Aller au contenu principal

« Je vais venir te tuer » : un ex-otage des Forces de soutien rapide au Soudan témoigne

Yaslam Altayeb a été retenu prisonnier par les paramilitaires soudanais à Khartoum. Il raconte les horreurs dont il a été témoin au cours de sa captivité
Yaslam Altayeb lors de son vol d’évacuation vers Birmingham, au Royaume-Uni (photo fournie)

Le jour de l’Aïd al-Fitr, vers 15 heures, une voix a retenti : « L’équipe d’assassins est arrivée. »

Yaslam Altayeb, un homme d’affaires soudanais de 49 ans possédant les nationalités néerlandaise et britannique, était détenu par les paramilitaires soudanais des Forces de soutien rapide (FSR) dans une base militaire de Khartoum.

À ses côtés se trouvait « le docteur », un homme réservé qu’il ne connaissait que sous ce surnom et qui lui avait seulement confié être titulaire d’un doctorat en finance et travailler pour une grande banque. Chaque fois qu’il essayait de lui parler, l’homme lui disait de se taire.

En entendant le bruit de la porte que l’on déverrouillait, il s’est préparé au pire. Il se souvient s’être dit : « C’est la fin. »

Quatre hommes sont entrés. « Ils étaient vraiment effrayants. Ils portaient des turbans et des AK-47. Ils avaient des pistolets à la ceinture et deux couteaux. »

L’un d’eux s’est tourné vers le docteur. « Hatem, viens. Ton heure est venue. »

Yaslam Altayeb n’a plus jamais revu son compagnon de cellule.

Alors que Hatem était emmené, l’homme s’est tourné vers Yaslam Altayeb et lui a dit : « Regarde là-bas, il y a un Coran. Commence à le lire. Quand nous en aurons fini avec ce type, nous viendrons te chercher. »

Ils ne sont pas revenus. À la place, l’homme d’affaires a entendu des discussions animées dans la cour à l’extérieur de sa cellule.

« Ils ont dit à Hatem : “Tu aurais dû parler hier, tu aurais dû nous donner les informations.” Il y a eu un petit silence, puis des coups de feu. Puis ils ont amené une autre personne. J’ai de nouveau entendu une dispute, puis des coups de feu. »

Yaslam Altayeb est resté parfaitement immobile. Ils l’accusaient d’être un espion. S’ils l’avaient vu bouger, essayer de voir ce qui se passait, ils auraient pu s’en servir comme preuve.

Lorsque l’appel du muezzin a retenti, il a saisi sa chance pour voir ce qui s’était passé. 

En se rendant dans la salle de bains pour son ablution, il a vu une personne sans vie gisant sous un drap. À côté de lui, une mare de sang rouge foncé s’était formée.

« Fais-le disparaître ! »

Un peu plus de deux mois plus tard, Yaslam Altayeb se trouve à Londres, loin de ses ravisseurs.

Mais les souvenirs de ces quinze jours de captivité aux mains des FSR ressurgissent. Il est animé par un désir nerveux de révéler les horreurs qu’il a subies et qui affligent encore son pays.

La guerre au Soudan a éclaté au petit matin du 15 avril. Les tensions montaient depuis des semaines entre l’armée régulière dirigée par le général Abdel-Fattah al-Burhan et les FSR, une puissante force paramilitaire menée par Mohamed Hamdan Dagalo, surnommé Hemetti

Si personne ne sait avec certitude qui a tiré en premier, les combattants des FSR avaient afflué à Khartoum et semblaient avoir un plan précis pour attaquer le quartier général de l’armée, où se trouvait Burhan.

Depuis lors, Khartoum est devenue un champ de bataille où les FSR et les Forces armées soudanaises (FAS) se disputent chaque rue. À l’ouest, au Darfour, les combats ont ravivé les conflits ethniques. Au sud, des groupes rebelles se sont joints à la mêlée, compliquant encore davantage la situation.

Des centaines de personnes ont été tuées depuis mi-avril et 2,5 millions de Soudanais ont été déplacés.

On est loin du Soudan de 2019, lorsque l’autocrate de longue date Omar el-Béchir était chassé du pouvoir par une révolution populaire – une époque porteuse d’espoir au cours de laquelle Yaslam Altayeb a relancé ses affaires dans son pays après de nombreuses années d’absence.

Ce samedi matin, il a été réveillé non pas par les coups de feu et les explosions dehors, mais par un appel téléphonique de son frère, qui souhaitait savoir ce qui se passait.

