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Le rival d’Erdoğan ? L’espoir incarné par l’homme en passe de devenir le nouveau maire d’Istanbul

Alors qu’un recomptage est en cours après le scrutin serré et contesté aux élections municipales de dimanche, l’opposition turque place tous ses espoirs en Ekrem İmamoğlu
En raison de son succès, Ekrem İmamoğlu est déjà présenté comme un rival du président Erdoğan (Reuters)
Par Omer Faruk Gorcin à ISTANBUL, Turquie

Alors qu’Istanbul est actuellement disputée, que des plaintes émanent de divers partis politiques et qu’un recomptage est en cours après le scrutin serré et contesté aux élections municipales de dimanche dernier, tous les projecteurs sont tournés vers un seul homme : Ekrem İmamoğlu. 

Nommé pour briser le contrôle du Parti de la justice et du développement (AKP) sur le cœur économique de la Turquie, et représentant la coalition constituée du Parti républicain du peuple (CHP, laïc) et du parti de droite İYİ, İmamoğlu est un nouveau venu dans le monde politique turc qui pourrait être sur le point de battre un ancien Premier ministre pour diriger la plus grande ville de Turquie. 

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Selon les chiffres initiaux, Ekrem İmamoğlu aurait 25 000 voix d’avance sur Binali Yıldırım, Premier ministre jusqu’à ce que cette fonction soit abolie lors d’un référendum qui a fait basculer le pays vers un système présidentiel en 2017. 

Cette victoire majeure pourrait être sienne – et serait seulement la deuxième victoire électorale de sa carrière –, mais cela dépend des résultats d’un recomptage des voix demandé par l’AKP dans sept districts d’Istanbul. De même, le CHP a contesté les résultats dans deux autres districts.

Jeudi matin, le porte-parole du CHP, Faik Öztrak, a déclaré à Fox TV qu’un recomptage avait été ordonné dans 21 des 39 districts d’Istanbul en raison de votes invalides. Un recomptage total a été commandé dans cinq districts.

Quoi qu’il en soit, le résultat a placé Ekrem İmamoğlu sur la carte politique, les médias étrangers et les analystes politiques l’ayant désigné comme une personne susceptible de pouvoir défier les dix-sept années de mandat de l’AKP – bien que des questions subsistent quant à son manque d’expérience et à l’image conservatrice qu’il a cultivée. 

La promesse qu’il offre, selon İlayda Çağla Koçoğlu, directrice adjointe du CHP pour la province d’Istanbul qui a travaillé étroitement avec lui au cours de sa campagne, est de reproduire le succès de sa démarche en tant que maire d’une municipalité d’Istanbul. 

« À Beylikdüzü, son ancien quartier, il a examiné les problèmes, parcourant rue après rue, et a cherché des solutions par lui-même », déclare-t-elle, expliquant qu’il envisageait de faire de même pour la ville dans son ensemble. 

Un passif avec l’AKP

Âgé de 49 ans, Ekrem İmamoğlu est né dans un petit village de la mer Noire au nord de la Turquie et y a vécu jusqu’à ce qu’il ait eu la possibilité d’étudier à la Business Administration School de l’Université d’Istanbul. Diplômé en 1992, il s’est installé à Beylikdüzü, un district d’Istanbul dont il est devenu maire en 2014, et a commencé à travailler dans l’entreprise de construction familiale.

Petite banlieue située à l’ouest d’Istanbul, Beylikdüzü a connu un boom démographique après le tremblement de terre de Marmara en 1999, qui a tué des milliers de personnes et vidé les quartiers existants. Avec la construction de nouvelles lignes de transport en commun, sa population est passée de 3 000 personnes dans les années 1990 à 350 000 en 2018.

Ekrem İmamoğlu a été élu à la tête de la section jeunesse du CHP en 2009 et cinq ans plus tard, il a remporté ses premières élections publiques pour devenir maire de district. 

