Pour échapper aux sanctions, les oligarques russes trouvent refuge à Dubaï
En ce moment, il ne fait pas bon être un oligarque russe en Europe.
Le 22 mars, le yacht de Dmitry Pumpyanski, patron du géant des pipelines TMK, a été saisi dans l’enclave britannique de Gibraltar. Ce navire, battant pavillon maltais et baptisé Axioma, faisait « l’objet d’une demande de saisie de la part d’une grande banque internationale auprès de la Cour suprême de Gibraltar », a indiqué lundi le gouvernement de ce petit territoire situé à l’extrême sud de l’Espagne.
Photo du yacht de Dmitry Pumpyanski
Gibraltar a autorisé le navire à entrer dans son port, ce qui était interdit en vertu des sanctions britanniques visant nombre d’oligarques russes.
Plusieurs pays, comme l’Espagne, l’Italie et la France, ont aussi saisi des yachts appartenant aux Russes les plus fortunés dans le cadre des sanctions européennes prévoyant le gel de tous leurs avoirs dans l’Union européenne.
Mais qu’importe, les richissimes hommes d’affaire russes ont trouvé une solution pour eux et leurs familles : s’exiler à Dubaï, aux Émirats arabes unis (EAU). La riche monarchie pétrolière a refusé d’adopter des sanctions en représailles à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
« Incroyable »
Comme le rapporte le quotidien britannique The Guardian, des dizaines de Russes – dont beaucoup parmi les personnalités les plus riches du cercle restreint de Vladimir Poutine – ont afflué ces derniers jours à l’aéroport de Dubaï.
Selon le New York Times, les avions de Roman Abramovitch, le propriétaire du club de football anglais de Chelsea, et d’Arkadi Rotenberg, empereur du BTP, ont été repérés au début du mois de mars sur les tarmacs de l’émirat.
Le magnat du charbon, Andreï Melnitchenko, propriétaire du plus grand voilier de la planète, un trois-mâts de 143 m de long, récemment saisi en Italie, a également été aperçu à Dubaï ces dernières semaines.
« Banquiers, agents immobiliers, concessionnaires automobiles et marinas signalent une demande extraordinaire de maisons, de voitures de sport et d’espaces d’amarrage », peut-on lire en ligne.
Les agents immobiliers parlent ainsi d’une situation « incroyable », les investisseurs russes s’emparant d’appartements sans les voir, soit en les achetant directement, soit en payant un an de loyer à l’avance.
Pour ce faire, ils transfèrent leurs fonds via cryptomonnaies grâce à un intermédiaire, puis l’argent est remis aux propriétaires.
Un « environnement réceptif aux investissements »
Connus pour être un « environnement réceptif aux investissements » et pour « poser peu de questions », les Émirats arabes unis délivrent un permis de séjour et un compte bancaire dans les 30 jours suivant l’enregistrement d’une entreprise. La résidence permanente peut être achetée pour le prix d’une villa de luxe, environ un million et demi de dollars.
Pour un bien de cinq millions d’euros, il est possible de rester à Dubaï pendant dix ans sans renouveler leur visa, explique aussi sur Europe 1 Audray Charpenel, agence immobilier à Dubaï.
« À première vue, les Émirats arabes unis semblent penser qu’ils peuvent contourner les sanctions américaines, mais il est peut-être trop tôt pour qu’ils aient intériorisé ce que signifie vraiment cette campagne occidentale de sanctions anti-russes », commente au Guardian Julien Barnes Dacey, responsable du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord au Conseil européen des relations internationales (ECFR).
Depuis le début du conflit en Ukraine, les EAU refusent de prendre parti. Cela « ne ferait qu’engendrer davantage de violence », avait tweeté Anwar Gargash, conseiller diplomatique du président Khalifa ben Zayed al-Nahyane, fin février. Les Émirats venaient alors de s’abstenir de voter en faveur d’une résolution pour dénoncer l’invasion de l’Ukraine.
Quelques heures avant que la Russie ne déclenche son attaque, les Émirats arabes unis avaient souligné leur « profonde amitié » avec Moscou.
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