe de contamination ou de pourriture.
On fait sécher ce poisson au soleil et on le laisse souvent dans le sel plusieurs mois voire un an avant sa consommation. Si auparavant, les gens préparaient le fesikh chez eux, beaucoup l’achètent aujourd’hui déjà prêt pour éviter les odeurs chez eux.
Avant la fête, les ventes de fesikh en magasins spécialisés augmentent en raison de la demande élevée. Les spécialistes de la préparation du fesikh sont appelés fasakhani. Souvent, les Égyptiens mangent ce poisson avec du pain et du jus de citron pour le rendre plus digeste.
Outre le fesikh et d’autres poissons salés tels que le hareng, les gens mangent des oignons de printemps et de la laitue. Ces légumes sont censés aider la digestion et équilibrer la salinité du poisson.
Beaucoup pensent que la tradition de la consommation de poisson lors de cette fête remonte aux temps pharaoniques : les gens offraient la nourriture à leurs dieux dans la ville d’Esna en Haute-Égypte. Le nom originel de la ville, Latopolis, viendrait du mot signifiant poisson avant sa salaison.
Selon la légende égyptienne, si on mange traditionnellement des oignons, c’est parce que lorsque la fille du pharaon est tombée malade – maladie qu’on pensait incurable –, des oignons ont été utilisés pour la soigner. D’autres affirment que cela éloigne les mauvais esprits.
Pour ceux qui ne digèrent pas le fesikh, les feuilles de vigne farcies sont également populaires au Moyen-Orient, assorties de quelques petites touches régionales.
Autre snack populaire chez les Égyptiens pendant Cham el-Nessim : les tramousses ou graines de lupin. On les déguste en se promenant le long du Nil ou sur les plages et beaucoup en mangent lorsqu’ils ont des invités ou regardent un film, comme une alternative au popcorn.
On les trouve auprès des vendeurs de rue à travers l’Égypte, qui les servent généralement dans des cônes en papier avec un filet de citron et un peu de piment.
Pour faire les tramousses, les graines de lupin doivent tremper toute la nuit. Après les avoir portées à ébullition, les graines prennent une couleur jaune intense. On les laisse ensuite dans de l’eau froide et on les assaisonne de sel et de jus de citron. Pour les manger, on retire l’enveloppe externe et on ne garde que la fève à l’intérieur.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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