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Syrie : des photos d’Asma al-Assad publiées par l’AFP accusées de détourner l’attention des crimes de guerre

L’agence de presse française a suscité l’indignation en publiant des photos accusées d’aider à étouffer le rôle de la première dame dans les crimes de guerre commis par le gouvernement syrien
​​​​​​​Cette photo de l’Agence France Presse montrant l’épouse du président syrien en train de récolter des roses a déclenché une polémique sur les réseaux sociaux (AFP)
Par Pauline

Une photographie de l’Agence France Presse (AFP) montrant la première dame syrienne Asma al-Assad en train de cueillir des roses dans la campagne de Damas a suscité l’indignation sur les réseaux sociaux.

Les internautes accusent l’agence de presse française d’aider à étouffer les violations des droits de l’homme commises par le gouvernement syrien, lesquelles, selon les observateurs des droits de l’homme, s’apparentent à des crimes de guerre.

La photo a été initialement partagée le 25 mai par la cheffe du bureau libano-syrien de l’AFP, Acil Tabbara, avec la légende : « La première dame syrienne Asma al-Assad récolte des roses damascena (de Damas) dans le village d’al-Marah, dans la campagne de Damas, le 25 mai 2023. »

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Le message a rapidement entraîné des centaines de commentaires et de retweets, allant du cynisme et de l’indignation à l’incrédulité : beaucoup affirment qu’il aide à détourner l’attention de la complicité d’Asma al-Assad dans les violations des droits commises par le gouvernement syrien.

Les internautes ont adressé leurs critiques à la fois à l’agence et à la première dame.

Plusieurs ont fait un parallèle entre ces photos et les niveaux élevés d’insécurité alimentaire dans ce pays déchiré par la guerre.

« Les gens meurent de faim pour la première fois de notre histoire, et la seule chose qu’elle fait est de poser pour les caméras », a commenté un certain @MouhannadMALEK.

Plus tôt ce mois-ci, la Syrie a été réadmise au sein de la Ligue arabe, une décision dénoncée par Washington et des militants des droits humains.

Bien que la plupart des critiques soient dirigées contre Bachar al-Assad, des militants et experts affirment que la première dame est également « coupable » de crimes de guerre.

Le silence initial d’Asma au sujet des actions de son mari s’est ensuite transformé en un soutien actif. Son image est passée de « rose du désert » à « première dame de l’enfer ».

Un autre utilisateur de Twitter l’a comparée à Marie-Antoinette.

Traduction : « La version syrienne de Marie-Antoinette. Quel désastre !!! Les gens meurent de faim pour la première fois de notre histoire, et la seule chose qu’elle fait est de poser pour les caméras »

Monica Marks, spécialiste du Moyen-Orient, a fait un parallèle entre le message de l’AFP et un célèbre article de Vogue de 2011 intitulé « Asma al-Assad : une rose dans le désert ».

Traduction : « Pourquoi la cheffe du bureau Liban-Syrie de l’AFP,
@aciltab poste-t-elle ça ? Cela donne des vibrations flatteuses au profil "Asma al-Assad : une rose dans le désert" de
Vogue 2011. C’était odieux, bien qu’écrit *avant* que le régime de son mari ne tue plus de 200 000 personnes. Ce tweet… »

L’article, qui a depuis été retiré, dressait un portrait élogieux de la première dame, dans lequel les Assad étaient présentés comme un couple « extrêmement démocratique », axé sur la famille, qui passe ses vacances en Europe, encourage le christianisme et a fait de la Syrie le « pays le plus sûr du Moyen-Orient ».

Acil Tabbara a supprimé son tweet le 26 mai mais plus d’une douzaine de photographies et une vidéo d’Asma al-Assad lors de la récolte des roses sont toujours sur le site de l’agence. D’autres utilisateurs de Twitter continuent de partager et critiquer les photos de l’agence de presse.

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Acil Tabbara a déclaré à Middle East Eye qu’elle n’avait « aucun commentaire à faire ». MEE a également contacté la rédaction de l’AFP mais n’avait reçu aucune réponse au moment de la publication.

Les critiques suscitées par la photo s’inscrivent dans le cadre d’un débat plus large sur la normalisation des liens avec le gouvernement Assad.

Au fil des ans, Asma est devenue l’une des personnalités les plus influentes du monde des affaires et du gouvernement du pays. Un article du Financial Times publié en avril détaille son influence sur le secteur des affaires et l’économie syrienne.

En 2021, le cabinet britannique d’avocats spécialisé dans les droits de l’homme Guernica 37 a soumis deux dossiers confidentiels au Metropolitan Police Service de Londres en vue d’ouvrir des enquêtes sur le rôle d’Asma al-Assad, qui possède également la nationalité britannique, dans la guerre en Syrie.

Cette dernière a prononcé des discours de soutien aux forces armées syriennes, lesquelles ont, pendant une décennie de guerre, ciblé des zones civiles, notamment des hôpitaux et des écoles, à l’aide de bombes barils et d’artillerie lourde.

Les militants affirment qu’un tel recours aveugle à la force, qui comprend également l’utilisation d’armes chimiques, constitue une violation des lois internationales et nationales, y compris celles du Royaume-Uni.

Traduit de l’anglais (original).

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