« J’ai une très bonne isolation, je n’ai rien entendu », raconte-t-il à Middle East Eye. « J’ai ouvert mes rideaux et j’ai vu de la fumée s’échapper du quartier général de l’armée.

Vue aérienne de la capitale soudanaise Khartoum couverte de fumée noire, le 19 avril 2023 (AFP)
Vue aérienne de la capitale soudanaise Khartoum couverte de fumée noire, le 19 avril 2023 (AFP)

Homme d’affaires prospère possédant des entreprises dans de nombreux secteurs, du bâtiment à la vente de viande en gros, Yaslam Altayeb habitait à al-Riyadh, un quartier huppé de l’est de la capitale.

Depuis chez lui, il pouvait voir le bureau de l’attaché militaire saoudien. Juste derrière se trouvait une résidence appartenant à Abdel-Raheem Hamdan Dagalo, le frère de Hemetti.

Al-Riyadh est connu pour ses rues paisibles, où les jeunes se rassemblent pour regarder passer des voitures bling-bling. On y trouve certains des meilleurs restaurants de la ville. « C’est le genre d’endroit où l’on emmène sa petite amie pour un rendez-vous galant », explique Yaslam Altayeb.

Devant le bureau de l’attaché militaire, se trouve un arbre sous lequel une femme s’installait tous les jours pour vendre du café fort. Les gens du quartier s’y retrouvaient pour discuter. Yaslam Altayeb a même fait connaissance avec des employés d’Abdel-Raheem, notamment son chef de bureau.

Mais en regardant depuis sa terrasse au quatrième étage ce samedi matin, il ne voyait que des combattants des FSR, des pick-up équipés de canons antiaériens, des camions remplis de munitions et du matériel militaire.

Dans le ciel, des avions de chasse MiG des FAS frôlaient les bâtiments. Le souffle de leurs moteurs le repoussait à l’intérieur.

Yaslam Altayeb partageait cet immeuble, où il avait également installé son bureau, avec trois partenaires commerciaux chinois et une personne employée pour le ménage. Ils ont décidé de rester sur place.

« Les tirs étaient ininterrompus. On entendait rugir les canons antiaériens utilisés pour tenter d’abattre les drones. On aurait dit des obus, boum, boum, boum, boum, boum ! »

À un moment donné, son immeuble a été mitraillé par des combattants qui visaient un MiG qui passait. L’eau a alors été coupée. Les quelques vivres dont ils disposaient se sont vite épuisés. Les FSR semblaient aussi manquer de nourriture : Yaslam Altayeb a vu des combattants frapper aux portes de ses voisins pour leur demander des vivres.

Soudan : une décennie de cheminement vers le chaos
Lire

Yaslam Altayeb est diabétique. Au bout de deux jours, il n’avait plus rien à manger. Le 19, il a commencé à se sentir très mal.

« J’ai commencé à sentir mes doigts et mes orteils s’engourdir. Cela indiquait que ma glycémie était très basse. Je me suis dit : “Bon, je vais mourir dans tous les cas, que ce soit par balle ou par manque de sucre ou de nourriture, et nous n’avons pas d’eau.” »

Il est donc sorti de chez lui. Dehors, des combattants des FSR en patrouille l’ont assailli de questions insistantes et empreintes de paranoïa. 

Un jeune combattant, qui ne devait pas avoir plus de 15 ans selon Yaslam Altayeb, lui a demandé de vider ses poches. Il en a sorti un passeport rouge.

Pour le jeune soldat, son passeport néerlandais était très suspect. « Tu es un diplomate ? Tu es un espion ? », lui a-t-il demandé.

En réalité, lui a répondu l’homme d’affaires, il travaillait pour les FSR. Avant la guerre, son entreprise avait été sollicitée pour agrandir plusieurs bases militaires des FSR, dont celle de Taiba, au sud de Khartoum. Même s’il avait auparavant rencontré des problèmes pour se faire payer, les relations étaient bonnes.

Cependant, dans les semaines qui ont précédé ce samedi, Yaslam Altayeb avait senti que quelque chose se tramait. Lors d’une visite d’une des bases des FSR, il avait constaté que les forces s’étaient considérablement étoffées.

Peu après que le jeune soldat l’eut dénoncé, un officier a commencé à éplucher les messages récents sur son téléphone. Sur l’un d’eux, il avait été informé d’une rumeur selon laquelle Hemetti avait été tué au cours d’une attaque aérienne.

