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La plus grande menace qui pèse sur Israël en 2023 est « la rupture des relations avec l’Occident »

Le rapport d’un think tank israélien met en garde contre les mesures « nuisibles à la démocratie » que pourrait prendre le nouveau gouvernement d’extrême droite
Joe Biden, alors vice-président américain, s’apprête à signer le livre d’or de la résidence du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou à Jérusalem, le 9 mars 2010 (Reuters)
Par MEE

La plus grande menace stratégique à laquelle Israël est actuellement confronté est une détérioration de ses relations extérieures, en particulier avec les États-Unis, principalement en raison des tentatives d’affaiblissement du système judiciaire par le nouveau gouvernement, selon un important groupe de réflexion israélien spécialisé dans les questions de sécurité.

Chaque année, l’Institut d’études sur la sécurité nationale (INSS) publie un rapport détaillant ce qu’il considère être la plus grande menace pesant sur Israël. Au cours des années précédentes, le célèbre institut, affilié à l’Université de Tel Aviv, a désigné l’Iran, la guerre en Syrie et le projet de missiles de précision du Hezbollah.

« Le front le plus inquiétant est celui que le rapport appelle ‘’le front intérieur’’. La sécurité d’Israël est étroitement liée à sa résilience nationale »

- Isaac Herzog, président israélien

Cette année, son évaluation annuelle, publiée lundi, avertit que le gouvernement d’extrême droite du Premier ministre Benyamin Netanyahou pourrait prendre des mesures qui seraient perçues par l’Occident comme nuisibles à la démocratie, ce qui pourrait mettre en danger les relations d’Israël avec Washington et sa sécurité à long terme.

Le rapport indique que les mesures prises par le gouvernement pour affaiblir le système judiciaire augmenteront la polarisation au sein de la société israélienne, ce qui affaiblira la résilience sociale – « un élément essentiel de la capacité d’Israël à faire face aux menaces extérieures ».

Début janvier, le nouveau gouvernement, le plus à droite de l’histoire d’Israël, a présenté des plans de refonte du système judiciaire.

Si elles sont mises en œuvre, les réformes devraient affaiblir le système judiciaire, que Netanyahou et sa coalition de partis d’extrême droite et ultra-orthodoxes accusent de contribuer à promouvoir un programme de gauche par le biais de décisions de justice clés.

Iran et effondrement de l’Autorité palestinienne

Les réformes prévues, qui ont déclenché d’importantes manifestations à Tel Aviv et Jérusalem, permettraient également au gouvernement d’invalider les accusations de corruption auxquelles fait face Netanyahou.

Les tensions entre le pouvoir judiciaire et le gouvernement se sont intensifiées ces derniers jours à la suite d’une décision de la Cour suprême d’annuler la nomination d’Aryé Dery au poste de ministre de l’Intérieur et de la Santé en raison de condamnations pénales antérieures.

Deri est l’un des alliés les plus proches et les plus expérimentés de Netanyahou et a joué un rôle central dans son retour au pouvoir.

Selon le rapport de l’INSS, la crise judiciaire et les tentatives d’adoption de lois antidémocratiques constituent un risque important pour la position d’Israël sur la scène internationale et ses relations avec les pays occidentaux.

À court terme, ajoute le rapport, cela met en péril la sécurité nationale et les intérêts de l’Occident et d’Israël dans la région.

Le « changement de régime » judiciaire est bon pour Netanyahou, dangereux pour Israël
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Pour Tamir Hayman, directeur général de l’INSS, si Israël « dispose actuellement d’une position militaire et internationale plus forte » que ses ennemis extérieurs, « 2023 soulève une multitude de défis susceptibles de bouleverser cet équilibre ».

Le rapport met en évidence la montée de la concurrence entre les puissances mondiales, affirmant que cela pourrait forcer Israël à « adhérer à des normes plus élevées de démocratie libérale », dans la mesure où les États-Unis « pourraient se montrer moins tolérants envers les États qui contestent les valeurs démocratiques libérales ».

Le rapport indique qu’il s’agit peut-être là du défi politique le plus important auquel est confronté Netanyahou et avertit que tout accroc dans les relations avec Washington « aurait un impact direct sur la gestion des autres fronts par Israël ».

Hayman déconseille aux politiciens israéliens « les mesures perçues comme préjudiciables à la démocratie ou modifiant les relations avec les Palestiniens, ainsi que celles qui semblent insuffisamment alignées sur les États-Unis et l’Occident en ce qui concerne la Chine et plus spécifiquement la Russie ».

Par ailleurs, pour l’INSS, la menace la plus urgente pour Israël est la possibilité de l’effondrement de l’Autorité palestinienne (AP), qui administre la Cisjordanie occupée aux côtés de l’armée israélienne.

« Que l’Autorité palestinienne continue d’exister, malgré ses inconvénients, est clairement dans l’intérêt d’Israël », prévient le directeur du think tank.

« La fin de l’ère de Mahmoud Abbas en tant que président de l’AP sur fond de mécontentement et de frustration croissants parmi la jeunesse [palestinienne] » pourrait conduire à une recrudescence de la violence en l’absence de solution, estime-t-il.

Selon le rapport, la menace « la plus extrême » à laquelle Israël est confronté demeure toutefois l’Iran.

Alors que l’attention de l’Occident s’est détournée du Moyen-Orient pour se concentrer sur la Russie et la Chine – en particulier depuis l’invasion russe de l’Ukraine –, Israël et d’autres puissances régionales se sont retrouvés seuls face à la menace nucléaire et sécuritaire iranienne, selon l’INSS.

Commentant les conclusions de l’institut, le président israélien Isaac Herzog a déclaré : « Le front le plus inquiétant est celui que le rapport appelle ‘’le front intérieur’’. La sécurité d’Israël est étroitement liée à sa résilience nationale. »

Traduit de l’anglais (original).

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