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« Nous, musulmans, on s’excuse » : la lettre satirique d’un chroniqueur français à une polémiste d’extrême droite

Dans l’émission « Touche pas à mon poste », des chroniqueurs ont affronté lundi 13 novembre la polémiste Élisabeth Lévy, pour qui l’antisémitisme le plus menaçant pour les juifs est le fait des musulmans
« Depuis 2015, tous les juifs qui ont été tués en France parce qu’ils étaient juifs l’ont été au nom de l’islam par des musulmans », a répondu Élisabeth Lévy à ses détracteurs (Capture d’écran)
« Depuis 2015, tous les juifs qui ont été tués en France parce qu’ils étaient juifs l’ont été au nom de l’islam par des musulmans », a répondu Élisabeth Lévy à ses détracteurs (capture d’écran)
Par MEE

« L’antisémitisme qui pose un problème de vie aux juifs vient en général de musulmans. » La polémiste Élisabeth Lévy, chroniqueuse dans « L’Heure des pros » sur CNEWS, a déclenché lundi 13 novembre une nouvelle polémique.

« Ces déclarations soulèvent des préoccupations sérieuses, car elles incitent à la haine et à la discrimination envers les Français de confession musulmane en associant, systématiquement, les actes antisémites que subissent des compatriotes de confession juive aux musulmans », a écrit dans un courrier adressé à la procureure de la République de Paris une députée de La France insoumise (LFI, gauche radicale) de l’Essonne, Farida Amrani.

« Dès lors, elles pourraient s’apparenter à une infraction pénale au titre de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 qui prohibe l’incitation à la haine, la discrimination et la diffusion de discours haineux », a-t-elle aussi signalé.

Alors que le débat public en France est particulièrement tendu, que la « grande marche civique » contre l’antisémitisme ne s’est pas transformée comme espéré en un large front uni, que les clivages communautaires sont exacerbés par le contexte de la guerre israélo-palestinienne, la fondatrice et directrice de la rédaction du magazine de droite et d’extrême droite Causeur a notamment provoqué de vives réactions chez les chroniqueurs d’une autre émission où elle s’est rendue quelques heures plus tard.

Sur le plateau de « Touche pas à mon poste » (TPMP), l’émission de Cyril Hanouna, Élisabeth Lévy a été confrontée à plusieurs personnes venues dire, à l’aide de petites pancartes affichant « oui » ou « non », si elles étaient choquées par les propos tenus plus tôt sur CNEWS.

Un « fond de commerce »

« C’est de l’islamophobie, elle en fait son fond de commerce, c’est énervant. C’est honteux de dire ça. Je ne suis pas choqué, je suis dégoûté », a commenté le journaliste et chronique Gilles Verdez.

Un invité prénommé Nasser, présenté comme un « ami » de Cyril Hanouna, parce qu’on a « aussi besoin d’avoir [sur le plateau] des gens de la vie normale », a ensuite interpellé la polémique : « Je ne vous ai jamais vu prôner l’amour. Je vous vois […] du matin au soir cracher sur l’islam. Qu’est-ce qu’on vous a fait Mme Lévy ? »

Mais c’est surtout Moundir Zoughari, ex-candidat de l’émission « Koh-Lanta » et chroniqueur de TPMP, qui a le plus contribué à la vitalité de l’émission sur les réseaux sociaux, grâce à la lettre adressée à Élisabeth Lévy, qu’il a lue en direct.

« Madame Lévy, nous, musulmans, on s’excuse. On s’excuse d’avoir sauvé la France lors de la Deuxième Guerre mondiale […] Nous musulmans, on s’excuse, car en juillet 1944, nous sommes allés jusqu’à les accueillir [les juifs] et les protéger dans notre pays d’origine et nous sommes opposés à leur déportation. […] On s’excuse d’avoir reconstruit la France des Trente Glorieuses lorsque le pays a été ravagé par la misère et la famine », a-t-il énuméré non sans émotion.

Face à ses détracteurs, l’essayiste, rodée aux échanges houleux, s’est défendue en expliquant que ses propos étaient basés sur des faits. « Depuis 2015, tous les juifs qui ont été tués en France parce qu’ils étaient juifs l’ont été au nom de l’islam par des musulmans », a-t-elle affirmé, en accusant ses contradicteurs d’être dans le déni d’« une vérité évidente pour tout le monde ».

« Je reviens d’Israël et je peux vous dire que tous les juifs qui ont quitté la France à contre-cœur […] sont tous partis à cause de la montée d’un islam radical et de ce qui l’accompagne. J’en ai marre de cette dénégation », a-t-elle aussi répondu.

Le ministère de l’Intérieur a exactement recensé au 8 novembre 1 159 actes antisémites, 518 interpellations et 7 000 signalements sur la plateforme Pharos (site créé en 2009 par le gouvernement français pour signaler des contenus et comportements en ligne illicites).

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Si en France, aucune donnée officielle n’a été diffusée depuis le début de la nouvelle phase du conflit le 7 octobre sur les actes islamophobes, aux États-Unis, les signalements d’actes contre les Arabes et les musulmans ont été multipliés par trois.

Le Royaume-Uni aussi connaît un bond des actes antisémites et islamophobes. « Malgré la présence accrue de policiers, nous avons constaté une augmentation significative des crimes haineux à Londres », avec 218 actes délictueux antisémites recensés entre le 1er et le 18 octobre contre 15 sur la même période l’année dernière, a précisé la police londonienne dans un communiqué fin octobre.

« De même, nous avons constaté une augmentation des délits islamophobes » qui sont passés « de 42 à 101 » sur la même période, a-t-elle ajouté.

« Depuis 2000, de nombreux chercheurs, institutions, professeurs ont observé la montée de cet antisémitisme musulman. Parlez à n’importe quel prof qui enseigne en banlieue, ils vont vous dire comment les juifs sont traités et vus par leurs petits élèves musulmans », a-t-elle rétorqué alors que Gille Verdez l’accusait de « stigmatiser 6 millions de personnes en leur crachant dessus ».

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