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« Je lui en veux d’avoir sacrifié notre relation avec le Maroc » : une députée française attaque Macron sur sa politique avec l’Algérie

Le discours des Républicains fait écho aux appels de plus en plus nombreux, dans la droite et l’extrême droite françaises, à revoir la relation bilatérale entre Paris et Alger, entretenue, selon eux, sans garantie de réussite et au détriment des acquis avec Rabat
« Il n’y aura pas de politique méditerranéenne sans le Maroc, et il faut que le président de la République le comprenne enfin », a déclaré Michèle Tabarot dimanche 27 août au grand meeting de la rentrée politique de son parti, au Cannet, dans les Alpes-Maritimes (Twitter/@MTabarot)
« Il n’y aura pas de politique méditerranéenne sans le Maroc, et il faut que le président de la République le comprenne enfin », a déclaré Michèle Tabarot dimanche 27 août au grand meeting de la rentrée politique de son parti, au Cannet, dans les Alpes-Maritimes (Twitter/@MTabarot)
Par MEE

Sous les applaudissements et les hochements de tête de Rachida Dati, maire Les Républicains (LR, libéral conservateur) du 7e arrondissement de Paris, la députée Michèle Tabarot a de nouveau mis le doigt sur la problématique relation bilatérale entre la France et le Maroc.

En parlant du président Emmanuel Macron, elle a dénoncé : « Je lui en veux d’avoir sacrifié notre relation avec le Maroc pour tenter de plaire au pouvoir algérien », dimanche 27 août au grand meeting de la rentrée politique de son parti, au Cannet, dans les Alpes-Maritimes.

Sortir des accords d’Évian

« Nous sommes allés […] dans ce grand pays il y a quelques semaines, pour y rencontrer des responsables politiques. Je veux leur dire notre volonté de relancer nos relations. Parce que, pour nous, il n’y aura pas de politique méditerranéenne sans le Maroc, et il faut que le président de la République le comprenne enfin », a-t-elle aussi déclaré.

Par « nous », elle incluait Éric Ciotti, président des Républicains, et Rachida Dati, deux fervents défenseurs de la relation entre Rabat et Paris, et qui aimeraient voir Paris soutenir le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental (l’Algérie demande à ce que les Sahraouis s’expriment sur leur statut par référendum).

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En mai, à l’occasion de leur voyage au Maroc, le premier s’était dit prêt à reconnaître officiellement la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, à l’instar des États-Unis sous l’administration Trump, s’il était élu un jour président de la République.

Il avait aussi exprimé ses réserves sur le dossier bilatéral algéro-français : « On a fait beaucoup de concessions à l’égard de l’Algérie, mais je vois peu de retours », avait-il souligné, regrettant les « messages très agressifs hostiles à la France du côté algérien malgré les gestes amicaux du président Emmanuel Macron ».  

Lors du meeting des Républicains dimanche, il s’est même montré plus radical, comme le rapporte le site marocain Tel Quel, en déclarant : « Je lui dirai [à Macron] qu’il faut que nous relancions cette grande et belle idée d’Union pour la Méditerranée qui avait été portée lorsque nous sommes arrivés aux affaires en 2007 […] Je lui demanderai de mettre enfin un terme à la relation de soumission avec l’Algérie, en sortant des accords d’Évian [accords signés au terme de la guerre avec la France en 1962, fixant notamment les principes de coopération entre les deux États]. »

Un gel qui dure

Ces propos font écho aux récentes critiques de la droite et l’extrême droite françaises sur la politique étrangère d’Emmanuel Macron au Maghreb, l’accusant de privilégier l’Algérie au détriment du Maroc.

La dernière critique très médiatisée est venue de Nicolas Sarkozy, qui, dans son livre Le Temps des combats, sorti en août chez Fayard, regrette que le président français « n’[ait] pas toujours su trouver les mots ou les gestes que les Marocains attendaient ».

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« Je ne crois pas qu’il nous faille multiplier les initiatives auprès des dirigeants algériens dont la représentativité à l’intérieur de leur pays est aussi faible que la popularité », écrit-il. « Plus nous essaierons de bâtir une amitié ‘’artificielle’’, plus ils la refuseront. Ils ont besoin d’un adversaire pour détourner l’attention de leur peuple de l’échec patent dans lequel ils ont plongé ce pays magnifique, qui compte parmi les plus riches au monde du fait d’un sous-sol regorgeant de matières premières, spécialement dans le contexte énergétique que nous connaissons. Ces initiatives, dont je peux comprendre les raisons et qui partent d’un bon sentiment, sont à mes yeux vouées à l’échec. En outre, elles risquent de nous détourner du Maroc. »

Et de conclure : « À ce jeu-là, nous risquons de tout perdre. Nous ne gagnerons pas la confiance de l’Algérie et perdrons celle du Maroc. C’est un pari dangereux, de surcroît condamné d’avance. »

Emmanuel Macron cherche à opérer un rapprochement avec l’Algérie, en forme de réconciliation historique, qui devait notamment se concrétiser au printemps par une visite d’État en France du président algérien Abdelmadjid Tebboune.

Mais cette visite, jamais officiellement annoncée, n’a à ce jour pas pu être programmée, signe de malentendus persistants entre les deux pays. Le 6 août, le chef de l’État algérien avait assuré à la télévision algérienne que la visite était « toujours maintenue » mais qu’il en attendait le programme de la part de la présidence française.

Une visite d’État a des conditions et doit déboucher sur des résultats. Ce n’est pas une visite touristique », avait-il ajouté.

Rabat et Paris sont en froid depuis des mois, un gel qui dure et s’ancre, le poste d'ambassadeur du Maroc en France étant toujours vacant depuis février 2023.

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