Un autre message adressé au ministère néerlandais des Affaires étrangères comprenait sa localisation en direct, qu’on lui avait demandé d’envoyer pour des raisons de sécurité. Des appels récents montraient qu’il avait été en contact avec un ami qui est un ancien agent de renseignement et un commandant très haut placé au sein de l’armée.

quartier al-riyad khartoum soudan

Il n’en fallait pas plus.

Yaslam Altayeb a été emmené à la résidence d’Abdel-Raheem, qui semblait avoir été transformée en centre d’opérations. Soudain, il a reçu un coup de poing à l’arrière de la tête.

L’officier lui a hurlé : « Tu n’es pas musulman, tu es un traître, tu es répugnant ! » Il a arraché les chapelets d’Altayeb de sa poche et a commencé à le frapper avec, avant de lancer à un combattant : « Fais-le disparaître ! »

Qu’est-ce que cela signifiait ? L’emmener ou le tuer ?

« À ce moment-là, j’étais sûr à 110 % que c’était la fin », confie-t-il.

Seul le chef peut décider

Nul ne sait combien de personnes les Forces de soutien rapide ont capturées depuis que la guerre a éclaté. Kholood Khair, directrice du think tank Confluence Advisory établi à Khartoum, explique à Middle East Eye que le fait de se retrancher dans les quartiers résidentiels et de détenir des cibles civiles constitue une stratégie clé depuis le début du conflit.

Les activistes pro-démocratie, les journalistes, les médecins, les dirigeants syndicaux et les membres du monde des affaires soudanais sont tous pris pour cible.

« Je pense que les FSR ciblent des gens qui représentent des piliers essentiels de l’État soudanais, qu’ils tentent de détruire pour laisser la place à un nouvel État plus prompt à les accueillir », affirme-t-elle à MEE.

Middle East Eye a adressé une demande de commentaires aux Forces de soutien rapide, restée sans réponse.

Yaslam Altayeb était désormais meurtri en plus d’être affamé et affaibli. Les FSR l’ont emmené dans une base proche de l’aéroport, qui abrite des bureaux autrefois utilisés par les services de renseignement.

Il y a rencontré Ali Dakharo, un officier de haut rang connu pour être un leader de la branche étudiante du Congrès national, parti de l’ancien président Omar el-Béchir.

Ali Dakharo lui a demandé pourquoi il ne soutenait pas davantage les combats des FSR contre l’armée. « Quand tu as un désaccord avec ton père, tu le frappes avec un bâton ? », lui a répondu l’homme d’affaires.

« Oh, tu es un fauteur de trouble comme ils l’ont dit, un véritable sous-marin », a répliqué l’officier, reprenant le mot parfois employé au Soudan pour désigner les espions.

Ali Dakharo a indiqué à Yaslam Altayeb que son sort n’était pas entre ses mains. Seul « le chef » pouvait décider. « Il entendait par là le bureau de Hemetti », explique l’homme d’affaires.

Il a ensuite été emmené dans un bâtiment du complexe. Au milieu, dit-il, il y avait une cour couverte d’un toit métallique. Sur le côté ouest se trouvaient deux pièces, séparées par une salle de bain. Deux autres pièces se trouvaient sur le côté est, avec un local de stockage entre elles. Sur le côté sud, il y avait un réservoir d’essence : Yaslam Altayeb craignait de voir des frappes aériennes contre les FSR le toucher.

À côté se trouvait un hangar où étaient gardés environ 200 civils, pour la plupart arrêtés dans les rues d’al-Riyadh. Il y avait également une caserne où étaient détenus des membres de l’armée soudanaise.

quartier al-riyad khartoum soudan

Des images satellites du complexe montrent des bâtiments qui correspondent à ceux décrits par Yaslam Altayeb.

Yaslam Altayeb semblait avoir été placé là où l’on amenait des détenus importants, ou du moins des captifs dont on ne savait pas trop quoi faire. À son arrivée, Hatem était déjà dans sa cellule, un bureau réaménagé avec un lit et un matelas par terre.

Au cours des deux semaines qui ont suivi, Yaslam Altayeb a vu défiler de nombreux détenus dans le bâtiment où il se trouvait. Certains sont restés avec lui. D’autres ont été abattus dans la cour couverte, visible lorsque la porte de la cellule était ouverte.

Yaslam Altayeb a vu quatre de ces exécutions de ses propres yeux. D’autres, comme celle de Hatem, lui sont parvenues à travers les murs.

