Washington ne considère plus les colonies israéliennes comme contraires au droit international
L’administration Trump a de nouveau remis en cause lundi le consensus international sur le conflit israélo-palestinien, en annonçant que les États-Unis ne considéraient plus comme illégales les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée.
Après la reconnaissance unilatérale de Jérusalem comme capitale d’Israël et celle de la souveraineté israélienne sur le Golan syrien, il s’agit d’une nouvelle décision spectaculaire en rupture avec la tradition diplomatique américaine, aussitôt saluée par le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et dénoncée par l’Autorité palestinienne (AP).
« Après avoir examiné soigneusement tous les arguments de ce débat juridique », l’administration Trump conclut que « l’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international », a déclaré le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo devant la presse.
« L’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international »
- Mike Pompeo, secrétaire d’État des États-Unis
Il a tenu à présenter cette annonce comme un retour à l’interprétation du président Ronald Reagan au début des années 1980, se démarquant surtout de la précédente administration démocrate de Barack Obama, qui avait condamné la colonisation.
Mais la politique américaine s’appuyait en fait jusqu’ici, au moins théoriquement, sur un avis juridique du département d’État remontant à 1978, selon lequel « l’établissement de colonies de population dans ces territoires » n’était « pas conforme au droit international ».
Ces colonies installées sur les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 sont en effet jugées illégales par l’ONU, et une grande partie de la communauté internationale voit en elles un obstacle majeur à la paix.
Mike Pompeo a donc décidé que cet avis de 1978 était caduc.
« La vérité, c’est qu’il n’y aura jamais de solution judiciaire au conflit, et que les débats sur qui a raison et qui a tort au regard du droit international n’apporteront pas la paix », a-t-il estimé.
Il a également fait valoir que cette décision ne préjugeait pas du « statut final » de la Cisjordanie, dont le sort dépendra de futures négociations entre Israéliens et Palestiniens, rendues très hypothétiques par un processus de paix au point mort. L’administration Trump tarde d’ailleurs à dévoiler son propre plan de paix, surnommée « accord du siècle », et rejeté par avance par les Palestiniens.
En avril, Mike Pompeo avait refusé de dire si Washington s’opposerait à une éventuelle annexion des colonies de Cisjordanie par Israël, une idée évoquée par la droite israélienne au pouvoir.
Coup de pouce à Netanyahou
La décision américaine pourrait être interprétée comme un nouveau coup de pouce à Benyamin Netanyahou, qui a proposé d’annexer une partie des colonies de Cisjordanie occupée, au moment où les partis israéliens mènent de difficiles tractations pour former un gouvernement.
Pour le chef du gouvernement sortant, l’interprétation de son plus proche allié sur les colonies « est le reflet d’une vérité historique : que les juifs ne sont pas des colonisateurs étrangers en Judée-Samarie », selon le nom biblique utilisé en Israël pour désigner la Cisjordanie occupée.
Selon le rabbin Alissa Wise, co-directeur de Jewish Voice for Peace, l’annonce de l’administration américaine concernant les colonies vise à apporter un soutien politique tant à Netanyahou qu’à Donald Trump lui-même, qui souhaite être réélu en 2020.
« L’administration Trump ne s’est jamais concentrée sur la promotion de la paix, mais cherche plutôt à soutenir la carrière de Netanyahou et de Trump, et à perpétuer le contrôle et la domination d’Israël sur la terre et les vies des Palestiniens, à tout prix », a-t-il déclaré dans un communiqué.
L’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas a pour sa part vivement condamné la déclaration américaine.
Washington n’est « pas qualifié ou autorisé à annuler des dispositions de droit international et n’a pas le droit de légaliser des colonies israéliennes », a déclaré le porte-parole de la présidence palestinienne, Nabil Abou Roudeina.
« La politique israélienne consistant à installer des civils dans des territoires occupés est considérée comme un crime de guerre par le statut de la Cour pénale internationale »
- Amnesty International
L’AP ne considère plus les États-Unis comme un médiateur possible, ni même un simple interlocuteur, dans le conflit qui l’oppose à Israël et a mis fin à tous ses contacts avec les Américains depuis l’annonce concernant Jérusalem.
Washington a en outre cessé toute aide financière aux Palestiniens.
L’Union européenne s’est aussi rapidement démarquée de l’annonce de Washington, en rappelant sa position « claire » et « inchangée ».
« Toute activité de colonisation est illégale au regard du droit international et compromet la viabilité de la solution à deux États et les perspectives d’une paix durable, comme le réaffirme la résolution 2334 du Conseil de sécurité des Nations unies », a déclaré la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini dans un communiqué à Bruxelles.
Les colonies de peuplement israéliennes dans les territoires palestiniens occupés constituent une violation de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
« La politique israélienne consistant à installer des civils dans des territoires occupés est considérée comme un crime de guerre par le statut de la Cour pénale internationale », a rappelé Amnesty International.
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