Ekrem İmamoğlu pose avec sa mère lors de la campagne des municipales à Istanbul (Reuters)
Ekrem İmamoğlu pose avec sa mère lors de la campagne des municipales à Istanbul (Reuters)

« Avant lui, Beylikdüzü était sous l’administration de l’AKP, comme dans tout autre district nouvellement créé. Sa victoire contre l’AKP à Beylikdüzü a été un facteur important qui lui a valu d’être candidat dans la campagne pour Istanbul », poursuit İlayda Çağla Koçoğlu. « Mais personnellement, j’admire son style de travail discipliné et la manière dont il établit des relations avec les personnes avec lesquelles il a dialogué. » 

À titre d’exemple, elle raconte qu’il demandait toujours comment elle rentrait chez elle après de longues journées de travail et lui proposait d’appeler un taxi. « Il n’oublie jamais les détails vous concernant et vous rappelle qu’il se soucie de vous. » 

Un nouvel Erdoğan ?

C’est la mairie d’Istanbul qui a propulsé le président Recep Tayyip Erdoğan sur le devant de la scène en 1994, lui permettant d’accéder plus tard aux plus hautes fonctions de l’État, qu’il occupe depuis près de deux décennies.

On suggère déjà qu’İmamoğlu pourrait être en mesure de le défier à la présidence. 

Zeynep Balcioglu, universitaire de la Northeastern University de Boston qui a mené des recherches sur le terrain dans les 39 municipalités d’Istanbul sur les services sociaux, en particulier pour les défavorisés, explique à MEE qu’İmamoğlu a une « endurance politique ». 

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« Il a fait preuve d’endurance durant la nuit électorale controversée en conservant son calme et, pendant la campagne électorale, il a toujours fait preuve d’une attitude positive », juge-t-elle. 

Cependant, certains des titres de la presse étrangère, affirmant que l’influence d’Erdoğan est sur le déclin et présentant İmamoğlu comme une « force unificatrice », ont été publiés trop tôt selon elle. 

« Ce serait une énorme affirmation. D’une manière ou d’une autre, le nom d’Erdoğan est écrit en lettres capitales dans l’histoire politique turque. Il est trop tôt pour dire une telle chose à propos d’İmamoğlu », estime-t-elle, ajoutant qu’avoir un bon bilan en tant que maire était considéré par de nombreux politiques en herbe comme un schéma de progression dans les rangs politiques, défini par Erdoğan. 

« Le fait qu’Erdoğan ait commencé sa carrière dans une municipalité donne l’espoir à un certain nombre de maires de devenir une personnalité semblable à Erdoğan. Je peux dire que la carrière d’Erdoğan est considérée comme une “feuille de route”. »

Dans l’attente du résultat définitif

L’ascension d’Ekrem İmamoğlu ne s’est pas faite sans critiques, lesquelles ont afflué de toutes parts. Le CHP, le Parti démocratique des peuples (parti de gauche et pro-kurde), et de nombreux membres de l’AKP ont accusé İmamoğlu d’avoir imité Erdoğan.

Lorsqu’il a réagi au meurtre de 50 fidèles musulmans en Nouvelle-Zélande en enregistrant une vidéo de sa lecture du Coran à l’intérieur de la mosquée Eyüp Sultan, il a été accusé par certains de se mettre en avant ou d’essayer d’attirer les électeurs conservateurs. 

Ali Kirimli, un des électeurs de la circonscription d’İmamoğlu à Beylikdüzü, a pour sa part des préoccupations plus simples. Il dit ne pas avoir voté pour lui parce qu’il doute de sa capacité à gouverner une ville aussi grande qu’Istanbul. 

« Il a une attitude positive mais ce n’est pas la qualité que je recherche chez un maire, je peux vous l’assurer ; je vis dans une partie de Beylikduzu qu’il a totalement oubliée. »

Les débats autour du potentiel futur d’İmamoğlu reposent toutefois sur le résultat des recomptages qui détermineront s’il deviendra ou non le maire d’Istanbul.

Le président du Conseil électoral supérieur, Sadi Güven, a annoncé mercredi la nécessité de procéder à des recomptages dans la majeure partie d’Istanbul. L’attente d’Ekrem İmamoğlu risque donc d’être longue. 

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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