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Guerre à Gaza : les chars israéliens encerclent les hôpitaux et bombardent al-Chifa

L’attaque israélienne contre l’hôpital al-Chifa à Gaza, où s’abritent de nombreux déplacés palestiniens, a fait treize morts, tandis que le bombardement d’une école à proximité a tué une cinquantaine de personnes
Les corps des personnes tuées lors d’une frappe israélienne présumée gisent sur le sol à proximité de l’hôpital al-Chifa de la ville de Gaza, le 10 novembre 2023 (AFP/Khoder al-Zaanoun)
Par MEE

Les forces israéliennes ont bombardé les cours de l’hôpital al-Chifa, le plus grand complexe médical de l’enclave assiégée, aux premières heures de vendredi.

L’attaque, qui a touché la clinique ambulatoire et la maternité, a fait treize morts et plusieurs blessés, selon les responsables locaux de la santé.

« Treize martyrs et des dizaines de blessés dans une frappe israélienne sur le complexe d’al-Chifa aujourd’hui », a déclaré vendredi Salama Maarouf, directeur du bureau de presse du Hamas.

Plus tôt, le directeur de l’hôpital, Mohammed Abou Salmiya, avait fait état de deux morts et dix blessés, en majorité des enfants, dans des tirs de chars israéliens sur la maternité.

L’armée israélienne, qui n’a pas communiqué dans l’immédiat sur une telle opération, avait indiqué jeudi soir qu’une de ses divisions menait d’importantes opérations dans une zone « très, très proche » de l’hôpital.

Le Croissant-Rouge palestinien a par ailleurs affirmé que des tirs de soldats d’élite israéliens vendredi sur l’hôpital al-Quds de Gaza avaient fait au moins un mort et vingt blessés alors que d’intenses combats entre l’armée israélienne et le Hamas sont en cours dans cette zone.

« De violents affrontements ont lieu actuellement et des tireurs d’élite de l’occupation [Israël] tirent sur l’hôpital al-Quds, faisant des victimes parmi les personnes déplacées », a déclaré l’organisation médicale dans un communiqué.

Des milliers de Palestiniens de Gaza cherchent refuge à al-Shifa et dans d’autres hôpitaux de la bande côtière pour échapper aux assauts israéliens.

Selon l’Organisation mondiale de la santé, vingt hôpitaux de Gaza sont désormais totalement hors d’usage, a rapporté l’agence de presse Reuters.

Peu après l’attaque d’al-Shifa, son directeur a affirmé avoir reçu « une cinquantaine de corps après le bombardement vendredi matin d’une école » de la ville de Gaza, où s’abritent là aussi de nombreux déplacés.

« De nombreux chars [israéliens] sont postés à 200 mètres de l’école al-Bouraq sur la rue al-Nasr et encerclent quatre hôpitaux du secteur », a rapporté de son côté le bureau de presse du gouvernement du Hamas.

« Aucun endroit sûr »

Un père de famille de 32 ans qui se fait appeler Abou Mohammed a raconté à l’AFP s’être réfugié à al-Chifa, dans l’ouest de la ville de Gaza, avec quinze de ses proches après des bombardements sur son quartier dans l’est.

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« Il n’y a aucun endroit sûr, l’armée a frappé al-Chifa, je ne sais plus quoi faire », dit-il.

Depuis des années, Israël accuse le Hamas d’utiliser les hôpitaux pour mener des attaques ou cacher des tunnels, et les civils comme boucliers humains. Ces allégations sont réfutées par le Hamas et d’autres observateurs qui relèvent que la bande de Gaza est l’un des endroits les plus peuplés sur terre.

« Les chars israéliens assiègent quatre hôpitaux de l’ouest de Gaza-ville », mettant en danger des dizaines de milliers de patients et de déplacés qui y ont trouvé refuge, a affirmé vendredi le ministère de la Santé du Hamas. Des témoins ont vu notamment l’hôpital pour enfants al-Rantissi encerclé par des chars.