« Hatem a été exécuté. Je ne sais pas pourquoi. Mais à en juger par leur allure, leur comportement et leur façon de parler, on sait que ces gens ne plaisantent pas. Je pouvais le voir sur son visage. Il ne plaisantait pas quand il m’a dit : “Je vais venir te tuer.” »

« Il s’est approché de l’homme, il a pris son AK-47 et il l’a vidé sur son cadavre »

– Yaslam Altayeb

Une fois, se souvient-il, deux combattants ont amené un homme accusé d’être un voleur. Ils l’ont fait s’asseoir face à un mur. De temps à autre, le détenu essayait de tourner la tête vers un de ses ravisseurs pour lui dire quelque chose. La quatrième fois, l’un des combattants lui a tiré une balle dans la tête.

« Il a juste levé son pistolet. Le voleur est tombé raide mort. Puis ils ont continué de discuter comme si de rien n’était. Je n’ai pas été choqué par la mise à mort. J’ai été choqué par la réaction. »

« À la fin de leur conversation, il s’est approché de l’homme, il a pris son AK-47 et il l’a vidé sur son cadavre. »

Bon nombre des hommes amenés dans le bâtiment où se trouvait Yaslam Altayeb étaient des officiers de l’armée à la retraite, ou des membres de l’armée qui avaient un certain statut mais exerçaient des fonctions civiles, tels que des médecins, des ingénieurs ou des architectes.

Selon Yaslam Altayeb, les FSR les forçaient à revêtir l’uniforme de l’armée et les prenaient en photo, avant de publier leurs prises en présentant ces hommes comme des éléments importants des forces armées.

Un jour, il a discuté avec quelqu’un qui travaillait comme infirmier à l’hôpital Sharq al-Nil, l’un des plus grands de Khartoum. Cette personne lui a dit que les forces de sécurité avaient fermé les étages supérieurs de l’hôpital et que les meilleurs chirurgiens et médecins de la capitale y avaient été emmenés pour s’occuper en urgence d’un haut responsable.

« Plus tard, l’un des officiers m’a dit que c’était bien Hemetti », raconte Yaslam Altayeb.

Exécutions, actes de torture et humiliations

Yaslam Altayeb a été détenu pendant quinze jours. Après l’exécution de Hatem, d’autres hommes ont été amenés dans sa cellule.

L’un d’eux était le fils d’un grand nom du secteur bancaire. Deux autres, Khaled Zayed et Omar*, étaient des officiers des FSR détachés des services de renseignement. Arrêtés par leurs propres hommes et soupçonnés de double loyauté, ils ont d’abord été détenus dans le palais républicain, sur la rive sud du Nil Bleu. Le site a ensuite été la cible d’intenses bombardements.

Lorsqu’Omar et Zayed sont arrivés dans le bâtiment où Yaslam Altayeb était détenu, les deux hommes étaient désemparés. « Omar était bouleversé, très émotif. Il m’a confié qu’il se sentait trahi. Il m’a dit : “Je suis commandant d’une unité et je n’ai pas été informé de ce qui se passait.”

Pendant deux semaines, les quatre hommes ont assisté à des exécutions, des actes de torture et des humiliations dans la cour à l’extérieur de leur cellule. 

Les paramilitaires avaient du mal à nourrir leurs détenus et même à se nourrir eux-mêmes. Pendant quelques jours, leur seule nourriture était de la viande de moutons confisqués à des bergers.

À l’abri des regards se trouvait un charnier. Les combattants des FSR arrivaient à la base dans des pick-up maculés de sang, transportant des personnes tuées au combat. Les détenus sommairement exécutés y étaient également jetés, se souvient Yaslam Altayeb.

« Un homme est arrivé avec un sac en plastique dégoulinant de sang. Il a demandé : “Où est la fosse ?” Il était là pour enterrer un camarade, ou ce qu’il en restait. »

Yaslam Altayeb s’est efforcé de rester calme tout au long de sa détention.

« Je regardais. Je ne réagissais pas, je ne ressentais rien. Je laissais juste les choses se passer devant moi. »

Il se souvient qu’un de ses compagnons de cellule a « piqué une crise ».

« Je lui ai dit qu’il n’y avait rien à faire. Que si on devait mourir, on mourrait. Qu’il fallait laisser couler. Qu’en fin de compte, ce n’était que la mort. Que soit on racontait une histoire, soit on mourait. »

Un jour, Ali Dakharo a convoqué Yaslam Altayeb à son bureau.

