Guerre en Ukraine : ces politiciens favorables à l’accueil des réfugiés ukrainiens – mais pas des musulmans
Alors que l’invasion russe de l’Ukraine se poursuit et dévaste d’innombrables vies au passage, plus de 2 millions de personnes se sont désormais réfugiées dans les pays voisins.
Si la plupart des hommes entre 18 et 60 ans sont restés pour défendre l’Ukraine, les femmes et les enfants se sont dirigés vers les postes frontières pour chercher refuge à l’étranger.
Pour le Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU, il s’agit de la crise migratoire qui connaît « la croissance la plus rapide en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale ».
Plusieurs pays européens ont accueilli ces réfugiés : ils sont notamment plus d’un million en Pologne, 191 000 en Hongrie, 140 000 en Slovaquie, 83 000 en Moldavie et 82 000 en Roumanie.
À travers l’Europe, des politiciens populistes et de droite ont saisi cette occasion pour faire la distinction entre les réfugiés ukrainiens et ceux qui viennent d’ailleurs – à savoir de pays musulmans et du Moyen-Orient.
« Ces gens sont européens »
Le député espagnol et dirigeant du parti d’extrême droite Vox, Santiago Abascal, a déclaré que son pays accueillerait des réfugiés ukrainiens, mais pas musulmans.
« Tout le monde peut distinguer [les réfugiés ukrainiens] de l’invasion de jeunes hommes en âge de faire l’armée d’origine musulmane qui se sont lancés à l’assaut des frontières européennes pour tenter de déstabiliser et de coloniser [l’Europe] », affirmait-il au Parlement la semaine dernière.
Quelque 6 000 réfugiés devraient arriver en Espagne, a confirmé le ministre de l’Inclusion, de la Sécurité sociale et des Migrations.
Traduction : « Très applaudi à l’Assemblée, le député espagnol et président de Vox Santiago Abascal soutient que l’Europe doit accepter les réfugiés ukrainiens blancs mais interdire tous les réfugiés musulmans, qualifiant les musulmans de “colonisateurs”. 😳 Islamophobie et fascisme suprémaciste blanc manifestes. »
Dans le même temps en Bulgarie, le président Rumen Radev a alimenté des stéréotypes racistes à propos des réfugiés non européens qui seraient liés au terrorisme et à la criminalité.
« Il ne s’agit pas des réfugiés auxquels nous sommes habitués… ces gens sont européens », a-t-il déclaré à la presse, faisant référence aux Ukrainiens.
« Ces gens sont intelligents, ils sont éduqués… Il ne s’agit pas de la vague de réfugiés dont nous avons l’habitude, des gens dont nous n’étions pas sûrs de l’identité, des gens au passé obscur qui pourraient même avoir été des terroristes. »
« En d’autres termes, il n’y a pas un pays en Europe aujourd’hui qui a peur de l’actuelle vague de réfugiés », a-t-il ajouté.
Cité par Associated Press, le journaliste syrien Okba Mohammad estime que cette déclaration « mélange racisme et islamophobie ».
« Pas une région éloignée d’Afrique »
En Grèce, le député du parti au pouvoir Dimitris Kairidis a déclaré dans une émission télévisée en direct que « s’assoir et être massacré au cœur de l’Europe… et pour le dire cyniquement, ici on ne parle pas d’un massacre dans une région éloignée d’Afrique avec des païens, mais – pour le dire assez cyniquement, je sais que cela semble politiquement incorrect, mais malheureusement cela compte aussi – des chrétiens, des Blancs, des Européens, qui sont comme nous, viennent d’ici ».
En France, le député Jean-Louis Bourlanges, président de la Commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale, a déclaré sur l’antenne d’Europe 1 vendredi 25 février : « Il faut prévoir un flux migratoire. Ce sera sans doute une immigration de grande qualité en revanche. Ce seront des intellectuels, pas seulement, mais on aura une immigration de grande qualité dont on pourra tirer profit. »
Le candidat d’extrême droite à la présidentielle française Éric Zemmour a tenu le même genre de propos, se disant favorable à l’accueil des réfugiés ukrainiens, qui selon lui « poseront moins de problèmes d’assimilation » que les immigrés originaires du monde arabo-musulman.
Ailleurs, le politicien conservateur danois Marcus Knuth a tweeté la photo d’un document listant le nombre de ressortissants étrangers bloqués en Ukraine, avec les chiffres pour l’Irak, la Syrie, l’Iran et l’Afghanistan encerclés.
« Bien entendu, nous aiderons tous les Ukrainiens. Mais nous n’inviterons pas les 2 300 Afghans et Syriens réfugiés en Ukraine ainsi que les potentiels 10 000 autres venant du Moyen-Orient », a-t-il indiqué.
Traduction : « Les conservateurs danois s’opposent à une loi d’urgence pour accorder le statut de résidents temporaires aux réfugiés ukrainiens au Danemark. Le motif ? Ils ne veulent pas que les Arabes et musulmans qui vivent aussi en Ukraine soient autorisés à venir. Du racisme méprisable, purement et simplement. »
Le Danemark a suscité l’indignation après l’exemption des réfugiés ukrainiens de sa loi controversée sur les bijoux qui avait été utilisée contre les réfugiés syriens, entre autres, et qui permettait de saisir les biens de valeur de ceux qui fuient les conflits.
Le ton et le discours autour de la guerre en Ukraine a été largement critiqué et des accusations de discrimination et de double standard ont été lancées. Plusieurs organes de presse ont été fustigés pour leurs clichés racistes, comparant souvent les Ukrainiens « civilisés » et ceux qui fuient les guerres au Moyen-Orient.
Samedi, la top-modèle palestinienne Bella Hadid a partagé une publication Instagram réclamant des réactions semblables à celles suscitées par l’invasion russe de l’Ukraine quand il s’agit de la souffrance des musulmans à travers le monde – notamment en Palestine et en Chine.
La semaine dernière, un footballeur turc a refusé de porter un t-shirt contre la guerre condamnant l’invasion russe, se justifiant par l’absence de solidarité avec les victimes des guerres au Moyen-Orient.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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