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À Gaza, le bourdonnement constant des drones israéliens, une autre souffrance psychologique pour la population

Hors temps d’escalade militaire, les drones israéliens volent en moyenne 4 000 heures par mois au-dessus de Gaza, soit l’équivalent de cinq drones qui voleraient en permanence
Un garçon palestinien pointe son doigt vers le ciel afin de montrer deux drones israéliens survolant l’enclave palestinienne de Gaza (AFP/Roberto Schmidt)
Un garçon palestinien pointe son doigt vers le ciel afin de montrer deux drones israéliens survolant l’enclave palestinienne de Gaza (AFP/Roberto Schmidt)
Par AFP à GAZA, Palestine occupée

« Le matin, au lycée, je demande souvent à mes copines : “Avez-vous pu dormir cette nuit avec tous ces drones ?” », relate Bissam.

À Gaza, cette Palestinienne n’est pas la seule à être exaspérée par le bourdonnement constant de ces engins volants

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Le ciel de l’enclave, microterritoire sous contrôle du Hamas, est patrouillé par l’aviation israélienne dans un bruissement rappelant le vrombissement d’une tondeuse à gazon. 

Dans leur appartement aux murs décatis, Bissam, ses parents et ses cinq frères et sœurs, n’en peuvent plus de ce ronronnement qui s’accroît le soir lorsque le tintamarre des klaxons, des marchands et des souks s’étiole.

« La nuit j’essaie de réviser pour mes examens mais je n’y arrive pas à cause de ce bruit. J’ai peur d’être ciblée par le drone. Je me mets des coussins sur les oreilles pour tenter de dormir, mais je vis avec un mélange de peur et de mal de tête », confie la Palestinienne de 18 ans.

« Mal de tête »

« Parfois, je me réveille en sursaut en pensant que le drone est dans ma chambre », dit-elle. « En arabe on utilise le mot zanana pour drone, ce qui veut dire “bourdonnement”, mais aussi “mal de tête” ».

En 2021, pendant l’offensive israélienne de onze jours sur l’enclave, 25 drones avaient survolé constamment la bande de Gaza, soit 6 000 heures de vol de ces appareils, selon l’armée israélienne.

« La nuit j’essaie de réviser pour mes examens mais je n’y arrive pas à cause de ce bruit. J’ai peur d’être ciblée par le drone. Je me mets des coussins sur les oreilles pour tenter de dormir, mais je vis avec un mélange de peur et de mal de tête »

- Une  Palestinienne de 18 ans

En août cette année, lors des 66 heures d’escalade militaire entre Israël et le Jihad islamique, l’armée a comptabilisé plus de 2 000 heures de vol, soit 30 drones en permanence.

Hors temps de guerre ou d’escalade militaire, les drones israéliens volent en moyenne 4 000 heures par mois au-dessus de Gaza, soit l’équivalent de cinq drones en permanence, a indiqué l’armée israélienne.

Ils « collectent des informations 24 heures sur 24 », soulignait récemment Omri Dror, commandant de la base de Palmahim, d’où partent ces engins vers Gaza.

Sous les drones, Rim, la mère de Bissam, peine à calmer ses enfants qui craignent d’être ciblés par ces engins armés.

« On n’arrive pas à dormir en continu. On dort, on se réveille, on dort, on se réveille », dit Rim, 42 ans, dont l’appartement est situé à une centaine de mètres d’une base des brigades al-Qassam, la branche armée du Hamas.

« Si j’entends les drones, je me dis qu’il va y avoir une escalade militaire. Je n’ai pas besoin d’écouter la radio ou la télé pour le savoir », ironise-t-elle, préférant ne pas donner son nom de famille.

« Le ciel se referme »

Dans sa clinique de Khan Younès (sud), la psychiatre Iman Hijjo reçoit des familles comme celle de Rim pour qui les drones s’ajoutent à une panoplie de traumas liés aux guerres, au chômage et au blocus imposé par Israël depuis la prise du pouvoir à Gaza du Hamas en 2007.

« Quand un insecte tourne autour de vous, vous pouvez le taper, mais pas le drone. Cela suscite un sentiment d’impuissance », souligne-t-elle, notant de « la peur et de l’anxiété » chez de jeunes enfants.

« On dit souvent que Gaza est une prison à ciel ouvert, mais avec les drones c’est comme si le ciel se refermait sur nous, sans espoir à l’horizon »

- Iman Hijjo, psychiatre à Khan Younès

« On dit souvent que Gaza est une prison à ciel ouvert, mais avec les drones c’est comme si le ciel se refermait sur nous, sans espoir à l’horizon », ajoute cette spécialiste qui déplore le manque d’études sur les effets psychologiques pour les jeunes enfants de grandir sous les drones. 

« Les enfants ont besoin de se sentir en sécurité pour se développer, mais avec les drones » ce n’est pas possible, renchérit son collègue, le psychiatre Sami Oweida. 

À Gaza, certains tentent de sublimer le son de ces engins comme le poète Mosab Abu Toha qui, dans son dernier recueil en anglais Things you may find hidden in my ear, évoque la différence entre « le bourdonnement des drones » et « le rugissement des F-16 » et rêve « d’un ciel occupé uniquement par des oiseaux et des nuages ».

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« Quand le bourdonnement des drones s’installe au-dessus de ma famille et de mes amis, il met fin aux jeux, aux palabres et aux rires », écrit Mosab à propos d’un « ciel qui verse ses larmes sur nous tous ».

« Le bourdonnement des drones et les irruptions de F-16 sont devenus des parts intégrantes de nos vies, et donc des parts intégrantes de ma poésie », explique-t-il. « J’écris à propos du ciel, de la mer, des nuages, du soleil couchant, de mes enfants, de mes voisins et à chaque fois le drone est présent. Il ne veut plus nous quitter. »

Par Guillaume Lavallee et Adel Zaanoun.

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