« Il m’a pris la main comme si nous étions des amis très proches. Et il m’a dit : “On ne t’a pas très bien traité, hein.” J’ai répondu : “Ouais, vous m’avez pris ma liberté.” Et il s’est mis à rire. Il m’a dit : “Ouais, parce que nous sommes des étrangers, vous nous regardez de haut, nous sommes du Tchad, du Niger.” »

La colonne vertébrale des FSR est constituée de combattants d’origine arabe issus de milices du Darfour, dont les liens familiaux dépassent souvent les frontières du Soudan. La propre famille de Hemetti est répartie entre le Soudan et le Tchad.

La plupart des combattants des Forces de soutien rapide sont issus de tribus arabes de l’ouest du pays (AFP)
La plupart des combattants des Forces de soutien rapide sont issus de tribus arabes de l’ouest du pays (AFP)

L’homme d’affaires a été invité à s’asseoir et s’est vu offrir de l’eau potable.

« Tu te souviens que je t’ai dit que ton destin n’était pas entre mes mains ? », lui a demandé l’officier. Eh bien, on a reçu un message du bureau du commandant. Tu rentres chez toi. Mais on ne te libère pas. On doit te remettre à ton ambassade. »

On lui a ensuite tendu un téléphone.

Son premier interlocuteur a été le conseiller juridique de Hemetti. « Il m’a dit : “Nous sommes désolés, c’est un malentendu. Mais les Néerlandais et les Britanniques nous ont contactés et nous vous laissons partir.” »

Fares al-Nour, conseiller médias de Hemetti, l’a ensuite appelé. Lui aussi a présenté ses excuses.

Yaslam Altayeb a ensuite échangé avec une troisième personne, qui l’a salué en néerlandais. Il s’agissait du ministre néerlandais des Affaires étrangères. Un avion l’attendait pour l’emmener aux Pays-Bas. 

Les FSR voulaient cependant le déposer sur un pont et le laisser rejoindre l’avion par ses propres moyens. Selon lui, s’il avait été relâché de cette manière, il aurait été abattu par un sniper et sa mort aurait été reprochée à l’armée.

Au lieu de cela, il a été déposé à l’ambassade des États-Unis, puis emmené à Port-Soudan. Les autorités britanniques l’ont ensuite emmené à Chypre et enfin à Birmingham.

« Au moment où l’avion atterrissait, j’ai commencé à pleurer. Les larmes coulaient sur mon visage. »

« Je veux changer les choses »

Par ce témoignage, l’homme d’affaires soudanais espère mettre la pression sur les Forces de soutien rapide pour qu’elles libèrent ses compagnons de cellule, comme Omar et Zayed. Les proches des deux officiers partagent ce sentiment.

D’après Yaslam Altayeb, chaque fois que des avions de guerre de l’armée ciblent la zone, Omar et Zayed sont ligotés près du stock de carburant.

« Ils veulent qu’ils soient tués, mais pas par leur faute. Par une attaque aérienne de l’armée, un tir d’artillerie ou autre chose. »

Yaslam Altayeb monte à bord d’un avion lors de son évacuation (photo fournie)
Yaslam Altayeb monte à bord d’un avion lors de son évacuation (photo fournie)

« Les FSR se servent des otages. D’une part comme boucliers humains et d’autre part contre les forces armées soudanaises », souligne Kholood Khair de Confluence Advisory.

« Les FSR ont compris qu’à moins de prendre des boucliers humains, ce qui est un crime de guerre, elles subiraient des bombardements beaucoup plus importants de la part des FAS », ajoute-t-elle.

« Je pense qu’à bien des égards, ils ont surestimé la volonté des FAS de protéger non seulement leurs propres troupes, mais aussi l’État qu’elles ont contribué à créer. »

Malgré cette expérience, Yaslam Altayeb est prêt à tout pour rentrer au Soudan. Il a créé une organisation caritative, Helping Hands (SAWAEID), pour venir en aide aux citoyens soudanais vulnérables.

« Je veux partir maintenant, pour être tout à fait honnête avec vous. Je veux changer les choses au Soudan. C’est la raison pour laquelle je suis revenu en premier lieu. Mais maintenant, il est devenu urgent pour moi d’apporter un véritable changement, afin que ce genre de choses ne se reproduise plus jamais. »

* Nom modifié pour des raisons de sécurité.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].