« L’occupant bombarde tout, même les couloirs dit sécurisés, où on trouve des morts. Des familles entières sont mortes en fuyant [vers le sud] », a indiqué à l’AFP Salama Maarouf.

« Entendez-vous les cris de l’hôpital al-Chifa ? »

Un médecin norvégien, auparavant volontaire à Gaza, a envoyé vendredi un message passionné au président américain lui demandant de mettre fin aux attaques israéliennes contre les hôpitaux.

« Entendez-vous les cris de l’hôpital al-Chifa ? Entendez-vous les cris des innocents ? Les réfugiés qui s’abritent, tentent de trouver un endroit sûr, qui sont bombardés par les forces d’attaque israéliennes ce matin ? », a déclaré Mads Gilbert dans une vidéo publiée sur X.

Il a adressé son message au président américain Joe Biden et au secrétaire d’État Antony Blinken au son des cris de Palestiniens entendus en arrière-plan après les assauts israéliens sur les hôpitaux de Gaza vendredi.

Les dénonciations des agissements d’Israël à Gaza se font de plus en plus nombreuses, notamment au sein des Nations unies.

Le patron de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), Philippe Lazzarini, a ainsi appelé à l’arrêt du « carnage » dans la bande de Gaza.

« Raser des quartiers entiers n’est pas une réponse aux crimes odieux commis par le Hamas. Au contraire, cela crée une nouvelle génération de Palestiniens lésés, susceptibles de perpétuer le cycle de la violence. Le carnage doit simplement cesser », a-t-il déclaré dans une tribune de presse, selon un communiqué de l’UNRWA transmis vendredi aux médias.

Ce vendredi, le porte-parole du Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a quant à lui décrit la vie dans le nord de Gaza comme « l’enfer sur terre ». Jens Laerke a exprimé sa frustration qu’aucune aide n’ait atteint le nord de Gaza depuis plus d’un mois.

« Au stade actuel, nous ne pouvons pas nous diriger vers le nord, ce qui est évidemment très frustrant car nous savons qu’il reste plusieurs centaines de milliers de personnes dans le nord », a déclaré Laerke.

« S’il y a un enfer sur terre aujourd’hui, son nom est le nord de Gaza » a-t-il ajouté. « C’est une vie de peur le jour et d’obscurité la nuit. Et que dites-vous à vos enfants dans une telle situation, c’est presque inimaginable – que le feu qu’ils voient dans le ciel est là pour les tuer ? »

Depuis l’attaque surprise menée par le Hamas dans le sud d’Israël, les bombardements israéliens ont fait 11 078 morts, essentiellement des civils, parmi lesquels 4 506 enfants, selon le ministère de la Santé gazaoui.

Côté israélien, au moins 1 400 personnes ont péri depuis le début de la guerre, selon les autorités, en majorité des civils tués le jour de l’attaque du Hamas.

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Selon Washington, Israël a accepté de faire des « pauses » humanitaires quotidiennes pour permettre aux civils de fuir le nord de la bande de Gaza vers le sud. Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a salué vendredi ces pauses, tout en estimant qu’il restait « encore beaucoup à faire » pour protéger les civils.

Selon l’OCHA, le nombre de déplacés à Gaza s’élève désormais à 1,6 million de personnes sur les 2,4 millions d’habitants de la bande de Gaza.

Dans le nord, où demeurent encore des centaines de milliers de personnes, « le manque de nourriture est de plus en plus préoccupant », s’inquiète l’ONU. Par ailleurs, les hôpitaux qui n’ont pas encore fermé manquent de médicaments et de carburant pour faire fonctionner les générateurs.

Le Conseil de sécurité de l’ONU doit se réunir une nouvelle fois à propos de Gaza vendredi, à la veille d’une réunion d’urgence à Riyad de la Ligue arabe et de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) qui craignent une escalade du conflit dans la région alors que l’Iran, allié du Hamas, a prévenu que l’extension de la guerre était « désormais inévitable ».

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